Passera-t-il aux aveux ? Le pouvoir turc sera-t-il éclaboussé ? L'imminent procès aux Etats-Unis d'un homme d'affaires turco-iranien pour violation de l'embargo américain sur l'Iran laisse Ankara, et l'économie turque, sur le qui-vive.
L'homme d'affaires en question, Reza Zarrab, 34 ans, avait été arrêté en 2016 au cours d'une visite aux Etats-Unis. En mars dernier, un banquier turc, Mehmet Hakan Atilla, a été lui aussi arrêté sur le sol américain dans le cadre de la même affaire.
Leur procès devait commencer à New York le 27 novembre mais a été reporté, sans explication, au 4 décembre.
A l'approche de l'audience et après la parution dans la presse américaine d'informations affirmant que M. Zarrab avait accepté de coopérer avec la justice dans le cadre d'une négociation de peine, Ankara a haussé le ton, au risque d’exacerber les tensions déjà vives avec Washington.
Car Reza Zarrab n'est pas n'importe quel homme d'affaires et les révélations que ce magnat de l'or pourrait faire risquent d'être préjudiciables aux dirigeants turcs et en premier lieu au président Recep Tayyip Erdogan.
- Trafic d'or -
M. Zarrab avait en effet été arrêté et détenu pendant plus de deux mois en Turquie en 2013 avec des dizaines d'autres proches du pouvoir dans une retentissante affaire de corruption et de trafic illicite d'or avec l'Iran, impliquant des ministres du gouvernement islamo-conservateur d'Ankara. Quatre d'entre eux avaient alors démissionné ou été remerciés.
M. Erdogan, à l'époque Premier ministre, avait crié au "complot" et accusé le prédicateur Fethullah Gülen, son ex-allié alors très influent dans la police et la justice, d'avoir monté l'affaire de toutes pièces pour causer sa perte.
Signe de leur nervosité, les dirigeants turcs répètent depuis quelques jours que l'affaire Zarrab-Atilla est pilotée par le réseau de M. Gülen, exilé aux Etats-Unis et désigné par Ankara comme le cerveau du putsch manqué du 15 juillet 2016.
Le procès fait craindre aussi d'éventuelles sanctions américaines contre le secteur bancaire turc, notamment sur la banque publique Halkbank où M. Atilla occupait les fonctions de directeur général adjoint.
Dans ce contexte, la livre turque a atteint mardi un plus bas historique face au dollar.
"Bien qu'il (Erdogan) ne soit pas accusé dans cette affaire, des révélations de corruption seraient embarrassantes pour lui, sa famille et son proche entourage", estime Amanda Sloat, analyste à la Brookings Institution aux Etats-Unis.
- Accusations 'ridicules' -
Le porte-parole du gouvernement turc, Bekir Bozdag, a qualifié le procès Zarrab-Atilla de "complot" contre la Turquie alors que le chef de la diplomatie, Mevlüt Cavusoglu, est allé jusqu'à affirmer que la justice américaine était "infiltrée" par les réseaux gulénistes.
Le département d'Etat américain a rejeté ces accusations, les qualifiant de "ridicules".
Le parquet d'Istanbul a même annoncé samedi l'ouverture d'une enquête inédite contre deux procureurs américains à l'origine des poursuites, Preet Bharara -- débarqué par le président Donald Trump en mars -- et son successeur Joon Kim.
"Les réactions turques au procès, notamment les propos sur un complot américain pour renverser le gouvernement, peuvent être toxiques pour l'image d'Ankara à Washington", estime Mme Sloat.
Sur le front économique, William Jackson, spécialiste des marchés émergents à Capital Economics à Londres, estime que d'éventuelles amendes américaines contre Halkbank auraient un impact sur les crédits, et plus généralement sur le taux de croissance turc.
"Le montant de l'amende dont pourrait écoper Halkbank serait très élevé d'après les médias et cela pourrait se traduire par un renforcement des conditions d'octroi de crédits", affirme-t-il.
"De plus, si une banque est mise à l'amende, d'autres banques pourraient durcir les conditions de crédit de crainte d'être sanctionnées à leur tour. Cela pourrait se traduire par un ralentissement de la croissance", ajoute-t-il.
Dans l'attente du procès, les médias turcs se répandent en conjectures sur les dessous d'une affaire entourée de mystère et sur les raisons pour lesquelles l’homme d'affaires avait choisi de passer des vacances avec sa famille aux Etats-Unis, seulement pour se faire arrêter peu après son arrivée, alors qu'il se savait au coeur de soupçons de trafic d'or avec l'Iran en violation de l'embargo américain.
"Le cas Zarrab peut potentiellement provoquer une crise sévère entre Ankara et Washington et accélérer l'érosion de leur relation bilatérale", estime Anthony Skinner, consultant à Verisk Maplecroft.
(©AFP / 24 novembre 2017 11h24)
L'homme d'affaires en question, Reza Zarrab, 34 ans, avait été arrêté en 2016 au cours d'une visite aux Etats-Unis. En mars dernier, un banquier turc, Mehmet Hakan Atilla, a été lui aussi arrêté sur le sol américain dans le cadre de la même affaire.
Leur procès devait commencer à New York le 27 novembre mais a été reporté, sans explication, au 4 décembre.
A l'approche de l'audience et après la parution dans la presse américaine d'informations affirmant que M. Zarrab avait accepté de coopérer avec la justice dans le cadre d'une négociation de peine, Ankara a haussé le ton, au risque d’exacerber les tensions déjà vives avec Washington.
Car Reza Zarrab n'est pas n'importe quel homme d'affaires et les révélations que ce magnat de l'or pourrait faire risquent d'être préjudiciables aux dirigeants turcs et en premier lieu au président Recep Tayyip Erdogan.
- Trafic d'or -
M. Zarrab avait en effet été arrêté et détenu pendant plus de deux mois en Turquie en 2013 avec des dizaines d'autres proches du pouvoir dans une retentissante affaire de corruption et de trafic illicite d'or avec l'Iran, impliquant des ministres du gouvernement islamo-conservateur d'Ankara. Quatre d'entre eux avaient alors démissionné ou été remerciés.
M. Erdogan, à l'époque Premier ministre, avait crié au "complot" et accusé le prédicateur Fethullah Gülen, son ex-allié alors très influent dans la police et la justice, d'avoir monté l'affaire de toutes pièces pour causer sa perte.
Signe de leur nervosité, les dirigeants turcs répètent depuis quelques jours que l'affaire Zarrab-Atilla est pilotée par le réseau de M. Gülen, exilé aux Etats-Unis et désigné par Ankara comme le cerveau du putsch manqué du 15 juillet 2016.
Le procès fait craindre aussi d'éventuelles sanctions américaines contre le secteur bancaire turc, notamment sur la banque publique Halkbank où M. Atilla occupait les fonctions de directeur général adjoint.
Dans ce contexte, la livre turque a atteint mardi un plus bas historique face au dollar.
"Bien qu'il (Erdogan) ne soit pas accusé dans cette affaire, des révélations de corruption seraient embarrassantes pour lui, sa famille et son proche entourage", estime Amanda Sloat, analyste à la Brookings Institution aux Etats-Unis.
- Accusations 'ridicules' -
Le porte-parole du gouvernement turc, Bekir Bozdag, a qualifié le procès Zarrab-Atilla de "complot" contre la Turquie alors que le chef de la diplomatie, Mevlüt Cavusoglu, est allé jusqu'à affirmer que la justice américaine était "infiltrée" par les réseaux gulénistes.
Le département d'Etat américain a rejeté ces accusations, les qualifiant de "ridicules".
Le parquet d'Istanbul a même annoncé samedi l'ouverture d'une enquête inédite contre deux procureurs américains à l'origine des poursuites, Preet Bharara -- débarqué par le président Donald Trump en mars -- et son successeur Joon Kim.
"Les réactions turques au procès, notamment les propos sur un complot américain pour renverser le gouvernement, peuvent être toxiques pour l'image d'Ankara à Washington", estime Mme Sloat.
Sur le front économique, William Jackson, spécialiste des marchés émergents à Capital Economics à Londres, estime que d'éventuelles amendes américaines contre Halkbank auraient un impact sur les crédits, et plus généralement sur le taux de croissance turc.
"Le montant de l'amende dont pourrait écoper Halkbank serait très élevé d'après les médias et cela pourrait se traduire par un renforcement des conditions d'octroi de crédits", affirme-t-il.
"De plus, si une banque est mise à l'amende, d'autres banques pourraient durcir les conditions de crédit de crainte d'être sanctionnées à leur tour. Cela pourrait se traduire par un ralentissement de la croissance", ajoute-t-il.
Dans l'attente du procès, les médias turcs se répandent en conjectures sur les dessous d'une affaire entourée de mystère et sur les raisons pour lesquelles l’homme d'affaires avait choisi de passer des vacances avec sa famille aux Etats-Unis, seulement pour se faire arrêter peu après son arrivée, alors qu'il se savait au coeur de soupçons de trafic d'or avec l'Iran en violation de l'embargo américain.
"Le cas Zarrab peut potentiellement provoquer une crise sévère entre Ankara et Washington et accélérer l'érosion de leur relation bilatérale", estime Anthony Skinner, consultant à Verisk Maplecroft.
(©AFP / 24 novembre 2017 11h24)