Le puzzle des prochaines élections locales se met petit à petit en place. Quelques semaines après son installation, la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) s’apprête à lancer le Recensement À Vocation ÉLectorale (RAVEL) dont l’objectif est d’établir une nouvelle liste électorale avec deux opérations majeures : dépoussiérer l’ancienne (2013), en la purgeant des morts, et y ajoutant ceux qui ont atteint l’âge de voter, depuis les dernières élections locales et présidentielle ; fonder de nouveaux bureaux. La CENI vient de signer, en ces objectifs, un protocole avec l’Officie Nationale des Statistiques (ONS) qui piloterait l’opération. Pendant ce temps, elle doit parachever de recruter son personnel.
Cette phase est d’une importance capitale, pour tout scrutin qui se veut transparent. Après la collecte des données par l’ONS, on procédera à la publication de la liste officielle, dit« fichier électoral ». L’opposition, qui ne cesse de réclamer l’audit de celui-ci, ne ratera certainement pas l’occasion de trouver à redire. Ne disposant pas de membre dans la structure de contrôle des opérations électorales, l’opposition dite radicale (FNDU et le RFD) y entamera probablement sa contestation des élections.
Le gouvernement mauritanien a annoncé la couleur, en faisant savoir, à l’opposition, que des observateurs étrangers ne seraient pas invités à surveiller nos élections. Suspecté de vouloir orchestrer une énième fraude, il sera d’autant plus observé à la loupe. Et si tant est qu’il tienne à des élections crédibles, le gouvernement doit veiller à la production d’un fichier électoral transparent qui verra l’opposition, mise à l’école de la gestion du processus et qui conteste même la légalité de l’instance d’organisation et de contrôle, sur le qui-vive, à l’affût de toute occasion d’en épingler les failles et de dénoncer sa « partialité ». Lors des dernières élections, l’Agence Nationale du Recensement de la Population et des Titres Sécurisés (ANRPTS) avait été suspectée de « collusion » avec la CENI, dans la « manipulation » du fichier électoral, en faveur du parti au pouvoir.
Transformer l’essai
Sur le terrain, l’enjeu sera, pour les acteurs politiques, de convaincre les Mauritaniens à s’inscrire sur les listes électorales. L’UPR qui a enrôlé plus d’un million d’adhérents aura un gros challenge à relever : celui de transformer l’essai en victoire. Ceux qui ont mobilisé et transporté les citoyens, lors des opérations d’adhésion, doivent s’assurer que ces potentiels électeurs se sont inscrits dans leur bureau de vote. Ils doivent ensuite mettre en place, le moment venu, d’onéreux plans de transports. Ceux qui n’ont pas fini de cicatriser les saignées de la réimplantation connaîtront une année plus que difficile et coûteuse. Un haut cadre du parti-État s’est plaint de la manière dont la campagne de réimplantation a été organisée. « Pour soulager les acteurs », estime-t-il,« il fallait organiser toutes les opérations en un seul coup : sensibilisation, adhésions, mise en place des structures et élections des instances supérieures. Beaucoup ont laissé des plumes, au cours de cette implantation et ça n’est pas prêt de s’arrêter ».
On se rappelle que le nombre d’inscrits, lors des élections municipales et législatives 2013, s’élevait à 1.189.105, sur une population estimée à 3.359.185 habitants, mais seules 878.693 personnes avaient voté. Avec la décision du FNDU de participer aux élections 2018 mais, aussi, des petits partis proches du pouvoir qui craignent de ne pas bénéficier des subventions de l’Etat et de disparaître, en conséquence, de la scène politique, pour non-participation à deux élections successives, on peut s’attendre, cette fois, à cohue. C’est dire que la CENI aura un autre défi, celui de la confection des bulletins, vu le nombre de partis politiques qui devraient part aux prochaines élections.