La Chine a promis mercredi que les Etats-Unis devraient "payer le prix" de l'adoption par la Chambre des représentants d'un projet de loi appelant à des sanctions contre Pékin en réponse à l'internement de musulmans ouïghours.
L'initiative des députés américains jette de l'huile sur le feu entre les deux superpuissances, engagées dans d'âpres discussions pour arriver à un "accord préliminaire" pour mettre fin à leur guerre commerciale.
Les relations s'étaient déjà envenimées la semaine dernière après la promulgation par le président américain Donald Trump d'une loi soutenant les manifestations pro-démocratie qui secouent Hong Kong depuis juin.
Pékin a répliqué lundi en imposant des sanctions contre des ONG basées aux Etats-Unis et en décrétant la suspension des escales de navires de guerre américains dans le territoire autonome chinois.
La Chambre des représentants a approuvé mardi à une écrasante majorité le projet de loi sur les Ouïghours. Le texte doit encore être validé par le Sénat, où il devrait rencontrer un grand soutien, avant d'être envoyé à Donald Trump.
"Aujourd'hui, la dignité et les droits de l'homme des Ouïghours sont menacés par les actes barbares de Pékin, qui sont une insulte à la conscience collective mondiale", a déclaré dans l'hémicycle la présidente démocrate de la Chambre, Nancy Pelosi.
"Nous envoyons un message à Pékin: l'Amérique observe et ne restera pas silencieuse", a-t-elle ajouté.
- 'Vive indignation' -
Des organisations de défense des droits de l'homme, des experts et Washington accusent Pékin d'avoir interné dans cette région jusqu'à un million de musulmans, principalement ouïghours, dans des camps de rééducation politique.
Pékin dément ce chiffre et parle de "centres de formation professionnelle", destinés à aider la population à trouver un emploi et à l'éloigner de la tentation de l'islamisme et du terrorisme.
Le texte appelle Donald Trump à imposer des sanctions à de hauts responsables du Xinjiang, région du nord-ouest de la Chine placée sous haute sécurité après avoir été frappée par des attentats.
Le gouvernement, qui accuse des séparatistes et des jihadistes ouïghours d'actes de terrorisme, a imposé une sécurité draconienne au Xinjiang -- grand comme trois fois la France et frontalier notamment du Pakistan et de l'Afghanistan.
Le vote des représentants américains s'est attiré une réponse furieuse de Pékin.
"J'estime que pour toute faute en parole ou en action, un prix doit être payé. (Leurs auteurs) devront en payer le prix", a averti Hua Chunying, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, exprimant sa "vive indignation".
Interrogée sur le fait de savoir si l'initiative aurait des conséquences sur les négociations commerciales, Mme Hua n'a pas répondu directement, se bornant à indiquer qu'il était "impossible qu'il n'y ait pas d'impact sur les relations" bilatérales.
- Arme blanche -
Les Ouïghours constituent l'une des 56 ethnies recensées en Chine. Principalement musulmans, parlant pour la plupart une langue turcique, ils constituent un peu moins de la moitié des 25 millions de personnes vivant au Xinjiang.
Des attentats commis par des militants ouïghours ont choqué les Chinois, notamment en 2014, lors d'attaques à l'arme blanche en gare de Kunming dans le sud-ouest du pays (31 morts) et à l'explosif contre un marché d'Urumqi (39 morts), la capitale du Xinjiang.
La proposition de loi américaine exhorte le département d'Etat à établir un rapport sur la situation dans la région, et le ministère du Commerce à interdire certaines exportations, notamment de matériels pouvant aider aux systèmes de reconnaissance faciale.
Le Sénat, à majorité républicaine, avait adopté à l'unanimité en septembre une version différente de cette proposition de loi, présentée par le républicain Marco Rubio.
Mardi soir, il a salué le vote de la Chambre et déclaré avoir "hâte" de travailler avec les sénateurs pour que cette proposition "soit adoptée et envoyée au président".
Les Etats-Unis avaient déjà placé en octobre 28 organisations gouvernementales et commerciales chinoises sur liste noire, leur reprochant d'être impliquées dans la campagne de répression policière dans la région.
AFP