Le Gouverneur de la Banque Centrale de Mauritanie (BCM), Monsieur Abdel Aziz Ould Dahi, a regagné la capitale vendredi après avoir présenté à Dakar la vision stratégique de la BCM, visant à introduire les nouvelles technologies dans les services financiers en Mauritanie.
M. le Gouverneur qui a été l’invité de marque de la Conférence Internationale organisée par la BCEAO et la Banque Mondiale, les 30 et 31 octobre 2019, sur le thème «FinTech : défis, opportunités et perspectives pour les pays en développement» s’est dit en premier lieu frappé par la grande diversité des initiatives qui ont été présentées. Incontestablement, la technologie financière (FinTech) fait naître des idées nouvelles et sollicite des innovations sources de larges perspectives, ajoute –t-il.
D’abord, poursuit-il, s’il y a là une technologie innovante, ouverte sur un vaste champ d’applications, nous devons tenir compte que son appropriation et sa mise en œuvre seront collectives. Car, développer la technologie financière et, plus largement, la finance digitale, nécessite tout un «écosystème».
Voici le texte intégral de ce discours :
« Messiers les Gouverneurs,
Messieurs les Ministres
Mesdames et Messieurs les participants,
Je tiens tout d’abord à remercier la BCEAO et la Banque Mondiale pour l’organisation de cet événement de haut niveau et nous y avoir associé. Le thème de cette conférence revêt à mes yeux une grande importance pour le développement inclusif dans notre région et dans l’Afrique toute entière.
J’ai suivi avec une attention particulière les exposés qui se sont succédé et j’en tire, en tant que simple observateur tout d’abord, un certain nombre de remarques.
Je suis en premier lieu frappé par la grande diversité des initiatives qui ont été présentées. Incontestablement, la technologie financière (FinTech) fait naître des idées nouvelles et sollicite des innovations sources de larges perspectives ! Au point qu’il n’est guère de domaines financiers qui ne paraissent appeler son déploiement.
Je constate également que, bien que récente, l’appropriation de cette technologie par les institutions financières s’est rapidement traduite par des applications concrètes, dont plusieurs ont rencontré un succès très encourageant. Bien que «disruptive », comme on le dit souvent, la technologie de la blockchain n’en est pas moins susceptible de trouver des emplois assez immédiats. Cela montre qu’elle est à même de répondre à de vrais besoins dans notre sous-région.
Enfin, je suis évidemment sensible aux avancées en matière réglementaire, aux dispositifs d’accompagnement, tels que les sandbox, qui ont été mis en place et qui sont testés par les autorités financières. Certes, des questions demeurent. Mais on ne peut que se féliciter du pragmatisme déployé, pour éviter tout découplage pénalisant entre ce que la technologie permet rapidement d’envisager et ce que la réglementation autorise.
De tout ceci, je retiens, en tant que Gouverneur de la Banque centrale de Mauritanie cette fois, plusieurs éléments déterminants :
D’abord, s’il y a là une technologie innovante, ouverte sur un vaste champ d’applications, nous devons tenir compte que son appropriation et sa mise en œuvre seront collectives. Car, développer la technologie financière et, plus largement, la finance digitale, nécessite tout un «écosystème». Ce qui signifie des apports réciproques et une fertilisation croisée entre différents acteurs: les banques et établissements financiers, les compagnies d’assurances et des startups fintech, dont l’essor doit être favorisé. Evidemment, les régulateurs font pleinement partie de cet écosystème.
Ensuite, dans la sphère financière, en effet, personne ne pourra, lui seul, couvrir l’ensemble des solutions possibles, ni sera à même d’en envisager toutes les incidences et tous les risques, non moins pourra mobiliser les moyens et les compétences nécessaires.
Enfin, il ne s’agira pas seulement de gérer une transition technologique. Nous sommes plutôt invités, particulièrement dans nos pays, à recomposer et à étoffer notre paysage financier. C’est pour cela que l’implication des autorités réglementaires est indispensable, pour aussi bien dynamiser qu’encadrer l’évolution d’un environnement financier qui va connaitre de nombreuses impulsions.
C’est pourquoi il faut voir les fintech comme une ferme d’exigences nouvelles, qui vont devenir aussi générales que pressantes.
Parce qu’il rend possible, en effet, plus de transparence et de sécurité, plus de traçabilité, des coûts réduits et une conservation documentaire sécurisée, le recours à la blockchain va faire que ces critères seront de plus en plus communément exigés par le public. Et ceci, dans beaucoup de domaines: la véritable novation sera là, et elle sera loin de se limiter à la seule sphère financière.
La sphère financière qui, à travers la gestion des garanties, notamment, invite à orienter, à l’échelle nationale, l’utilisation de la blockchain pour la protection des données individuelles et la gestion des identités personnelles, aussi bien que des situations patrimoniales et cadastrales. Tandis que, en même temps, on verra – on l’a vu déjà en fait – apparaitre des solutions blockchain portant sur l’administration et le suivi des chaines d’approvisionnement logistiques, alimentaires et de santé.
De nouvelles exigences vont ainsi provoquer des impulsions dans de nombreux domaines. Et la question que doit se poser le régulateur est de savoir si toutes ces évolutions pourront partager des objectifs communs. Car, cela favorisera tant leur développement que le soutien qu’on peut lui apporter.
Je note en ce sens que, pour ce qui concerne la sphère financière, l’écosystème qui est susceptible d’apparaitre autour de la finance digitale correspond à un paysage - notamment bancaire - plus complet, plus compétitif, aux offres élargies et aux services plus performants. En somme, ce qui est le mieux à même de favoriser l’inclusion financière !
L’inclusion financière qui, en effet, ne se limite pas à la possession d’un compte bancaire, ni même au fait d’accéder au crédit. Telle que définie par l’ONU, l’inclusion financière suppose l’existence et la régulation d’un système financier complet et performant, proposant aux agents économiques un ensemble d’offres variées et bon marché. Et dans le cadre national de lutte contre la pauvreté, l’inclusion financière représente un levier décisif.
La Banque centrale de Mauritanie estime qu’il lui revient pleinement d’exercer une vigilance particulière sur les technologies nouvelles de la finance digitale et d’en favoriser à la fois l’appropriation et le développement par les acteurs économiques, sans se substituer à eux.
Ainsi, nous nous voyons dans un rôle à la fois de tuteur et d’aiguillon et, à cet effet, nous avons lancé un certain nombre d’initiatives. Celles-ci recouvrent l’évolution du cadre financier et sa mise aux normes internationales, aussi bien que le développement des paiements digitaux.
Par ailleurs, nous avons réalisé un premier Fintech Challenge, en juillet dernier, mettant en lumière un nombre important de startups mauritaniennes, aux compétences de pointe et aux projets variés, que nous voulons accompagner à travers un véritable Lab d’innovation.
Enfin, sollicitant des expertises internationales, nous explorons la technologie des registres distribués. Et pour favoriser son appropriation, nous allons lancer une application pilote avec les institutions de microfinance de notre pays.
Aussi, nous sommes sur le point de mettre à jour toute la réglementation relative à la finance digitale, d’adopter un sandbox national et de lancer un grand projet de portail de paiement digital qui permettra à terme l’interopérabilité de toutes les solutions digitales présentes sur le marché notamment celles relatives au mobile payement, e-payment et des autres applications de la finance digitale.
D’autres initiatives émergerons bientôt, mais cette fois-ci de la part des acteurs privés financiers ou non financiers, notamment de la part de startups à forte connotation technologique qui affichent d’ores et déjà des perspectives prometteuses.
Tout ceci m’amène enfin à souligner – face à la multiplicité des facettes de la finance digitale et de ses applications, ainsi que face à la variété des compétences que celles-ci mobilisent - l’importance des échanges internationaux, comme ceux qui nous réunissent aujourd’hui.
En félicitant chaleureusement Mesdames et Messieurs les organisateurs, je ne peux donc que souhaiter que de tels échanges se reproduisent et deviennent fréquents.
Je vous remercie ».
AMI
M. le Gouverneur qui a été l’invité de marque de la Conférence Internationale organisée par la BCEAO et la Banque Mondiale, les 30 et 31 octobre 2019, sur le thème «FinTech : défis, opportunités et perspectives pour les pays en développement» s’est dit en premier lieu frappé par la grande diversité des initiatives qui ont été présentées. Incontestablement, la technologie financière (FinTech) fait naître des idées nouvelles et sollicite des innovations sources de larges perspectives, ajoute –t-il.
D’abord, poursuit-il, s’il y a là une technologie innovante, ouverte sur un vaste champ d’applications, nous devons tenir compte que son appropriation et sa mise en œuvre seront collectives. Car, développer la technologie financière et, plus largement, la finance digitale, nécessite tout un «écosystème».
Voici le texte intégral de ce discours :
« Messiers les Gouverneurs,
Messieurs les Ministres
Mesdames et Messieurs les participants,
Je tiens tout d’abord à remercier la BCEAO et la Banque Mondiale pour l’organisation de cet événement de haut niveau et nous y avoir associé. Le thème de cette conférence revêt à mes yeux une grande importance pour le développement inclusif dans notre région et dans l’Afrique toute entière.
J’ai suivi avec une attention particulière les exposés qui se sont succédé et j’en tire, en tant que simple observateur tout d’abord, un certain nombre de remarques.
Je suis en premier lieu frappé par la grande diversité des initiatives qui ont été présentées. Incontestablement, la technologie financière (FinTech) fait naître des idées nouvelles et sollicite des innovations sources de larges perspectives ! Au point qu’il n’est guère de domaines financiers qui ne paraissent appeler son déploiement.
Je constate également que, bien que récente, l’appropriation de cette technologie par les institutions financières s’est rapidement traduite par des applications concrètes, dont plusieurs ont rencontré un succès très encourageant. Bien que «disruptive », comme on le dit souvent, la technologie de la blockchain n’en est pas moins susceptible de trouver des emplois assez immédiats. Cela montre qu’elle est à même de répondre à de vrais besoins dans notre sous-région.
Enfin, je suis évidemment sensible aux avancées en matière réglementaire, aux dispositifs d’accompagnement, tels que les sandbox, qui ont été mis en place et qui sont testés par les autorités financières. Certes, des questions demeurent. Mais on ne peut que se féliciter du pragmatisme déployé, pour éviter tout découplage pénalisant entre ce que la technologie permet rapidement d’envisager et ce que la réglementation autorise.
De tout ceci, je retiens, en tant que Gouverneur de la Banque centrale de Mauritanie cette fois, plusieurs éléments déterminants :
D’abord, s’il y a là une technologie innovante, ouverte sur un vaste champ d’applications, nous devons tenir compte que son appropriation et sa mise en œuvre seront collectives. Car, développer la technologie financière et, plus largement, la finance digitale, nécessite tout un «écosystème». Ce qui signifie des apports réciproques et une fertilisation croisée entre différents acteurs: les banques et établissements financiers, les compagnies d’assurances et des startups fintech, dont l’essor doit être favorisé. Evidemment, les régulateurs font pleinement partie de cet écosystème.
Ensuite, dans la sphère financière, en effet, personne ne pourra, lui seul, couvrir l’ensemble des solutions possibles, ni sera à même d’en envisager toutes les incidences et tous les risques, non moins pourra mobiliser les moyens et les compétences nécessaires.
Enfin, il ne s’agira pas seulement de gérer une transition technologique. Nous sommes plutôt invités, particulièrement dans nos pays, à recomposer et à étoffer notre paysage financier. C’est pour cela que l’implication des autorités réglementaires est indispensable, pour aussi bien dynamiser qu’encadrer l’évolution d’un environnement financier qui va connaitre de nombreuses impulsions.
C’est pourquoi il faut voir les fintech comme une ferme d’exigences nouvelles, qui vont devenir aussi générales que pressantes.
Parce qu’il rend possible, en effet, plus de transparence et de sécurité, plus de traçabilité, des coûts réduits et une conservation documentaire sécurisée, le recours à la blockchain va faire que ces critères seront de plus en plus communément exigés par le public. Et ceci, dans beaucoup de domaines: la véritable novation sera là, et elle sera loin de se limiter à la seule sphère financière.
La sphère financière qui, à travers la gestion des garanties, notamment, invite à orienter, à l’échelle nationale, l’utilisation de la blockchain pour la protection des données individuelles et la gestion des identités personnelles, aussi bien que des situations patrimoniales et cadastrales. Tandis que, en même temps, on verra – on l’a vu déjà en fait – apparaitre des solutions blockchain portant sur l’administration et le suivi des chaines d’approvisionnement logistiques, alimentaires et de santé.
De nouvelles exigences vont ainsi provoquer des impulsions dans de nombreux domaines. Et la question que doit se poser le régulateur est de savoir si toutes ces évolutions pourront partager des objectifs communs. Car, cela favorisera tant leur développement que le soutien qu’on peut lui apporter.
Je note en ce sens que, pour ce qui concerne la sphère financière, l’écosystème qui est susceptible d’apparaitre autour de la finance digitale correspond à un paysage - notamment bancaire - plus complet, plus compétitif, aux offres élargies et aux services plus performants. En somme, ce qui est le mieux à même de favoriser l’inclusion financière !
L’inclusion financière qui, en effet, ne se limite pas à la possession d’un compte bancaire, ni même au fait d’accéder au crédit. Telle que définie par l’ONU, l’inclusion financière suppose l’existence et la régulation d’un système financier complet et performant, proposant aux agents économiques un ensemble d’offres variées et bon marché. Et dans le cadre national de lutte contre la pauvreté, l’inclusion financière représente un levier décisif.
La Banque centrale de Mauritanie estime qu’il lui revient pleinement d’exercer une vigilance particulière sur les technologies nouvelles de la finance digitale et d’en favoriser à la fois l’appropriation et le développement par les acteurs économiques, sans se substituer à eux.
Ainsi, nous nous voyons dans un rôle à la fois de tuteur et d’aiguillon et, à cet effet, nous avons lancé un certain nombre d’initiatives. Celles-ci recouvrent l’évolution du cadre financier et sa mise aux normes internationales, aussi bien que le développement des paiements digitaux.
Par ailleurs, nous avons réalisé un premier Fintech Challenge, en juillet dernier, mettant en lumière un nombre important de startups mauritaniennes, aux compétences de pointe et aux projets variés, que nous voulons accompagner à travers un véritable Lab d’innovation.
Enfin, sollicitant des expertises internationales, nous explorons la technologie des registres distribués. Et pour favoriser son appropriation, nous allons lancer une application pilote avec les institutions de microfinance de notre pays.
Aussi, nous sommes sur le point de mettre à jour toute la réglementation relative à la finance digitale, d’adopter un sandbox national et de lancer un grand projet de portail de paiement digital qui permettra à terme l’interopérabilité de toutes les solutions digitales présentes sur le marché notamment celles relatives au mobile payement, e-payment et des autres applications de la finance digitale.
D’autres initiatives émergerons bientôt, mais cette fois-ci de la part des acteurs privés financiers ou non financiers, notamment de la part de startups à forte connotation technologique qui affichent d’ores et déjà des perspectives prometteuses.
Tout ceci m’amène enfin à souligner – face à la multiplicité des facettes de la finance digitale et de ses applications, ainsi que face à la variété des compétences que celles-ci mobilisent - l’importance des échanges internationaux, comme ceux qui nous réunissent aujourd’hui.
En félicitant chaleureusement Mesdames et Messieurs les organisateurs, je ne peux donc que souhaiter que de tels échanges se reproduisent et deviennent fréquents.
Je vous remercie ».
AMI