‘’Le fondement de la coalition "vivre ensemble" n'est pas fonction de la couleur de peau de ses dirigeants encore moins de leur appartenance ethniciste mais plutôt de la teneur de cette plateforme qui les unit’’
Le Calame : Entamée le 7 juin, la campagne électorale entre dans sa dernière semaine. Quelle évaluation la CVE fait-elle de cette première semaine?
Amadou Tidiane Diop : Merci de m'offrir cette opportunité pour m'exprimer une fois encore à travers votre journal. Le bilan qu'on tire de cette première semaine de campagne est positif. Puisque tout se passe comme prévu, hormis quelques manquements ou insuffisances constatés ici et là, et cela aussi demeure un phénomène propre à l'accomplissement de tout projet, de surcroit complexe, comme celui d'une campagne présidentielle. Toutes les équipes de notre directoire de campagne sont à pied d'œuvre et travaillent d'arrache-pied en vue d'être dans les délais requis pour les préparatifs du jour J c'est à dire le 22 juin. Bref; responsables de la coalition "vivre ensemble" que nous sommes; disons qu’on a une bonne impression si l'on devrait évaluer le début de notre campagne.
A l’instar des autres prétendants, votre candidat a effectué des tournées à l’intérieur du pays. Comment les citoyens ont-ils accueilli son discours?
A l'issue de notre tournée à l'intérieur du pays, il faut dire qu'il n'y a pas eu de surprise; le candidat Dr Kane Hamidou Baba et sa délégation ont été triomphalement accueillis par les populations du Nord au Sud, d'Est en Ouest, l'engouement fut sans équivoque.
Dans certains endroits, nos meetings se sont prolongés jusqu'à 5h du matin et dans d'autres, les populations sont armées de leur patience jusqu'à 4h du matin puisque le cortège du président devait s'ébranler devant leurs villages. Les images passées sur les réseaux sociaux illustrent parfaitement cette réalité quant à la réussite de notre tournée.
Nous estimons aujourd'hui que la CVE a soulevé une immense espérance dans son projet de refondation puis de reconstruction de la Mauritanie, une attente majeure de son peuple longtemps dispersé.
Que répondez-vous à ceux qui vous accusent de « communautariste »?
J'aimerai d'abord savoir quels arguments mettent-ils en avant pour justifier une telle vision! Cet avis est dépourvu de tous sens. Le fondement de la coalition "vivre ensemble" n'est pas fonction de la couleur de peau de ses dirigeants encore moins de leur appartenance ethniciste mais plutôt de la teneur de cette plateforme qui les unit. Il s'agit donc de convergence idéologique et politique plus que tout autre chose.....voilà en un mot qui est à la base de notre rassemblement et son cadre.
Dois-je aussi préciser que les portes de la CVE restent et resteront ouvertes et nous tendons la main à toute personne ou organisation mue par l'esprit de reconstruire la Mauritanie sur de nouvelles bases pourvu qu'elle accepte d'intégrer notre plateforme et son programme.
Encore que notre coalition, qui demeure toujours dans sa phase embryonnaire, a déjà accueilli le Front Populaire de Chbih Cheikh Melainine et ses camarades dont nous saluons au passage le courage et la conviction intransigeante pour bâtir une Mauritanie unie.
Rappelons que la CVE est née le 6 Avril 2019 soit juste deux mois avant l'ouverture de campagne à l'élection présidentielle, qui dois-je le rappeler, n'est qu'une brèche par rapport à nos objectifs qui dépassent en toute évidence le cadre électoral. Puisque nous l'avons déjà exprimé, notre ambition étant de déconstruire ce système raciste et d'exclusion pour reconstruire une nouvelle nation.
Dans un mot qu’il a prononcé lors de l’ouverture de la campagne à Nouadhibou, le président de la République a déclaré qu’il n’y aura pas de 2e tour, le 22 juin. Que vous inspirent cette sortie et la forte implication du gouvernement dans cette campagne ? La CENI pourrait-elle garantir un scrutin transparent
Rappelons de par le passé qu’aucune élection présidentielle en Mauritanie n'a connu de transparence. Ensuite, aujourd'hui, en ce qui concerne cette élection, la volonté pour une gestion unilatérale de l'Etat à travers ses démembrements ne fait l'objet d’aucune équivoque. Aucune des institutions impliquées dans le processus électoral n'est neutre. Aventurons-nous pour l'illustration de ce manque de transparence à citer quelques exemples:
1-Durant cette élection, aucun observateur ne sera admis sur le territoire national.
2-Le marché de confection des bulletins de vote est confié à une entreprise mauritanienne qui vient à peine de naitre, et n’a de facto la moindre expérience en la matière. De surcroit, cette entreprise appartient à un mauritanien qui, il ya quelques jours, était à la tète de la commission chargée de collecte des fonds au profit du candidat Mohamed Ould Ghazwani.
3- La CENI aujourd'hui dans sa configuration actuelle ne comprend quasiment que les représentants des partis dits de la Majorité; et refuse d'admettre certaines personnes relevant du choix de l'opposition qui usait de son plein droit.
4- La violation de droit de vote des Mauritaniens établis à l'étranger. La loi est claire là dessus, partout ou il y a cent ressortissants mauritaniens, cet espace s'érige en circonscription électorale et doit disposer de bureau de vote. Alors au Sénégal, il n'y a aucun bureau de vote, au Mali, et partout en Afrique sauf la Gambie et la Guinée Bissau; le phénomène est valable en Europe sauf la France. Aux Etats-Unis, il n'y pas de bureau de vote, au Maroc non plus.....
Venons-en maintenant à votre question proprement dite, un président de la République en plein exercice qui bat campagne pour un candidat puisqu'il lui est proche....c'est plus que flagrant. Il n'ya plus de concurrence sinon dépourvue de toute loyauté et n'obéit de surcroit à aucun principe déontologie ou d'orthodoxie. En plus du président censé garantir l'organisation d'une élection transparente pour sa succession, les ministres et hauts cadres du gouvernement encore en exercice dans leur fonction se livrent à la campagne et se servent surtout des moyens de l'Etat pour battre campagne au profit de leur candidat. A cela aussi s'ajoute l'usage des hélicoptères de l'armée et certainement d'autres moyens qui échappent à notre contrôle par le candidat soi disant du pouvoir.
Forts de ces insuffisances face auxquelles le juge suprême, en l'occurrence le conseil constitutionnel, qui doit jouer son rôle d’arbitre, reste jusque là carrément invisible dans ce processus électoral (sauf lors de la réception puis la validation des dossiers de candidature).En tout état de cause, les représentants respectifs des différents candidats en charge des opérations électorales sont en concertation avec la CENI pour discuter des conditions ou garde-fous afin de garantir un scrutin transparent, puisque nous tenons à des élections apaisées pour l'intérêt collectif national.
Nous mettons en garde tous les acteurs concernés par ce processus électoral, pour rien au monde nous n'allons accepter que notre victoire soit transformée en défaite et la défaite en victoire.
Propos recueillis par DL
lecalame.info