La cérémonie de signature du Pacte Républicain, conclu entre le Gouvernement, l’Union des Forces du Progrès, le Rassemblement des Forces Démocratiques et Insaf, a eu lieu, jeudi soir, à Nouakchott. Selon les signataires, cet accord est le fruit de l’atmosphère d’apaisement et d’ouverture, instauré par le Président de la République, depuis son accession au pouvoir.
Le palais des congrès de Nouakchott a refusé du monde. Militants et sympathisants des partis dirigés par M. Ahmed Ould Daddah, M. Mohamed Ould Maouloud et M. Mohamed Lemine Ould Eyih, ont répondu présent. Ils sont venus assister à un « épisode majeur » de l’histoire politique du pays, qui s’est déroulé sous la supervision du ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation, M. Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine.
Les délégués des partis, qui se sont succédé au pupitre, ont tous mis en avant le souci de leurs formations politiques, de réunir majorité et opposition autour de l’essentiel. Il s’agit d’après eux, d’une demande pressante de toutes les forces nationales, qui aspirent à la bonne gouvernance, à la consécration des libertés et à la lutte sérieuse contre la corruption.
Ainsi, une feuille de route constituée de huit points a été établie pour venir à bout, de nombreux maux qui touchent la société. Les parties prenantes notent que les réformes viseront à renforcer la cohésion sociale, la préservation de l’unité nationale, à travers le règlement de tous les dossiers liés aux droits de l’homme. Par la même occasion, ils entendent matérialiser leur volonté de consolider les valeurs et pratiques de la démocratie, en mettant en exergue la nécessité de réformer les institutions de l’État.
Pour eux, la finalité de cet accord, c’est d’améliorer les conditions de vie des populations, accédant librement aux services publics de base, notamment la santé, l’éducation et l’emploi. Concernant la mise en œuvre cette vision, les parties ont prévu la constitution d’un comité d’orientation et de suivi dans un délai n’excédant pas deux mois, à compter de la date de signature.
Par ailleurs, les signataires de l’accord politique qui estiment que l’opposition et la majorité, endossent la responsabilité politique et morale de tout ce qui pourrait advenir au pays, mettent en garde contre le manque de lucidité et de clairvoyance des protagonistes politiques. C’est pour cette raison, qu’ils tendent la main, aux partis politiques désireux de se joindre au Pacte Républicain, afin de contribuer à la réalisation des objectifs évoqués plus haut.
Outre la constitution du comité de suivi, les parties prenantes vont s’atteler à la conception d’ateliers thématiques, afin de discuter des réformes estimées nécessaires et entrer rapidement dans une phase d’opérationnalisation.
Feuille de route:
Déterminées à faire face à ces multiples défis et périls, nous, parties signataires :
1. Réitérons notre indéfectible attachement à la préservation de la stabilité et de la sécurité du pays par l’instauration d’un système fondé sur la justice sociale, l’État de droit et les valeurs démocratiques ;
2. Considérons que la Majorité et l’Opposition constituent les acteurs principaux dans toute démocratie et portent, chacun en ce qui le concerne, la responsabilité politique et morale de tout ce qui pourrait advenir au pays, en raison du manque de lucidité et de clairvoyance des protagonistes politiques ;
3. Décidons, dans ce contexte sensible, de surmonter nos divergences, en vue de servir les intérêts supérieurs du pays et lui éviter les périls auxquels peuvent le soumettre les divisions stériles et destructrices au sein de la classe politique ;
4. Comptons conduire, en urgence, une profonde réflexion sur notre système électoral et, le cas échéant, engager les réformes pertinentes visant à renforcer notre démocratie, afin de dépasser le contexte issu des dernières élections et prévenir tout désaccord électoral à l’avenir ;
5. Exprimons notre commune volonté de procéder aux réformes fondamentales indispensables à la préservation et au renforcement de l’unité nationale, et à l’ancrage des valeurs et pratiques de la démocratie et de l’État de droit. Ces réformes porteront, également, sur la concrétisation de la justice sociale et de la bonne gouvernance ainsi que sur l’amélioration des conditions de vie de nos populations, éprouvées par la crise et les répercussions des conditions résultant de la décennie du pouvoir précédent. Ces réformes seront menées dans un cadre national inclusif et participatif, sous forme d’ateliers, sur la base de la liste des thématiques en annexe au présent Accord, dont elle constitue une partie intégrante ;
6. Annonçons la conclusion du présent Accord pour la création d’une Entente politique, nationale, républicaine et démocratique, dénommée Pacte Républicain, ouverte à tous les partis politiques désireux de s’y joindre pour la réalisation des réformes énumérées ci-haut ;
7. Œuvrerons dans le cadre du Pacte Républicain, à tous les niveaux et par tous les moyens, en vue de conduire notre pays vers davantage d’unité, d’harmonie, de cohésion sociale et, partant, de démocratie, de développement et de prospérité ;
8. Convenons de la mise en place, à compter de la signature du présent Accord, d’un Comité d’Orientation et de Suivi où seront représentées les parties signataires, pour la mise en œuvre de l’Accord, dans un délai n’excédant pas deux mois à compter de sa date de signature.
Annexe au « Pacte Républicain »
Les réformes évoquées dans le Pacte Républicain s’articulent, notamment, autour des mesures suivantes :
1. Conduire, en urgence, une profonde réflexion sur notre système électoral et, le cas échéant, engager les réformes pertinentes, afin de dépasser le contexte issu des dernières élections, activer les dispositions légales en matière électorale et prévenir tout désaccord électoral à l’avenir ;
2. Mettre en place un mécanisme crédible pour le règlement définitif des dossiers des droits de l’homme et des injustices en suspens, en tenant compte des efforts déployés et des actions entreprises par le passé afin de résoudre ces questions ;
3. Adopter des mesures concrètes visant à traduire, dans les faits, la diversité culturelle du pays dans l’espace public, notamment au niveau des médias, des programmes éducatifs et des événements officiels, en activant le statut constitutionnel de la langue arabe et en reconnaissant la vocation des langues pulaar, soninke et wolof à accéder au statut de langues officielles ;
4. Appliquer de manière stricte le dispositif juridique pénalisant les pratiques esclavagistes et racistes, et les injustices à l’égard des couches marginalisées, ainsi que les discours incitant à la violence, au fanatisme, à l’extrémisme, au racisme et à la haine, et mettre en place un mécanisme national pour la prise en charge des victimes des pratiques sus-évoquées, y compris par l’adoption et la mise en œuvre de politiques nationales efficientes à même de réduire les inégalités sociales, conduisant ainsi à une discrimination positive en faveur de ces groupes ;
5. Appliquer de manière effective le principe de l’égalité des chances entre tous les citoyens du pays, dans tous les domaines et à tous les niveaux, et instaurer l’égalité entre les acteurs économiques devant les services administratifs ;
6. Combattre la hausse des prix par des mesures appropriées de nature à protéger, durablement, le pouvoir d’achat des populations ;
7. Mettre en place un mécanisme efficace de mobilisation nationale pour une réforme foncière visant à soutenir et promouvoir l’agriculture et à renforcer les politiques visant l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire qui constitue un des piliers de la souveraineté et de la sécurité nationales ;
8. Promouvoir la décentralisation et la bonne gouvernance dans les domaines de la gestion des affaires publiques, de l’administration et des finances de l’Etat, en renforçant et en mettant en œuvre, de manière effective, les dispositifs nationaux de lutte contre la corruption ;
9. Appliquer les conclusions des concertations nationales sur la réforme de l’éducation et promouvoir la contribution substantielle de toutes les forces vives de la nation pour assurer le succès de l’école républicaine ;
10. Appliquer les conclusions des concertations nationales sur la réforme de la justice ;
11. Appliquer la stricte séparation entre les emplois politiques et postes techniques et procéder à l’éloignement de l’administration publique du champ politique et des compétitions électorales ;
12. Assurer la promotion des partis politiques afin de leur permettre de s’acquitter de leurs missions constitutionnelles ; réviser et appliquer les textes juridiques et réglementaires qui les régissent ;
13. Assurer la promotion du secteur privé, des collectivités locales, de la société civile, de la presse, des syndicats et pour leur permettre de jouer leur rôle d’acteurs majeurs dans le développement du pays ;
14. Promouvoir l’instauration d’un dialogue durable entre les partenaires sociaux et assurer la protection des droits des travailleurs ;
15. Mettre en place une stratégie nationale intégrée visant à protéger les enfants et les jeunes contre la drogue, la délinquance et la violence, et assurer un traitement adéquat du chômage et du phénomène de la migration des jeunes ;
16. Promouvoir une autonomisation plus accrue des femmes, des jeunes et des personnes aux besoins spécifiques, et veiller à leur insertion dans la vie politique, économique, culturelle et sociale du pays à travers notamment l’adoption et la mise en œuvre de politiques efficientes en matière d’emplois professionnels qualifiants ;
17. Mettre en place un fonds souverain alimenté par les revenus des hydrocarbures pour la promotion du développement économique durable et équilibré du pays et qui préserve les intérêts des générations futures ;
18. Identifier et mobiliser les compétences, expertises et investissements de nos communautés à l’étranger au profit du pays.
Fait à Nouakchott le 05 rabi’al-awal 1445 correspondant au 21 septembre 2023 en cinq (5) exemplaires originaux.
Les parties signataires:
Pour le Parti UFP Pour le Parti RFD Pour le Parti INSAF
Le Président Le Président Le Président
Mohamed ould Maouloud Ahmed ould Daddah Mohamed Melainine ould Eyih
Pour le Gouvernement
Le Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation
Mohamed Ahmed ould Mohamed Lemine
AMI