Biram Dah Abeid, le leader mauritanien haratine et abolitionniste, également candidat aux législatives, a été arrêté le 7 août à Nouakchott. Il a été inculpé le 13 août pour « atteinte à l'intégrité d'autrui et menace d'usage de la violence ».
Une cabale judiciaire vise-t-elle l’opposant Biram Dah Abeid, président de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA) ? Arrêté le 7 août en fin de matinée à son domicile du quartier PK 10, à Nouakchott, l’ancien candidat à la présidentielle de 2014, résolument critique envers le président Mohamed Ould Abdelaziz, a été inculpé lundi 13 août pour « atteinte à l’intégrité d’autrui et menace d’usage de la violence » et placé sous mandat de dépôt.
Depuis qu’il a été conduit au commissariat de Riyadh, ses sympathisants se perdent en conjectures. Car quelques jours plus tôt, cet opposant résolu, porte-voix des griefs adressés au régime par la communauté négro-mauritanienne – il est lui-même Haratine – avait déposé sa candidature aux élections législatives prévues en septembre. Au risque de surprendre, voire de perdre en sympathie dans cette communauté, Biram Dah Abeid a récemment passé une alliance avec le parti Sawab, un mouvement baasiste d’obédience nationaliste et panarabe.
Prise de bec
À l’origine de cette énième arrestation du président de l’IRA, une affaire qui, pourtant, ne semblait pas mériter un tel écho. En juillet, un journaliste mauritanien, Abdallah Deddah, portait plainte contre Biram Dah Abeid. En cause, selon un proche de ce dernier, « des propos malencontreux, certes durs, à l’égard de ce journaliste, mais qui étaient tenus sous le coup de la colère parce qu’il avait, comme d’autres avant lui, présenté le combat de Biram de manière biaisée ».
De son côté, Abdallah Deddah assure à Jeune Afrique avoir reçu des messages agressifs, voire menaçants, de la part de Biram et de quelques autres militants de l’IRA, suite à la diffusion, sur sa chaîne YouTube, le 27 juin, d’un documentaire consacré à l’alliance électorale du parti RAG (émanation politique de l’IRA) avec Sawab. Le 4 juillet, le journaliste, qui fut notamment le correspondant de la chaîne qatarie Al Jazeera, dépose plainte à Nouakchott contre Biram Dah Abeid et les militants qui l’ont contacté pour injures et menaces. Le 30 juillet, il est entendu par le procureur.
Ses partisans s’interrogent
Au cœur de la discorde, l’alliance passée en mai entre l’IRA et le parti Sawab en vue des législatives. C’est elle qui a intéressé Deddah, selon ses dires. Le 2 août, cinq jours avant son arrestation, Biram déposait son dossier de candidature et recevait un récépissé provisoire auprès de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). De quoi susciter des interrogations chez ses partisans : « Nous savons depuis le début que l’affaire est montée de toutes pièces et que c’est la personne du président Biram qui est visée », déclare ainsi à l’AFP Hamadi Lehbouss, le porte-parole du mouvement.
« Je n’ai aucun souci avec l’IRA et ne souhaite la prison à personne, tempère quant à lui Abdallah Deddah. Je sais bien que la justice mauritanienne n’est pas parfaite et je ne souhaite pas que des personnalités de la société civile aient des soucis. Je ne permettrai pas que ma démarche en justice soit manipulée politiquement par quiconque. »
Le président de Sawab et le vice-président de l’IRA sont, eux, entrés en contact avec Deddah afin de tenter de calmer le jeu. Des contacts ont par ailleurs été noués entre des associations de journalistes et les militants de l’IRA et de Sawab.
Une garde à vue confuse
En outre, les avocats de Biram Dah Abeid se posent des questions sur la légalité de la garde à vue de leur client, théoriquement limitée à 48 heures. Selon Me Lo Gourmo, l’un de ses avocats, ce n’est que le 13 août, six jours après son arrestation, que Biram Dah Abeid a enfin été présenté à un procureur. Inculpé pour « atteinte à l’intégrité d’autrui et menace d’usage de la violence », il a été placé sous mandat de dépôt. En même temps que lui, un militant de l’IRA, Abdallahi Ould Housseine, a lui aussi été inculpé pour complicité et écroué.
source jeuneafrique.com
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