La posture de cet âne-là, était difficile à peindre. Il était prosterné, dirait-on, devant la toute Grandeur de Dieu. Le cou tordu sous le flanc par les deux bras de la charrette. il semblait en profonde méditation bouddhique. Mais de plus près, une mare de sang tapissait cette prière insolite.
La lourde charge a eu raison de son stoïcisme légendaire. Désormais il est libre et égal a tous les ex-vivants.
Le harratin n’arrêtait pas de flageller la bête immobile. Il avait la lèvre mordue jusqu’au sang et marmonnait des obscénités insupportables. Il avait une larme au coin de l’œil et on pouvait difficilement savoir si sa tristesse était pour ce compagnon de toujours, dont les efforts jusqu’à la limite des limites lui avait garanti son maigre pains quotidien, ainsi qu’à sa famille, ou sur son propre sort, désormais devenu incertain.
Un vieux tacot passa. Sur les places arrières, un homme, un bédouin aux cheveux ébouriffés, soutenait une femme, en travail qui poussait des plaintes à fendre l’âme d’un samouraï.
Deux autres passagers, les serraient dans l’espace restreint des places arrières. Il ne savait pas s’il pouvait franchir le portail de l’hôpital, sans le sou, comme il était. Il tentera quand même.
Plongé dans ses inquiétudes, il ne nota qu’avec indifférence la vieille ambulance, qui boitant et crachotant, les éclaboussa d’un mélange de sang et d’eau sale. Elle venait de la route de « l’espoir » et transportait des paquets humains, dont certain gardaient encore quelques pulsations de vie.
Le chauffeur du « tout droit » réduisit la vitesse, pour laisser passer un jeune homme à la fière allure qui traversait ce qui restait de la route. Il marchait les pans de son boubous ramassés a l’arrière et tenus par l’une de ses mains. Seul un observateur averti remarquerait que le vêtement était en loques et que par une digne et ultime astuce, le jeune homme essayait de cacher aux yeux ce délabrement involontaire.
Ses chaussures usées ne portaient plus que le devant de ses pieds.
Docteur Mohamed, depuis son retour, après de brillantes études, faisait chaque matin le même trajet dans un effort désespère de garder son équilibre et sa dignité.
Il avait usé ses forces, en même temps que les derniers pécules qui lui restaient à faire la navette entre les affiches et les bureaux, dont les locataires n’avait cure du doctorat. Et ne savait même pas à quoi sert un docteur.
Une femme peule, portant une calebasse sur la tête arrêta le taxi suffoquant. Le chauffeur comprima les passagers du devant pour insérer la femme, sa calebasse et le coq bruyant qu’elle allait troquer au marché.
A quelques encablures de là ; trois ou quatre kilomètres à vol d’oiseaux, le tableau pittoresque d’un autre monde contraste violement avec cet environnement de l’apocalypse.
La comparaison entre les deux mondes, donne la curieuse impression de passer d’un pays à un autre.
Ce côté-là, c’est la tour de control. Il y trône un groupe parlant le même langage que le premier, mais disposant de la baguette autoritaire qui fait que l’âne restera l’âne, que le coq reste le coq et surtout que le docteur Mohamed ne vienne troubler la quiétude déraisonnable et absurde de ce monde où les autres doivent demeurer « laids mêmes », s’ils sont les mêmes.
Tous égaux devant la loi et inégaux dans la réalité.
La citoyenneté est « de cartes d’identités ». Cartes d’identités achetées pour que l’ordre dure et perdure. Pour que le charretier mange, même si ce n’est que l’espace d’un soir, que le broussard puisse acheter un paquet de lait « rose » pour son épouse, qui alhamdulillah est arrivée à déposer le bébé dans l’enceinte de l’hôpital. Mohamed aura, l’espace d’une campagne la liberté d’étaler quelques kilomètres de rhétorique, fourrée dans sa poitrine depuis son dernier exposé dans la fameuse université de C…
Il matelassera les nattes sous les tentes d’idées qui commençaient à alourdir sa solitude. Pour quelques jours il redeviendra citoyen et intellectuel. Il aura l’impression de guider son peuple vers la civilisation. Il pensera, certainement quelquefois, que tous ses malheurs toutes son exclusion son chômage « incurable » n’étaient que le fruit de son pessimisme exagéré.
Les gérants de la tour de control descendront très bas au milieu de la populace. Ils amorceront un atterrissage forcé pour permettre au second décollage de s’effectuer dans la démocratie mathématique de la navigation mondiale.
L’essentiel résidant de nos jours dans les façades.
Jamais l’administration n’aura été plus proche de passager naïfs, qui pensent, sans discontinuer qu’ils avancent en marquant le pas sur place.
Le pays se redressera sous les déluges de promesses et du repentir pour ce qui devait être accompli depuis les dernières promesses et que la distance insolente entre les habitants des hauteurs et les créatures des abysses a empêché « malencontreusement » de se réaliser.
on fait pénitence et on recommence.
La viande de l’ignorant est licite. Surtout quand on est trempé dans le gangstérisme et que le naïf n’excelle que dans les applaudissements.
Quand il y a la viande il faut faire bombance. Le temps est assez long pour supplier le Seigneur pour l’accord de son pardon. D’ailleurs Lui-même, a affirmé qu’Il est Miséricordieux et qu’il pardonne tous les péchés.
Il faut craindre celui qui ne craint pas le Maitre des mondes.
Dans quelques jours un âne se tordra les pattes dans les nids de poules. Il pourra démocratiquement se décomposer sur le bord de la route devant la gargote improvisée de mbarka.
Le bédouin, dont la joie n’aurait duré que l’espace d’un rêve, observera son épouse déposer son deuxième gosse dans un coin de la tente. Les impôts sur les quatre sacs de charbon qu’il vendait à côté de la grande mosquée, ont épuisé ses revenus. Sa femme peut accoucher sous les arbres dans les environs des sages-femmes, mais le billet du « tout droit » a doublé.
La peule a vendu son coq. Ce qui lui est resté après la taxe au marché, lui permettra peut-être d’aller au Nations-Unis pour se plaindre de ces aigles qui ont volé ses poussins.
Tout le monde sait que pour faire un coq, il faut protéger les poussins.
Le calme agité retombera de l’autre côté. De l’autre côté les âmes s’en iront dans un silence religieux, qui ne sera troublé que périodiquement par la sirène crachotante de l’ambulance-navette entre la route du désespoir et le quartier où tous redeviennent enfin égaux au kilomètre 7 sur cette autre de Rosso, deuxième couloir vers l’égalité éternelle
Mohamed Hanefi. Koweït.
La lourde charge a eu raison de son stoïcisme légendaire. Désormais il est libre et égal a tous les ex-vivants.
Le harratin n’arrêtait pas de flageller la bête immobile. Il avait la lèvre mordue jusqu’au sang et marmonnait des obscénités insupportables. Il avait une larme au coin de l’œil et on pouvait difficilement savoir si sa tristesse était pour ce compagnon de toujours, dont les efforts jusqu’à la limite des limites lui avait garanti son maigre pains quotidien, ainsi qu’à sa famille, ou sur son propre sort, désormais devenu incertain.
Un vieux tacot passa. Sur les places arrières, un homme, un bédouin aux cheveux ébouriffés, soutenait une femme, en travail qui poussait des plaintes à fendre l’âme d’un samouraï.
Deux autres passagers, les serraient dans l’espace restreint des places arrières. Il ne savait pas s’il pouvait franchir le portail de l’hôpital, sans le sou, comme il était. Il tentera quand même.
Plongé dans ses inquiétudes, il ne nota qu’avec indifférence la vieille ambulance, qui boitant et crachotant, les éclaboussa d’un mélange de sang et d’eau sale. Elle venait de la route de « l’espoir » et transportait des paquets humains, dont certain gardaient encore quelques pulsations de vie.
Le chauffeur du « tout droit » réduisit la vitesse, pour laisser passer un jeune homme à la fière allure qui traversait ce qui restait de la route. Il marchait les pans de son boubous ramassés a l’arrière et tenus par l’une de ses mains. Seul un observateur averti remarquerait que le vêtement était en loques et que par une digne et ultime astuce, le jeune homme essayait de cacher aux yeux ce délabrement involontaire.
Ses chaussures usées ne portaient plus que le devant de ses pieds.
Docteur Mohamed, depuis son retour, après de brillantes études, faisait chaque matin le même trajet dans un effort désespère de garder son équilibre et sa dignité.
Il avait usé ses forces, en même temps que les derniers pécules qui lui restaient à faire la navette entre les affiches et les bureaux, dont les locataires n’avait cure du doctorat. Et ne savait même pas à quoi sert un docteur.
Une femme peule, portant une calebasse sur la tête arrêta le taxi suffoquant. Le chauffeur comprima les passagers du devant pour insérer la femme, sa calebasse et le coq bruyant qu’elle allait troquer au marché.
A quelques encablures de là ; trois ou quatre kilomètres à vol d’oiseaux, le tableau pittoresque d’un autre monde contraste violement avec cet environnement de l’apocalypse.
La comparaison entre les deux mondes, donne la curieuse impression de passer d’un pays à un autre.
Ce côté-là, c’est la tour de control. Il y trône un groupe parlant le même langage que le premier, mais disposant de la baguette autoritaire qui fait que l’âne restera l’âne, que le coq reste le coq et surtout que le docteur Mohamed ne vienne troubler la quiétude déraisonnable et absurde de ce monde où les autres doivent demeurer « laids mêmes », s’ils sont les mêmes.
Tous égaux devant la loi et inégaux dans la réalité.
La citoyenneté est « de cartes d’identités ». Cartes d’identités achetées pour que l’ordre dure et perdure. Pour que le charretier mange, même si ce n’est que l’espace d’un soir, que le broussard puisse acheter un paquet de lait « rose » pour son épouse, qui alhamdulillah est arrivée à déposer le bébé dans l’enceinte de l’hôpital. Mohamed aura, l’espace d’une campagne la liberté d’étaler quelques kilomètres de rhétorique, fourrée dans sa poitrine depuis son dernier exposé dans la fameuse université de C…
Il matelassera les nattes sous les tentes d’idées qui commençaient à alourdir sa solitude. Pour quelques jours il redeviendra citoyen et intellectuel. Il aura l’impression de guider son peuple vers la civilisation. Il pensera, certainement quelquefois, que tous ses malheurs toutes son exclusion son chômage « incurable » n’étaient que le fruit de son pessimisme exagéré.
Les gérants de la tour de control descendront très bas au milieu de la populace. Ils amorceront un atterrissage forcé pour permettre au second décollage de s’effectuer dans la démocratie mathématique de la navigation mondiale.
L’essentiel résidant de nos jours dans les façades.
Jamais l’administration n’aura été plus proche de passager naïfs, qui pensent, sans discontinuer qu’ils avancent en marquant le pas sur place.
Le pays se redressera sous les déluges de promesses et du repentir pour ce qui devait être accompli depuis les dernières promesses et que la distance insolente entre les habitants des hauteurs et les créatures des abysses a empêché « malencontreusement » de se réaliser.
on fait pénitence et on recommence.
La viande de l’ignorant est licite. Surtout quand on est trempé dans le gangstérisme et que le naïf n’excelle que dans les applaudissements.
Quand il y a la viande il faut faire bombance. Le temps est assez long pour supplier le Seigneur pour l’accord de son pardon. D’ailleurs Lui-même, a affirmé qu’Il est Miséricordieux et qu’il pardonne tous les péchés.
Il faut craindre celui qui ne craint pas le Maitre des mondes.
Dans quelques jours un âne se tordra les pattes dans les nids de poules. Il pourra démocratiquement se décomposer sur le bord de la route devant la gargote improvisée de mbarka.
Le bédouin, dont la joie n’aurait duré que l’espace d’un rêve, observera son épouse déposer son deuxième gosse dans un coin de la tente. Les impôts sur les quatre sacs de charbon qu’il vendait à côté de la grande mosquée, ont épuisé ses revenus. Sa femme peut accoucher sous les arbres dans les environs des sages-femmes, mais le billet du « tout droit » a doublé.
La peule a vendu son coq. Ce qui lui est resté après la taxe au marché, lui permettra peut-être d’aller au Nations-Unis pour se plaindre de ces aigles qui ont volé ses poussins.
Tout le monde sait que pour faire un coq, il faut protéger les poussins.
Le calme agité retombera de l’autre côté. De l’autre côté les âmes s’en iront dans un silence religieux, qui ne sera troublé que périodiquement par la sirène crachotante de l’ambulance-navette entre la route du désespoir et le quartier où tous redeviennent enfin égaux au kilomètre 7 sur cette autre de Rosso, deuxième couloir vers l’égalité éternelle
Mohamed Hanefi. Koweït.