Dans un vocal qui circule depuis avant-hier (7 mars) sur les réseaux sociaux, un mauritanien répondant au nom de Cheikh El Aviya, révèle des informations qui permettent de mieux comprendre un peu les conséquences de l’insécurité qui règne le long de la frontière entre la Mauritanie et le Mali.
Dans ce vocal, largement partagé sur les plateformes, l’auteur informe l’opinion publique que dans la journée du lundi 7 mars, une patrouille de l’armée malienne accompagnée d’éléments de la sécurité russe Wagner est arrivée sur le forage de Mahmoud il’ Moulaana (il’Ataye) et avait commencé aussitôt à ligoter tous les mauritaniens présents sur le lieu, exactement comme ils l‘avaient fait le samedi 5 mars sur le site d’un autre forage situé dans la zone. Les patrouilles mixtes (Russo-malienne) avaient deux mauritaniens ligotés à l’arrière de l’un de leurs véhicules.
Heureusement, a dit le narrateur que ce jour-là (lundi), il y’avait parmi les mauritaniens qui étaient autour du forage (Rebinit Mahmoud il’Moulaana) le chérif en personne. Le chérif, très connu sous le surnom de « il’Ataye » (qui signifie le donateur) est un notable de la région très vénéré. Après avoir décliné son identité, les officiers de l’armée malienne l’ont reconnu. Le notable mauritanien est fiché chez eux comme personne religieuse et publique de référence. Aussitôt les militaires avaient présenté leurs excuses au notable et détaché les personnes qu’ils avaient ligotées. Et, même plus, sur la demande du chérif mauritanien, les forces armées maliennes avaient libérés les deux mauritaniens ligotés qui étaient à bord de l’un de leurs véhicules.
Le décorticage de l’élément sonore attribué à la voix de (Cheikh Ould Dedde Bouya) un résident connu de la zone frontalière permet de voir plus clair dans cette affaire qui défraie la chronique, de faire quelques remarques et de tirer quelques conclusions.
Les mobiles des exactions dans des zones à risques.
1/ - il est important que les mauritaniens éleveurs, commerçants, résidants ou simplement qui se déplacent dans ces « zones rouges d’insécurités », sachent que les points d’eau sont des lieux à hauts risques. Toute armée qui opère en zones de conflits, (que cette armée soit, malienne, mauritanienne, nigérienne, burkinabée ou tchadienne) dispose d’une cartographie très détaillée sur tous les points d’eau (forages, puits, nappes ou marigots) fréquentés par les populations. Ces armées sont très regardantes sur ces sites répertoriés qui servent aussi, parfois à des points de ravitaillement en eau potable pour les groupes armés considérés comme des terroristes. La surveillance aérienne, qu’elle soit par aéronefs, drones ou satellites est toujours plus focalisée sur ces zones qui sont plus strictement surveillées par des états-majors militaires des zones de conflit surtout si ces états-majors sont établis dans des zones avancées.
C’est d’ailleurs pourquoi, généralement, dès qu’il y’a plus d’un véhicule en mouvement en direction d’un point d’eau, en position de ravitaillement sur ce point d’eau, ou lorsque le mouvement des personnes autour de ce point d’eau est important, l’alerte est aussitôt donnée. Malheureusement chez nous, peut-être à cause d’un déficit prononcé de communication portant sur la sensibilisation, les mauritaniens ne savent pas que dans ces zones à haut risques le déplacement de groupes de plusieurs personnes au même moment et dans un endroit considéré zone militaire est interprété à priori par les forces de sécurité en opération comme un risque potentiel d’attaque contre leurs convois ou contre leurs bases.
2/ - L’utilisation dans des zones dites « rouges » de véhicules de type Land-Cruiser, est le plus souvent considérée par les militaires comme pouvant être la preuve matérielle d’appartenance à des personnes affiliées à des groupes armés ou à des organisations criminelles transfrontalières surtout lorsque ces véhicules sont équipés de moteurs de puissantes cylindrées ou lorsqu’ils utilisent l’essence comme combustible. Or, ces véhicules très utilitaires, sont très utilisés par les mauritaniens, notamment pour le transport des bovins, des ovins et des caprins, le principal capital économique des régions du sud-ouest de la Mauritanie.
3/- L’utilisation des appareils satellitaires Thuraya en particuliers ou des équipements de transmissions sur des véhicules civils dans certaines zones sensibles est considérée aussi comme preuve matérielle de la souscription des propriétaires des véhicules à des d’activités subversives ou criminelles.
Mali-Mauritanie pourtant un courant continu passe entre tous leurs services sécuritaires.
Pour revenir à l’analyse de l’élément sonore. L’internaute, habitant de la zone, en précisant dans son vocal que les militaires maliens avaient reconnus immédiatement le chérif mauritanien il’Ataye, cela signifie, -ce que certains ne savent peut-être pas-. Que dans le cadre de la coopération sécuritaire (que celle-ci soit administrative ou militaire), les deux pays (Mauritanie-Mali) échangent des données de bases sur la cartographie des populations riveraines de leur frontière commune. Ce qui est louable. Parce que cela prouve bien que les autorités administratives et miliaires de notre pays, (dans un souci d’assurer la sécurité des personnes et des biens) sont allées au-devant du conflit interne du Mali, pour éviter des bévues ou des incidents qui pourraient résulter de l’ignorance ethnographique des populations mauritaniennes en perpétuel déplacement des deux côtés de la frontière dans l’un ou dans l’autre des sens.
Même si, les autorités mauritaniennes du régime actuel, dont le président et le ministre de la défense sont de très fins connaisseurs de la problématique sécuritaire entre les deux pays, pour avoir été, (le premier, Chef d’Etat-major Général des Armées pendant de longues années et l’autre son adjoint), et même si ces deux personnalités publiques mauritaniennes -l’une devenue Chef de l’état et l’autre ministre de la défense-, forcent le respect et l’admiration des autorités maliennes, les riverains de la frontière du Mali doivent toujours avoir à l’esprit comme l’a dit Fatima Fall bloggeuse résidante en France et soutien inconditionnel à Ghazouani, que « le Mali un pays en conflits internes multidimensionnels est infréquentable cette période».
A ce constat, un autre élément, nouveau s’ajoute. Les FAMA (Forces Armées Maliennes) depuis quelques temps ratissent la zone en compagnie des éléments de la sécurité russe Wagner. Ce qui change complétement la donne du problème. Si, pour les soldats maliens, les mauritaniens (arabes en particuliers) sont d’honnêtes et paisibles commerçants ou éleveurs qui ne présentent aucun danger pour la sécurité du Mali, il se peut que ce ne soit pas la même compréhension pour les forces russes Wagner qui accomplissent une mission sécuritaire d’appui dans un pays qu’ils ne connaissent pas, dans un environnement très hostile et face à des ennemis qui sont blancs au nord et noirs au sud.
Depuis sa création (en 2015), la société Wagner a déployé des troupes de mercenaires pour se battre en Syrie, en Lybie, au soudan et en République Centrafricaine. C’est une société militaire russe privée qui avait à ses débuts testé ses capacités sur le théâtre du conflit au Donbass (Ukraine) avant de se fixer en Syrie où par son intervention, elle avait inversé la vapeur qui était sur le point de faire chuter Bechar Al Assad.
Les mercenaires de Wagner, œuvrent pour assurer la défense des intérêts russes à l’extérieur, même si, officiellement, cette société n’est pas liée au gouvernement. Les éléments qui composent cette force de frappe sont des « vrais tueurs en série » issus de forces spéciales dont la « politique de riposte » se limite à « neutraliser » des ennemis. « Neutraliser » est un terme militaire qui désigne l’élimination physique de personnes. Les éléments de cette armée de la légion russe de la honte sont appelés « les chiens de guerre de Moscou ». Les soldats sont payés dans une fourchette de 1800 à 2500 euros par mois.
Ces forces spéciales extrêmement « nerveuses » ne sont jamais déployées sur des terrains pour une partie de plaisir. Ce sont des hommes formés pour tuer. La gâchette facile, ils ne sont pas comme des soldats d’une armée conventionnelle soumis aux règles des droits et à l’application des textes des conventions du droit humanitaire. Leur objectif est de neutraliser l’ennemi quel qu’en soit le prix ce qui a entrainé par le passé des dérapages comme on a pu le constater en Syrie en Afghanistan et récemment en Centrafrique.
On ne connait pas l’effectif exact de cette force spéciale russe. Si en 2016, le chiffre de 1600 combattants était avancé, au plus fort de la guerre en Syrie le chiffre de 2.500 avait été atteint. Ce qui est certain, c’est que plus de dix milles hommes recrutés par ce groupe ont combattus sur plusieurs fronts entre 2014 et 2021. Les premiers vétérans de ce groupe ont démontré leurs forces en Afghanistan et en Tchétchénie.
Quand les mauritaniens s’exposent volontairement au danger eux-mêmes.
Les mauritaniens, qui jouissent d’un statut de libre circulation des personnes et des biens liant la Mauritanie au Mali, ont malheureusement beaucoup de difficultés à mesurer les conséquences que peuvent entrainer leurs mouvements à l’intérieur des terres du mali, pays qui brule maintenant et partout à cause des conséquences d’une insécurité qui s’est installée anarchiquement du nord au sud. Ce désordre et cette insécurité ont ouverts des brèches « géo-localisées » dans des zones qui flirtent avec la frontière malienne par le nombril qui rattache la wilaya du Hodh Echarghi à ce pays.
Ce qui signifie concrètement que, les riverains du Mali de cette zone militaire devenue rouge mettent à la fois les autorités sécuritaires militaires et administratives de notre pays devant de sérieuses difficultés complexes.
Le jeudi 20 janvier 2022, sept mauritaniens (maures) avaient été retrouvés égorgés et jetés dans une fausse commune sous les corps de neufs peuls du Mali. Le samedi 22, deux jours après la découverte du charnier – (qui avait mis le président Ghazouani dans une fureur sans précédent en le faisant taper du poing sur la table)-, les autorités maliennes avaient déclarées qu’elles allaient ouvrir une enquête « transparente et diligente » sur cet incident malheureux pour situer les responsabilités et punir les auteurs de cet acte barbare. Un mois et seize jours après le retour du Mali de la délégation mauritanienne qui s’était rendue sur place pour protester et pour demander aux autorités maliennes des explications sur ce qui s’était passé exactement, on n’a encore aucune réponse. Ni sur qui sont les auteurs de ces crimes, ni sur les circonstances, ni sur le pourquoi, ces mauritaniens ont été égorgés.
Des crimes à répétitions, dans un blackout total des autorités maliennes.
Le samedi 5 mars 2022, des éléments de l’armée malienne étaient arrivés sur le site d’un forage appartenant au chérif mauritanien il’Ataye. Sans aucune forme de procès, ils avaient, selon certaines informations, ligotés et amené 42 personnes qui se trouvaient sur le lieu du forage. C’est au cours de cette opération qu’un véhicule appartenant à des mauritaniens avait tenté de s’échapper. Le véhicule avait été pris pour cible par les forces armées qui l’ont neutralisé en tirant dessus faisant des blessés dont deux sont actuellement admis au centre cardiologique de Nouakchott.
Si les réseaux sociaux parlent d’un chiffre de 42 personnes qui avaient été arrêtées ce jour-là sur le site du forage, on ne déplore cependant que treize (13) mauritaniens enlevés par la patrouille malienne : (8 de la tribu des ijoumanes, 4 de la tribu des Bouri’deh, et 1 de la tribu des Wlad legu’ass. Ces chiffres fiables ont été communiqués par Mohamed Mahmoud Ould Cheyakh un habitant de la zone sur sa page Facebook et sur des plateformes des réseaux sociaux. Tous les autres, les 29 qui auraient été enlevés aussi sur le même site, (si les chiffres avancés sont exactes), ne sont pas des mauritaniens. Ce sont des Beylas, des noirs de race peuhle du Mali et donc des maliens de nationalité.
Ce qui signifie que les mauritaniens pris par l’armée malienne sur le site du forage d’ilAtaye sont au nombre de 13 seulement, un nombre qui avait été semble-il, communiqué le jour même de l’incident au préfet, ce qui signifie peut être que les autorités administratives mauritaniennes ont été alertées assez tôt pour prendre les choses en mains et à temps.
Certains internautes tout au long du week-end dernier avaient partagés largement et en boucle des images de personnes brulées vives dont certaines éventrées étaient ligotées. Ces images insoutenables ne sont pas, celles de mauritaniens. De sources sures. Toutefois jusqu’au moment où j’écris cet article, aucune information officielle sur le sort des personnes portées disparues n’a été communiquée et aucune information n’a filtré sur l’affiliation des groupes armés qui les ont enlevés, qui seraient des soldats maliens selon certaines déclarations recueillies.
Les autorités mauritaniennes par communiqué du ministre de l’intérieur avaient déclarées le week-end dernier, qu’elles prenaient en main la gestion de cette crise et qu’elles rendraient compte du sort des mauritaniens dès qu’elles seraient en possession d’informations crédibles. Mais depuis la fin de la journée d’hier (mardi) les évènements semblent se précipiter. Des éléments nouveaux sont entrés en jeu. Le gouvernement mauritanien a adressé une sévère mise en garde au gouvernement malien pour l’informer que notre pays pourrait être amené à fermer les frontières entre les deux pays au regard des graves incidents enregistrés ces derniers jours. Cette menace, constitue une expression de mécontentement des autorités mauritaniennes qui s’indignent du peu d’intérêts que les autorités maliennes accordent à donner des explications officielles sur ce qui s’était passé et des réponses à des questions qui se posent.
Il y’a moins d’un mois, les autorités militaires maliennes avaient remises à l’ambassade de Mauritanie à Bamako des mauritaniens qu’elle avait arrêtés après un accrochage avec des hommes armés. Une baisse de tension qui n’enlève rien à la détérioration de la situation sécuritaire à l’intérieur de la frontière malienne. L’enlèvement des mauritaniens par l’armée malienne sur le site du forage du Ch’rif il’Ataye, incident au cours duquel des mauritaniens ont été blessés par les tirs de l’armée malienne ou des éléments de Wagner, est le 3 ème incident grave enregistré au cours de ces deux derniers mois dont des mauritaniens ont été victimes.
C’est dire que la situation devient très préoccupante. Mais au regard du fait que tous les mauritaniens qui ont été victimes de ces incidents graves, l’ont été à l’intérieur des frontières maliennes, on peut conclure donc que malheureusement, les mauritaniens ne prennent pas conscience de la gravité de la situation qu’entraine leur présence sur le territoire malien dans des endroits à haut risque sécuritaire.
Ces mauritaniens que l’on retrouve chaque fois avec des peulhs maliens, communauté qui est dans le collimateur des forces maliennes de sécurité compliquent la tâche au ministre de l’intérieur et à celui de la défense qui sont en charge de gérer une crise extrêmement compliquée et sensible parce que simplement les événements qui se multiplient mettent à mal aussi la diplomatie et « torpillent » les accords bilatéraux de sécurités entre les deux pays.
La ligne téléphonique diplomatique entre Bamako et Nouakchott en dérangement ?
Depuis 48 heures, des mauritaniens appellent les populations riveraines de la frontière du Mali et les parents des personnes disparues à la retenue. Elles invitent tout le monde au calme mais surtout appellent en termes sécuritaire et diplomatique à la « prudence ». Mais les autorités mauritaniennes, même si elles ne le disent pas, semblent vraiment perturbées par des informations plus contradictoires et plus alarmantes les unes que les autres qui sont largement partagées sur les réseaux sociaux et les plateformes.
La menace de faire recours à la fermeture de la frontière entre les deux pays, à mon avis n’a pour réel objectif que l’exercice par la Mauritanie d’une pression dissuasive sur le Mali. Mais, la fermeture de la frontière n’est pas la bonne solution, et les autorités mauritaniennes le savent. La bonne solution serait que la Mauritanie appelle tous ses ressortissants qui se trouvent actuellement à l’intérieur du Mali dans des zones à risques sécuritaires élevés de rentrer au pays si leur présence au Mali n’est pas indispensable. C’est la seule solution pour éviter aux deux pays l’embarras de situations très compliquées et difficiles, conséquence du comportement irresponsable des mauritaniens qui n’évaluent pas les degrés élevés des risques qu’ils courent désormais au-delà de nos frontières et qui, malgré tout continuent à se balader dans une zone déclarée militaire.
Même si des informations d’internautes très alarmantes circulent beaucoup en ce moment sur les réseaux sociaux jetant l’huile sur le feu et même si, en tous cas, jusqu’à présent officiellement aucune information sur le sort des 13 mauritaniens enlevés n’a été publiée, il est important et dans l’intérêt des autorités mauritaniennes de ne pas confondre vitesse et précipitation.
Une information vocale de Mohamed Mahmoud Ould Cheyakh qui circule depuis hier sur les réseaux sociaux dément catégoriquement qu’un corps de mauritanien a été identifié dans un nouveau charnier. Même si ce charnier existe ce qui reste à prouver.
Dans les pays où ils opèrent, les éléments de Wagner recrutent souvent des mercenaires locaux d’appuis pour exécuter à leur place les sales besognes. C’était le cas en Syrie et c’est le cas en Centrafrique actuellement. Mais, même si l’armée malienne dans les faits tue des maliens, elle-même ou au moyen des bras qu’elle arme, tant que les corps des mauritaniens n’ont pas été formellement identifiés morts exécutés, il ne faut pas se fier aux « sirènes » des perturbateurs qui polluent les réseaux sociaux et qui sont, disait quelqu’un, peut être à la solde des ennemis du régime.
Le compte-rendu sur la situation intérieure du pays de laquelle Ould Merzoug rendra compte au conseil des ministres dans sa réunion de ce mercredi risque d’être long. Même très long, parce que cette réunion se tient cinq jours seulement après l’enlèvement par l’année malienne des 13 mauritaniens au forage de Mahmoud il’ Moulaana, dont on est officiellement encore jusqu’à présent sans nouvelle.
Mohamed Chighali
Dans ce vocal, largement partagé sur les plateformes, l’auteur informe l’opinion publique que dans la journée du lundi 7 mars, une patrouille de l’armée malienne accompagnée d’éléments de la sécurité russe Wagner est arrivée sur le forage de Mahmoud il’ Moulaana (il’Ataye) et avait commencé aussitôt à ligoter tous les mauritaniens présents sur le lieu, exactement comme ils l‘avaient fait le samedi 5 mars sur le site d’un autre forage situé dans la zone. Les patrouilles mixtes (Russo-malienne) avaient deux mauritaniens ligotés à l’arrière de l’un de leurs véhicules.
Heureusement, a dit le narrateur que ce jour-là (lundi), il y’avait parmi les mauritaniens qui étaient autour du forage (Rebinit Mahmoud il’Moulaana) le chérif en personne. Le chérif, très connu sous le surnom de « il’Ataye » (qui signifie le donateur) est un notable de la région très vénéré. Après avoir décliné son identité, les officiers de l’armée malienne l’ont reconnu. Le notable mauritanien est fiché chez eux comme personne religieuse et publique de référence. Aussitôt les militaires avaient présenté leurs excuses au notable et détaché les personnes qu’ils avaient ligotées. Et, même plus, sur la demande du chérif mauritanien, les forces armées maliennes avaient libérés les deux mauritaniens ligotés qui étaient à bord de l’un de leurs véhicules.
Le décorticage de l’élément sonore attribué à la voix de (Cheikh Ould Dedde Bouya) un résident connu de la zone frontalière permet de voir plus clair dans cette affaire qui défraie la chronique, de faire quelques remarques et de tirer quelques conclusions.
Les mobiles des exactions dans des zones à risques.
1/ - il est important que les mauritaniens éleveurs, commerçants, résidants ou simplement qui se déplacent dans ces « zones rouges d’insécurités », sachent que les points d’eau sont des lieux à hauts risques. Toute armée qui opère en zones de conflits, (que cette armée soit, malienne, mauritanienne, nigérienne, burkinabée ou tchadienne) dispose d’une cartographie très détaillée sur tous les points d’eau (forages, puits, nappes ou marigots) fréquentés par les populations. Ces armées sont très regardantes sur ces sites répertoriés qui servent aussi, parfois à des points de ravitaillement en eau potable pour les groupes armés considérés comme des terroristes. La surveillance aérienne, qu’elle soit par aéronefs, drones ou satellites est toujours plus focalisée sur ces zones qui sont plus strictement surveillées par des états-majors militaires des zones de conflit surtout si ces états-majors sont établis dans des zones avancées.
C’est d’ailleurs pourquoi, généralement, dès qu’il y’a plus d’un véhicule en mouvement en direction d’un point d’eau, en position de ravitaillement sur ce point d’eau, ou lorsque le mouvement des personnes autour de ce point d’eau est important, l’alerte est aussitôt donnée. Malheureusement chez nous, peut-être à cause d’un déficit prononcé de communication portant sur la sensibilisation, les mauritaniens ne savent pas que dans ces zones à haut risques le déplacement de groupes de plusieurs personnes au même moment et dans un endroit considéré zone militaire est interprété à priori par les forces de sécurité en opération comme un risque potentiel d’attaque contre leurs convois ou contre leurs bases.
2/ - L’utilisation dans des zones dites « rouges » de véhicules de type Land-Cruiser, est le plus souvent considérée par les militaires comme pouvant être la preuve matérielle d’appartenance à des personnes affiliées à des groupes armés ou à des organisations criminelles transfrontalières surtout lorsque ces véhicules sont équipés de moteurs de puissantes cylindrées ou lorsqu’ils utilisent l’essence comme combustible. Or, ces véhicules très utilitaires, sont très utilisés par les mauritaniens, notamment pour le transport des bovins, des ovins et des caprins, le principal capital économique des régions du sud-ouest de la Mauritanie.
3/- L’utilisation des appareils satellitaires Thuraya en particuliers ou des équipements de transmissions sur des véhicules civils dans certaines zones sensibles est considérée aussi comme preuve matérielle de la souscription des propriétaires des véhicules à des d’activités subversives ou criminelles.
Mali-Mauritanie pourtant un courant continu passe entre tous leurs services sécuritaires.
Pour revenir à l’analyse de l’élément sonore. L’internaute, habitant de la zone, en précisant dans son vocal que les militaires maliens avaient reconnus immédiatement le chérif mauritanien il’Ataye, cela signifie, -ce que certains ne savent peut-être pas-. Que dans le cadre de la coopération sécuritaire (que celle-ci soit administrative ou militaire), les deux pays (Mauritanie-Mali) échangent des données de bases sur la cartographie des populations riveraines de leur frontière commune. Ce qui est louable. Parce que cela prouve bien que les autorités administratives et miliaires de notre pays, (dans un souci d’assurer la sécurité des personnes et des biens) sont allées au-devant du conflit interne du Mali, pour éviter des bévues ou des incidents qui pourraient résulter de l’ignorance ethnographique des populations mauritaniennes en perpétuel déplacement des deux côtés de la frontière dans l’un ou dans l’autre des sens.
Même si, les autorités mauritaniennes du régime actuel, dont le président et le ministre de la défense sont de très fins connaisseurs de la problématique sécuritaire entre les deux pays, pour avoir été, (le premier, Chef d’Etat-major Général des Armées pendant de longues années et l’autre son adjoint), et même si ces deux personnalités publiques mauritaniennes -l’une devenue Chef de l’état et l’autre ministre de la défense-, forcent le respect et l’admiration des autorités maliennes, les riverains de la frontière du Mali doivent toujours avoir à l’esprit comme l’a dit Fatima Fall bloggeuse résidante en France et soutien inconditionnel à Ghazouani, que « le Mali un pays en conflits internes multidimensionnels est infréquentable cette période».
A ce constat, un autre élément, nouveau s’ajoute. Les FAMA (Forces Armées Maliennes) depuis quelques temps ratissent la zone en compagnie des éléments de la sécurité russe Wagner. Ce qui change complétement la donne du problème. Si, pour les soldats maliens, les mauritaniens (arabes en particuliers) sont d’honnêtes et paisibles commerçants ou éleveurs qui ne présentent aucun danger pour la sécurité du Mali, il se peut que ce ne soit pas la même compréhension pour les forces russes Wagner qui accomplissent une mission sécuritaire d’appui dans un pays qu’ils ne connaissent pas, dans un environnement très hostile et face à des ennemis qui sont blancs au nord et noirs au sud.
Depuis sa création (en 2015), la société Wagner a déployé des troupes de mercenaires pour se battre en Syrie, en Lybie, au soudan et en République Centrafricaine. C’est une société militaire russe privée qui avait à ses débuts testé ses capacités sur le théâtre du conflit au Donbass (Ukraine) avant de se fixer en Syrie où par son intervention, elle avait inversé la vapeur qui était sur le point de faire chuter Bechar Al Assad.
Les mercenaires de Wagner, œuvrent pour assurer la défense des intérêts russes à l’extérieur, même si, officiellement, cette société n’est pas liée au gouvernement. Les éléments qui composent cette force de frappe sont des « vrais tueurs en série » issus de forces spéciales dont la « politique de riposte » se limite à « neutraliser » des ennemis. « Neutraliser » est un terme militaire qui désigne l’élimination physique de personnes. Les éléments de cette armée de la légion russe de la honte sont appelés « les chiens de guerre de Moscou ». Les soldats sont payés dans une fourchette de 1800 à 2500 euros par mois.
Ces forces spéciales extrêmement « nerveuses » ne sont jamais déployées sur des terrains pour une partie de plaisir. Ce sont des hommes formés pour tuer. La gâchette facile, ils ne sont pas comme des soldats d’une armée conventionnelle soumis aux règles des droits et à l’application des textes des conventions du droit humanitaire. Leur objectif est de neutraliser l’ennemi quel qu’en soit le prix ce qui a entrainé par le passé des dérapages comme on a pu le constater en Syrie en Afghanistan et récemment en Centrafrique.
On ne connait pas l’effectif exact de cette force spéciale russe. Si en 2016, le chiffre de 1600 combattants était avancé, au plus fort de la guerre en Syrie le chiffre de 2.500 avait été atteint. Ce qui est certain, c’est que plus de dix milles hommes recrutés par ce groupe ont combattus sur plusieurs fronts entre 2014 et 2021. Les premiers vétérans de ce groupe ont démontré leurs forces en Afghanistan et en Tchétchénie.
Quand les mauritaniens s’exposent volontairement au danger eux-mêmes.
Les mauritaniens, qui jouissent d’un statut de libre circulation des personnes et des biens liant la Mauritanie au Mali, ont malheureusement beaucoup de difficultés à mesurer les conséquences que peuvent entrainer leurs mouvements à l’intérieur des terres du mali, pays qui brule maintenant et partout à cause des conséquences d’une insécurité qui s’est installée anarchiquement du nord au sud. Ce désordre et cette insécurité ont ouverts des brèches « géo-localisées » dans des zones qui flirtent avec la frontière malienne par le nombril qui rattache la wilaya du Hodh Echarghi à ce pays.
Ce qui signifie concrètement que, les riverains du Mali de cette zone militaire devenue rouge mettent à la fois les autorités sécuritaires militaires et administratives de notre pays devant de sérieuses difficultés complexes.
Le jeudi 20 janvier 2022, sept mauritaniens (maures) avaient été retrouvés égorgés et jetés dans une fausse commune sous les corps de neufs peuls du Mali. Le samedi 22, deux jours après la découverte du charnier – (qui avait mis le président Ghazouani dans une fureur sans précédent en le faisant taper du poing sur la table)-, les autorités maliennes avaient déclarées qu’elles allaient ouvrir une enquête « transparente et diligente » sur cet incident malheureux pour situer les responsabilités et punir les auteurs de cet acte barbare. Un mois et seize jours après le retour du Mali de la délégation mauritanienne qui s’était rendue sur place pour protester et pour demander aux autorités maliennes des explications sur ce qui s’était passé exactement, on n’a encore aucune réponse. Ni sur qui sont les auteurs de ces crimes, ni sur les circonstances, ni sur le pourquoi, ces mauritaniens ont été égorgés.
Des crimes à répétitions, dans un blackout total des autorités maliennes.
Le samedi 5 mars 2022, des éléments de l’armée malienne étaient arrivés sur le site d’un forage appartenant au chérif mauritanien il’Ataye. Sans aucune forme de procès, ils avaient, selon certaines informations, ligotés et amené 42 personnes qui se trouvaient sur le lieu du forage. C’est au cours de cette opération qu’un véhicule appartenant à des mauritaniens avait tenté de s’échapper. Le véhicule avait été pris pour cible par les forces armées qui l’ont neutralisé en tirant dessus faisant des blessés dont deux sont actuellement admis au centre cardiologique de Nouakchott.
Si les réseaux sociaux parlent d’un chiffre de 42 personnes qui avaient été arrêtées ce jour-là sur le site du forage, on ne déplore cependant que treize (13) mauritaniens enlevés par la patrouille malienne : (8 de la tribu des ijoumanes, 4 de la tribu des Bouri’deh, et 1 de la tribu des Wlad legu’ass. Ces chiffres fiables ont été communiqués par Mohamed Mahmoud Ould Cheyakh un habitant de la zone sur sa page Facebook et sur des plateformes des réseaux sociaux. Tous les autres, les 29 qui auraient été enlevés aussi sur le même site, (si les chiffres avancés sont exactes), ne sont pas des mauritaniens. Ce sont des Beylas, des noirs de race peuhle du Mali et donc des maliens de nationalité.
Ce qui signifie que les mauritaniens pris par l’armée malienne sur le site du forage d’ilAtaye sont au nombre de 13 seulement, un nombre qui avait été semble-il, communiqué le jour même de l’incident au préfet, ce qui signifie peut être que les autorités administratives mauritaniennes ont été alertées assez tôt pour prendre les choses en mains et à temps.
Certains internautes tout au long du week-end dernier avaient partagés largement et en boucle des images de personnes brulées vives dont certaines éventrées étaient ligotées. Ces images insoutenables ne sont pas, celles de mauritaniens. De sources sures. Toutefois jusqu’au moment où j’écris cet article, aucune information officielle sur le sort des personnes portées disparues n’a été communiquée et aucune information n’a filtré sur l’affiliation des groupes armés qui les ont enlevés, qui seraient des soldats maliens selon certaines déclarations recueillies.
Les autorités mauritaniennes par communiqué du ministre de l’intérieur avaient déclarées le week-end dernier, qu’elles prenaient en main la gestion de cette crise et qu’elles rendraient compte du sort des mauritaniens dès qu’elles seraient en possession d’informations crédibles. Mais depuis la fin de la journée d’hier (mardi) les évènements semblent se précipiter. Des éléments nouveaux sont entrés en jeu. Le gouvernement mauritanien a adressé une sévère mise en garde au gouvernement malien pour l’informer que notre pays pourrait être amené à fermer les frontières entre les deux pays au regard des graves incidents enregistrés ces derniers jours. Cette menace, constitue une expression de mécontentement des autorités mauritaniennes qui s’indignent du peu d’intérêts que les autorités maliennes accordent à donner des explications officielles sur ce qui s’était passé et des réponses à des questions qui se posent.
Il y’a moins d’un mois, les autorités militaires maliennes avaient remises à l’ambassade de Mauritanie à Bamako des mauritaniens qu’elle avait arrêtés après un accrochage avec des hommes armés. Une baisse de tension qui n’enlève rien à la détérioration de la situation sécuritaire à l’intérieur de la frontière malienne. L’enlèvement des mauritaniens par l’armée malienne sur le site du forage du Ch’rif il’Ataye, incident au cours duquel des mauritaniens ont été blessés par les tirs de l’armée malienne ou des éléments de Wagner, est le 3 ème incident grave enregistré au cours de ces deux derniers mois dont des mauritaniens ont été victimes.
C’est dire que la situation devient très préoccupante. Mais au regard du fait que tous les mauritaniens qui ont été victimes de ces incidents graves, l’ont été à l’intérieur des frontières maliennes, on peut conclure donc que malheureusement, les mauritaniens ne prennent pas conscience de la gravité de la situation qu’entraine leur présence sur le territoire malien dans des endroits à haut risque sécuritaire.
Ces mauritaniens que l’on retrouve chaque fois avec des peulhs maliens, communauté qui est dans le collimateur des forces maliennes de sécurité compliquent la tâche au ministre de l’intérieur et à celui de la défense qui sont en charge de gérer une crise extrêmement compliquée et sensible parce que simplement les événements qui se multiplient mettent à mal aussi la diplomatie et « torpillent » les accords bilatéraux de sécurités entre les deux pays.
La ligne téléphonique diplomatique entre Bamako et Nouakchott en dérangement ?
Depuis 48 heures, des mauritaniens appellent les populations riveraines de la frontière du Mali et les parents des personnes disparues à la retenue. Elles invitent tout le monde au calme mais surtout appellent en termes sécuritaire et diplomatique à la « prudence ». Mais les autorités mauritaniennes, même si elles ne le disent pas, semblent vraiment perturbées par des informations plus contradictoires et plus alarmantes les unes que les autres qui sont largement partagées sur les réseaux sociaux et les plateformes.
La menace de faire recours à la fermeture de la frontière entre les deux pays, à mon avis n’a pour réel objectif que l’exercice par la Mauritanie d’une pression dissuasive sur le Mali. Mais, la fermeture de la frontière n’est pas la bonne solution, et les autorités mauritaniennes le savent. La bonne solution serait que la Mauritanie appelle tous ses ressortissants qui se trouvent actuellement à l’intérieur du Mali dans des zones à risques sécuritaires élevés de rentrer au pays si leur présence au Mali n’est pas indispensable. C’est la seule solution pour éviter aux deux pays l’embarras de situations très compliquées et difficiles, conséquence du comportement irresponsable des mauritaniens qui n’évaluent pas les degrés élevés des risques qu’ils courent désormais au-delà de nos frontières et qui, malgré tout continuent à se balader dans une zone déclarée militaire.
Même si des informations d’internautes très alarmantes circulent beaucoup en ce moment sur les réseaux sociaux jetant l’huile sur le feu et même si, en tous cas, jusqu’à présent officiellement aucune information sur le sort des 13 mauritaniens enlevés n’a été publiée, il est important et dans l’intérêt des autorités mauritaniennes de ne pas confondre vitesse et précipitation.
Une information vocale de Mohamed Mahmoud Ould Cheyakh qui circule depuis hier sur les réseaux sociaux dément catégoriquement qu’un corps de mauritanien a été identifié dans un nouveau charnier. Même si ce charnier existe ce qui reste à prouver.
Dans les pays où ils opèrent, les éléments de Wagner recrutent souvent des mercenaires locaux d’appuis pour exécuter à leur place les sales besognes. C’était le cas en Syrie et c’est le cas en Centrafrique actuellement. Mais, même si l’armée malienne dans les faits tue des maliens, elle-même ou au moyen des bras qu’elle arme, tant que les corps des mauritaniens n’ont pas été formellement identifiés morts exécutés, il ne faut pas se fier aux « sirènes » des perturbateurs qui polluent les réseaux sociaux et qui sont, disait quelqu’un, peut être à la solde des ennemis du régime.
Le compte-rendu sur la situation intérieure du pays de laquelle Ould Merzoug rendra compte au conseil des ministres dans sa réunion de ce mercredi risque d’être long. Même très long, parce que cette réunion se tient cinq jours seulement après l’enlèvement par l’année malienne des 13 mauritaniens au forage de Mahmoud il’ Moulaana, dont on est officiellement encore jusqu’à présent sans nouvelle.
Mohamed Chighali