Les lumières s'éteignent, le projecteur se met en marche et des Saoudiens assoiffés de culture et de divertissement s'abandonnent avec délectation dans des fauteuils moelleux pour vivre une expérience dont ils ont été privés pendant des décennies: une sortie au cinéma.
Cette rare projection d'un film cette semaine à Ryad donne un avant-goût de l'enthousiasme que susciterait la levée de l'interdiction du cinéma, considéré comme un péché par les religieux les plus conservateurs du pays.
Les autorités saoudiennes ont laissé entendre que les cinémas pourraient bientôt être autorisés --après un décret permettant aux femmes de conduire-- dans le cadre d'un ambitieux programme de réformes qui pourrait révolutionner la scène culturelle du royaume, où la moitié de la population a moins de 25 ans.
"Le cinéma montre aux gens la réalité, c'est un reflet de leurs propres vies sur écran", affirme Faisal Alharbi, réalisateur de "National Dialogue", l'un des trois courts métrages projetés devant une salle pleine au Centre culturel King Fahd de la capitale.
A l'entrée du bâtiment, des effluves de viande grillée se mêlent aux arômes de café, distribué aux spectateurs dans de petits gobelets.
Le royaume interdisant la mixité, hommes et femmes sont séparés dans la salle.
"J'espère que les salles de cinéma seront pleines à craquer" une fois l'interdiction levée, s'enthousiasme Sultan, un étudiant en médecine qui rêve aussi de pop-corn et de barbe à papa.
- A l'ère de YouTube -
Les milieux conservateurs, qui considèrent le cinéma comme une menace pour l'identité culturelle et religieuse, avaient joué un rôle clé dans son interdiction dans les années 1980.
En janvier, le mufti du royaume s'est insurgé contre la possible ouverture de salles de cinéma et la tenue de concerts, affirmant qu'elles seraient sources de "dépravation" car elles favorisent la mixité.
Mais le royaume, confronté à la chute des prix du pétrole dont il est le premier exportateur mondial, a lancé l'année dernière un vaste programme de diversification de son économie baptisé "Vision 2030".
Une Autorité du divertissement a déjà organisé des concerts, un premier festival Comic-Con et d'autres manifestations culturelles.
Interdire les cinémas n'a aucun sens à l'ère de YouTube, affirment des réalisateurs saoudiens.
Ces dernières années, plusieurs films saoudiens ont eu du succès à l'étranger, notamment celui de Haifaa Al-Mansour, "Wadjda", acclamé par la critique internationale et largement récompensé dans des festivals en 2013.
Ce long métrage poignant décrit l'histoire d'une fillette rebelle qui rêve d'avoir une bicyclette comme ses petits voisins.
Cette année, le royaume espère obtenir un Oscar pour "Barakah Meets Barakah" de Mahmoud Sabbagh, une comédie romantique qui a été projetée à la Berlinale en 2016.
"Sans cinéma, les talents artistiques du pays vont s'éteindre", met en garde Hisham Fageeh, l'acteur principal du film.
- 'Sensation d'être humains' -
Le gouvernement saoudien n'a pas encore annoncé de date officielle pour la levée de l'interdiction mais le hashtag "les cinémas ouvrent à Ryad" prend déjà de l'ampleur sur les réseaux sociaux.
Les Saoudiens dépensent des milliards de dollars tous les ans pour aller au cinéma ou visiter des parcs d'attraction dans les pays voisins.
Sans salles de cinémas, l'industrie saoudienne du 7e art a très peu de chances d'attirer des investisseurs et la société saoudienne continuera à apparaître aux yeux du monde uniquement sous le prisme de l'extrémisme religieux, déplorent les réalisateurs.
Avoir des salles de cinéma "nous donnera la sensation d'être humains", affirme Ali Kalthami, cofondateur de C3 Films et Telfaz11, qui publient des vidéos sur YouTube.
Son film "Wasati" (modéré, en arabe) est basé sur une histoire vraie du milieu des années 1990, quand des ultraconservateurs ont interrompu une pièce de théâtre dans une université saoudienne.
Une projection du court métrage a eu lieu plus tôt cette année à l'endroit même où la pièce avait été perturbée.
Au Centre culturel King Fahd, le film "National Dialogue" a maintenu en haleine les spectateurs. Il dépeint le dilemme auquel sont confrontés les jeunes saoudiens qui cherchent l'amour. Un homme et une femme se rencontrent dans la rue, ils ont l'air de s'apprécier mais il finit par la rejeter, jugeant immoral qu'elle relève son voile pour lui permettre de mieux l'apercevoir.
Pour M. Alharbi, son film cherche à promouvoir le dialogue entre les deux sexes.
A la fin de la séance, des acclamations enthousiastes ont été lancées par les hommes de la salle, qui ont été hués par l'audience féminine.
(©AFP / 22 octobre 2017 10h06)
Cette rare projection d'un film cette semaine à Ryad donne un avant-goût de l'enthousiasme que susciterait la levée de l'interdiction du cinéma, considéré comme un péché par les religieux les plus conservateurs du pays.
Les autorités saoudiennes ont laissé entendre que les cinémas pourraient bientôt être autorisés --après un décret permettant aux femmes de conduire-- dans le cadre d'un ambitieux programme de réformes qui pourrait révolutionner la scène culturelle du royaume, où la moitié de la population a moins de 25 ans.
"Le cinéma montre aux gens la réalité, c'est un reflet de leurs propres vies sur écran", affirme Faisal Alharbi, réalisateur de "National Dialogue", l'un des trois courts métrages projetés devant une salle pleine au Centre culturel King Fahd de la capitale.
A l'entrée du bâtiment, des effluves de viande grillée se mêlent aux arômes de café, distribué aux spectateurs dans de petits gobelets.
Le royaume interdisant la mixité, hommes et femmes sont séparés dans la salle.
"J'espère que les salles de cinéma seront pleines à craquer" une fois l'interdiction levée, s'enthousiasme Sultan, un étudiant en médecine qui rêve aussi de pop-corn et de barbe à papa.
- A l'ère de YouTube -
Les milieux conservateurs, qui considèrent le cinéma comme une menace pour l'identité culturelle et religieuse, avaient joué un rôle clé dans son interdiction dans les années 1980.
En janvier, le mufti du royaume s'est insurgé contre la possible ouverture de salles de cinéma et la tenue de concerts, affirmant qu'elles seraient sources de "dépravation" car elles favorisent la mixité.
Mais le royaume, confronté à la chute des prix du pétrole dont il est le premier exportateur mondial, a lancé l'année dernière un vaste programme de diversification de son économie baptisé "Vision 2030".
Une Autorité du divertissement a déjà organisé des concerts, un premier festival Comic-Con et d'autres manifestations culturelles.
Interdire les cinémas n'a aucun sens à l'ère de YouTube, affirment des réalisateurs saoudiens.
Ces dernières années, plusieurs films saoudiens ont eu du succès à l'étranger, notamment celui de Haifaa Al-Mansour, "Wadjda", acclamé par la critique internationale et largement récompensé dans des festivals en 2013.
Ce long métrage poignant décrit l'histoire d'une fillette rebelle qui rêve d'avoir une bicyclette comme ses petits voisins.
Cette année, le royaume espère obtenir un Oscar pour "Barakah Meets Barakah" de Mahmoud Sabbagh, une comédie romantique qui a été projetée à la Berlinale en 2016.
"Sans cinéma, les talents artistiques du pays vont s'éteindre", met en garde Hisham Fageeh, l'acteur principal du film.
- 'Sensation d'être humains' -
Le gouvernement saoudien n'a pas encore annoncé de date officielle pour la levée de l'interdiction mais le hashtag "les cinémas ouvrent à Ryad" prend déjà de l'ampleur sur les réseaux sociaux.
Les Saoudiens dépensent des milliards de dollars tous les ans pour aller au cinéma ou visiter des parcs d'attraction dans les pays voisins.
Sans salles de cinémas, l'industrie saoudienne du 7e art a très peu de chances d'attirer des investisseurs et la société saoudienne continuera à apparaître aux yeux du monde uniquement sous le prisme de l'extrémisme religieux, déplorent les réalisateurs.
Avoir des salles de cinéma "nous donnera la sensation d'être humains", affirme Ali Kalthami, cofondateur de C3 Films et Telfaz11, qui publient des vidéos sur YouTube.
Son film "Wasati" (modéré, en arabe) est basé sur une histoire vraie du milieu des années 1990, quand des ultraconservateurs ont interrompu une pièce de théâtre dans une université saoudienne.
Une projection du court métrage a eu lieu plus tôt cette année à l'endroit même où la pièce avait été perturbée.
Au Centre culturel King Fahd, le film "National Dialogue" a maintenu en haleine les spectateurs. Il dépeint le dilemme auquel sont confrontés les jeunes saoudiens qui cherchent l'amour. Un homme et une femme se rencontrent dans la rue, ils ont l'air de s'apprécier mais il finit par la rejeter, jugeant immoral qu'elle relève son voile pour lui permettre de mieux l'apercevoir.
Pour M. Alharbi, son film cherche à promouvoir le dialogue entre les deux sexes.
A la fin de la séance, des acclamations enthousiastes ont été lancées par les hommes de la salle, qui ont été hués par l'audience féminine.
(©AFP / 22 octobre 2017 10h06)