Ce 6 juin marque le cent soixante-troisième anniversaire de la bataille de Regba (1), point situé à environ deux kilomètres au nord de Dar El Barka (Wilaya du Brakna), chef-lieu de l’arrondissement qui porte le même nom, qui eut lieu le même jour de 1856 entre, d’une part, une colonne du gouverneur du Sénégal, le Commandant de génie à l’époque, Louis Faidherbe, et une coalition de forces Brakna, d’autre part.
Cette colonne était composée de 850 soldats (2) dont 150 français (européens) et 700 hommes de troupe recrutés dans la rive gauche du Sénégal. Le but principal de cette campagne était l’occupation du camp de M’Hamed Ould Sidi Ould El Mokhtar Ould Aghreichi, dit M’Hamed Sidi, émir des Brakna de 1851 à 1858, appuyé par un fort contingent Oulad Ahmed, commandé par Biram Ould Sidi Ould Boubacar Ould Dadif, venu sur requête de Cheikh Sidia Ould El Mokhtar Ould El Haiba (1776- 1868), dit Cheikh Sidia El Kebir. Celui-ci était aussi présent à cette bataille avec un détachement de sa tribu, Oulad Ebyeri, et certains télamid afin de soutenir son disciple et allié, l’émir M’Hamed Sidi.
Ce dernier avait assisté à la conclave de Tendowja, puits situé à environ 50 Km au Nord de Boutilimit, organisée en janvier 1856 par Cheikh Sidia El Kebir afin de faire face à la nouvelle politique hégémonique du Gouverneur du Sénégal visant à réduire sensiblement l’influence des émirats maures sur les deux rives de la vallée du fleuve Sénégal, dans la perspective de l’occupation du pays maure plus tard. Etaient aussi présents à cette conférence Mohamed Lehbib Ould Amar Ould El Mokhtar, émir des Trarza, Ahmed Aida, émir de l’Adrar, un délégué dépêché par l’émir du Tagant, Bakar Ould Soueid Ahmed, en plus de représentants des tribus guerrières de poids.
Les assaillants disposaient des armes les plus sophistiquées à l’époque avec une bonne connaissance du terrain, grâce à leur présence à Podor (rive gauche) où Faidherbe avait créé un centre d’instruction militaire depuis plus d’une année. Nonobstant, le courage et la combativité des guerriers Brakna, notamment ceux des Oulad Ahmed, en plus du rôle spirituel et moral de Cheikh Sidia, ont eu le dessus sur le cours des combats.
Les forces de Faidherbe ont essuyé une défaite inattendue (3) avec des pertes importantes. Certaines sources parlent de dizaines de morts et de blessés dans leurs rangs. Les coalisés Brakna ont aussi subi des dégâts. Cheikh Sidia El Kebir a ordonné l’enterrement des morts maures recouverts des habits qu’ils portaient comme chouhada (martyrs).
Ainsi, le front Est de la guerre du milieu du XIXe, menée par la coalition Brakna- Trarza contre Faidherbe, avait marqué une victoire importante digne d’être enseignée dans nos écoles et académies militaires afin que les nouvelles générations sachent l’ampleur des sacrifices consentis par nos aînés et leur courage pour faire face aux invasions étrangères.
Il est à noter que cette bataille et autres affrontements qui eurent lieu entre 1856 et 1858 le long de la rive droite du Sénégal contre les forces coloniales ont eu pour effet d’avoir repoussé la colonisation effective de notre pays un demi-siècle environ.
Enfin, la commémoration, le 6 juin chaque année, par la France et les Alliés de l’anniversaire du fameux débarquement de Normandie, pour libérer le pays des Gaulois du joug nazi, devrait nous interpeller, nous Mauritaniens, pour que nous célébrions régulièrement, nous aussi, l’anniversaire de la bataille de Regba en guise de reconnaissance de la résistance et des sacrifices de nos aïeuls pour avoir su défendre autant que possible notre terre et notre dignité.
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Notes:
[1] Ce site est appelé souvent Mbamam par les chroniqueurs et militaires français.
[2] C’est le chiffre avancé par le Commandant Gillier dans son ouvrage : Pénétration en Mauritanie, Librairie orientaliste, Paul Guethner, Paris, 1926, p.60. Il confond le camp de l’émir M’Hamed Sid avec celui de l’émir des Trarza, Mohamed Lehbib.
[3] Voir aussi Alfred Le Chatelier, L’Islam dans l’Afrique Occidentale, éditeur Steinheil, Paris, 1889, pp.326-327 et Paul Marty, Etudes sur l’Islam et les Tribus Maures – Les Brakna, in Revue du Monde musulman, Paris, 1920, p. 69.
Cette colonne était composée de 850 soldats (2) dont 150 français (européens) et 700 hommes de troupe recrutés dans la rive gauche du Sénégal. Le but principal de cette campagne était l’occupation du camp de M’Hamed Ould Sidi Ould El Mokhtar Ould Aghreichi, dit M’Hamed Sidi, émir des Brakna de 1851 à 1858, appuyé par un fort contingent Oulad Ahmed, commandé par Biram Ould Sidi Ould Boubacar Ould Dadif, venu sur requête de Cheikh Sidia Ould El Mokhtar Ould El Haiba (1776- 1868), dit Cheikh Sidia El Kebir. Celui-ci était aussi présent à cette bataille avec un détachement de sa tribu, Oulad Ebyeri, et certains télamid afin de soutenir son disciple et allié, l’émir M’Hamed Sidi.
Ce dernier avait assisté à la conclave de Tendowja, puits situé à environ 50 Km au Nord de Boutilimit, organisée en janvier 1856 par Cheikh Sidia El Kebir afin de faire face à la nouvelle politique hégémonique du Gouverneur du Sénégal visant à réduire sensiblement l’influence des émirats maures sur les deux rives de la vallée du fleuve Sénégal, dans la perspective de l’occupation du pays maure plus tard. Etaient aussi présents à cette conférence Mohamed Lehbib Ould Amar Ould El Mokhtar, émir des Trarza, Ahmed Aida, émir de l’Adrar, un délégué dépêché par l’émir du Tagant, Bakar Ould Soueid Ahmed, en plus de représentants des tribus guerrières de poids.
Les assaillants disposaient des armes les plus sophistiquées à l’époque avec une bonne connaissance du terrain, grâce à leur présence à Podor (rive gauche) où Faidherbe avait créé un centre d’instruction militaire depuis plus d’une année. Nonobstant, le courage et la combativité des guerriers Brakna, notamment ceux des Oulad Ahmed, en plus du rôle spirituel et moral de Cheikh Sidia, ont eu le dessus sur le cours des combats.
Les forces de Faidherbe ont essuyé une défaite inattendue (3) avec des pertes importantes. Certaines sources parlent de dizaines de morts et de blessés dans leurs rangs. Les coalisés Brakna ont aussi subi des dégâts. Cheikh Sidia El Kebir a ordonné l’enterrement des morts maures recouverts des habits qu’ils portaient comme chouhada (martyrs).
Ainsi, le front Est de la guerre du milieu du XIXe, menée par la coalition Brakna- Trarza contre Faidherbe, avait marqué une victoire importante digne d’être enseignée dans nos écoles et académies militaires afin que les nouvelles générations sachent l’ampleur des sacrifices consentis par nos aînés et leur courage pour faire face aux invasions étrangères.
Il est à noter que cette bataille et autres affrontements qui eurent lieu entre 1856 et 1858 le long de la rive droite du Sénégal contre les forces coloniales ont eu pour effet d’avoir repoussé la colonisation effective de notre pays un demi-siècle environ.
Enfin, la commémoration, le 6 juin chaque année, par la France et les Alliés de l’anniversaire du fameux débarquement de Normandie, pour libérer le pays des Gaulois du joug nazi, devrait nous interpeller, nous Mauritaniens, pour que nous célébrions régulièrement, nous aussi, l’anniversaire de la bataille de Regba en guise de reconnaissance de la résistance et des sacrifices de nos aïeuls pour avoir su défendre autant que possible notre terre et notre dignité.
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Notes:
[1] Ce site est appelé souvent Mbamam par les chroniqueurs et militaires français.
[2] C’est le chiffre avancé par le Commandant Gillier dans son ouvrage : Pénétration en Mauritanie, Librairie orientaliste, Paul Guethner, Paris, 1926, p.60. Il confond le camp de l’émir M’Hamed Sid avec celui de l’émir des Trarza, Mohamed Lehbib.
[3] Voir aussi Alfred Le Chatelier, L’Islam dans l’Afrique Occidentale, éditeur Steinheil, Paris, 1889, pp.326-327 et Paul Marty, Etudes sur l’Islam et les Tribus Maures – Les Brakna, in Revue du Monde musulman, Paris, 1920, p. 69.