Le sultan Qabous d'Oman est mort à l'âge de 79 ans après un demi-siècle de règne à la tête de ce pays stable et neutre dans un Golfe sous tension, et sa succession s'est déroulée rapidement avec la désignation samedi d'un de ses cousins, Haitham ben Tarek.
Des centaines de personnes se sont réunies en matinée dans la Grande mosquée à Mascate pour les funérailles. Son cercueil porté par plusieurs hommes a fendu la foule dans l'édifice, selon des images de la télévision publique. Le sultan défunt a ensuite été enterré dans le cimetière royal d'Oman.
Dans son premier discours, le nouveau souverain s'est engagé à poursuivre sa "politique étrangère de non-ingérence".
Haitham ben Tarek a ajouté que son pays continuerait à "favoriser des solutions pacifiques" aux crises régionales et mondiales.
Qabous, qui avait pris le pouvoir à son père lors d'un coup d'Etat en juillet 1970, souffrait d'une maladie qui aurait été selon des diplomates un cancer du côlon.
- Médiateur avec l'Iran -
"C'est avec tristesse (...) que le sultanat d'Oman pleure notre sultan Qabous ben Saïd qui a été rappelé à Dieu vendredi soir", a indiqué sur Twitter le ministère de l'Information.
Le 31 décembre, les médias d'Etat avaient annoncé que le sultan se trouvait dans un "état stable", ses multiples hospitalisations en Allemagne ayant suscité des inquiétudes sur sa succession et la stabilité de ce pays du Golfe.
Mais cette succession s'est déroulée rapidement avec la désignation du ministre du Patrimoine et de la Culture et cousin du défunt sultan.
"Haitham ben Tarek a prêté serment comme nouveau souverain (...) après une réunion de la famille royale qui a validé le choix" du défunt sultan, a écrit le gouvernement sur Twitter.
La rapide succession "montre une unité, ce qui est très important dans une région instable et au regard des craintes que les (pays) voisins n'interfèrent dans le processus", estime Cinzia Bianco, chercheuse au Conseil européen pour les relations internationales.
Haitham ben Tarek, un passionné de sport de 65 ans, a été sous-secrétaire du ministère des Affaires étrangères pour les affaires politiques, avant de devenir ministre du Patrimoine et de la Culture au milieu des années 1990.
Il a également été le premier dirigeant de la Fédération de football d'Oman au début des années 1980 et est président du comité "Vision 2040", un plan de réformes socio-économiques.
Pour Mme Bianco, ces réformes "sont les plus grands défis d'Oman, en difficulté face à d'importants déficits, une dette extérieure et au chômage des jeunes".
Né en 1940 à Salalah, dans la province du Dhofar (sud), Qabous ben Saïd était entré à 20 ans à la Royal Military Academy de Sandhurst, en Grande-Bretagne.
Après son accession au trône en juillet 1970, il a modernisé ce qui était alors le plus pauvre pays de la péninsule arabique, mais qui commençait à exporter du pétrole.
Sur la scène internationale, le sultanat joue régulièrement les bons offices pour ses alliés occidentaux.
Sous le règne du sultan Qabous, Oman a consolidé son rôle de pays modéré et neutre dans un Golfe secoué de tensions, notamment en raison de l'inimitié entre les Etats-Unis, alliés des Etats arabes du Golfe, et l'Iran.
Le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a déploré "une perte pour la région", disant espérer que les relations entre Téhéran et Mascate grandissent.
- "Leadership éclairé" -
Pour le prince héritier d'Abou Dhabi, Mohammed ben Zayed al-Nahyane, le monde arabe a perdu "un dirigeant sage et une figure d'une grande stature historique".
Et le président libanais Michel Aoun a salué sur Twitter la mémoire d'un "homme de dialogue, de sagesse et de paix, qui a toujours œuvré à l'unité arabe".
Le président syrien Bachar al-Assad, a rendu hommage au sultan, qui "a créé une place remarquable pour son pays parmi les pays arabes", a-t-il écrit dans une lettre de condoléances au nouveau souverain.
Oman est le seul pays du Conseil de coopération du Golfe à avoir maintenu des relations diplomatiques avec la Syrie depuis le début de la guerre en 2011.
L'Arabie saoudite, l'Egypte, la Jordanie, le Qatar, le Koweït, le président palestinien Mahmoud Abbas et la Ligue arabe ont également salué la mémoire du sultan, tout comme les rebelles yéménites Houthis.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a salué un "dirigeant exceptionnellement sage et respecté" qui était impliqué "dans la paix et l'entente entre les nations".
L'ex-président américain George W. Bush a salué "une force stable au Moyen-Orient et un allié important des Etats-Unis", ajoutant qu'il "avait une vision pour un Oman moderne, prospère, et pacifique, et il a fait de cette vision une réalité".
Depuis l'élimination par les forces américaines du général iranien Qassem Soleimani en Irak la semaine dernière, les tensions sont montées d'un cran. Vendredi, Washington a ainsi annoncé des sanctions visant huit hauts responsables iraniens.
Les sanctions américaines affectant lourdement l'économie iranienne se sont multipliées depuis le retrait unilatéral du président Donald Trump de l'accord sur le nucléaire iranien, sur lequel Mascate avait été sollicité.
Oman est également intervenu dans des affaires de libérations d'otages, notamment au Yémen voisin en guerre.
AFP