Situation en Mauritanie
L’accouchement, un moment décisif dans la vie d’une femme, un moment qui doit apporter le bonheur à la famille, mais il constitue un risque réel pour sa vie elle-même et celle de l’enfant qu’elle porte si elle est mal suivie ou n’as pas accès aux Soins Obstétricaux et Néonatals d’Urgence (SONU).
En Mauritanie chaque semaine, 13 femmes meurent en donnant la vie (RGPH2013) et c’est sa communauté tout entière qui est touchée par cette véritable tragédie. La santé de la reproduction est le socle du développement économique et social du pays ; chaque dollar dépensé sur des interventions clés en rapport avec la santé de la reproduction, la santé maternelle, néonatale et infantile est capable de générer 20 dollars en termes de rendement (PMNCH, 2013).
Les causes de la mortalité maternelle et néonatale
L’accouchement difficile et non assisté par un agent de santé non qualifié constitue l’une des principales causes de morbidité et mortalité maternelle et néonatale qui dans la plupart des cas sont évitables. En Mauritanie, un très grand nombre de femmes accouche dans des conditions extrêmement précaires, à des dizaines ou des centaines de kilomètres, loin de toute structure médicalisée avec pour seule assistance celle d’une accoucheuse traditionnelle. Selon le MICS (2015), la proportion de femmes ayant bénéficié d’un accouchement médicalement assisté est de 69,3% et c’est une femme sur trois qui accouche sans aucune assistance médicale.
Les trois retards suivants expliquent le taux élevé des accouchements non-assistés :
- Le premier retard est lié à la prise de décision de la femme à aller consulter un personnel qualifié pour recevoir des soins appropriés. Souvent ni l’importance d’accouchement assisté ni les signes de danger d’une grossesse ne sont connus par la communauté et dans certaines communautés, l’accouchement à domicile constitue une règle. Et le tout couronné par l’incapacité de la femme en travail de décider en l’absence de son tuteur.
- Le deuxième retard : une fois que la décision de chercher des soins est prise, les routes sont souvent inaccessibles, les moyens de transport ne sont pas disponibles et/ou la famille n’a pas de moyens financiers pour assurer les frais liés à l’accouchement.
- Le troisième retard : est le retard dans la prise en charge médicale (quand la femme est arrivée dans la structure sanitaire) causé par des mauvaises conditions d’accueil, de l’absence de médicaments qui sauvent la vie des femmes, de l’absence d’un personnel qualifié (sage-femme) et/ou l’absence d’un système d’évacuation performant des urgences obstétricales
A ces trois retards on pourra ajouter les quatre trop : Femmes mariées trop jeunes qui font trop de grossesses rapprochées et continuent d’en faire, trop âgées et finissent par mourir trop souvent.
Ces facteurs contribuent significativement au ratio de mortalité maternelle ( il est inapproprié de parler de taux selon un usage malgré courant) en Mauritanie qui est de 582 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes (RGPH 2013) et au taux de mortalité néonatale qui est 43 décès pour 1 000 naissances vivantes (MICS2011) au niveau national ; soit un risque de mortalité maternelle d’une femme sur 36 et un enfant sur 23.
Les solutions
Ces morts maternelles et néonatales sont évitables car les causes sont connues de nos jours, pour cela il faut :
- Des services de la santé de la reproduction de qualité (y compris l’espacement des naissances)
Si toutes les femmes désireuses d’éviter une grossesse utilisaient des contraceptifs modernes et si toutes les femmes enceintes et tous les nouveau-nés bénéficiaient de soins conformément aux recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les retombées positives seraient spectaculaires, et 29% de ces morts de femmes et de nouveaux nés pourrait être évitées.
- Un accès universel aux Soins Obstétricaux et Néonatals d’Urgence (SONU) pour toutes les femmes et les bébés
Les SONU offerts à temps permettraient de réduire de près de 74% des décès maternels (rapport des résultats du UNFPA –Mauritanie 2014). Ceci ne serait possible que par la disponibilité des sages-femmes en nombre et en qualité dans tout le pays pour permettre à la femme de bénéficier de soins adaptés et qualités à tous les stades de sa grossesse.
- Un système de Surveillance des Décès Maternels et Néonatals et de la Riposte (SDMR)
L’analyse systématique des décès de mères et nouveaux nés permet d’identifier des solutions adaptées en vue de la réduction de mortalité maternelle et néonatale. Mise en place du Real time Monitoring
Les actions des partenaires techniques et financiers PTF dans le domaine de la lutte contre la mortalité maternelle et néonatale :
Les PTF apportent un appui technique et financier au gouvernement qui devrait être plus conséquent et plus ciblé sur :
- La prestation des services :
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- Mise à disposition des médicaments essentiels et des contraceptifs
- Fournir des soins de qualité
- Prévention des violences sexuelles et prise en charge multisectorielle de leurs conséquentes
- Le renforcement des capacités :
- Le Renforcement de capacités techniques et institutionnelles des structures de santé par la mise à disposition de matériel médical et la formation des prestataires en SONU.
- Un appui technique aux écoles de santé publique dans le cadre de la formation des sages-femmes
- Le dialogue politique :
- Plaidoyer auprès du gouvernement pour maintenir la lutte contre les décès maternels et néonatals comme priorité dans ses politiques de développement.
- Le Partage de connaissances :
- Appuyer le gouvernement à fournir des données à travers les enquêtes SONU afin de planifier et mettre en œuvre des interventions de haut impact pour la réduction de la mortalité maternelle et néonatales
Les actions à entreprendre
- Augmenter le taux des accouchements assistés de 25%
- Augmenter le taux des consultations prénatales et postnatales de 25%
- Améliorer la qualité services de la santé de la reproduction
- Standardiser le Curriculum de formation des sages-femmes des 5 écoles de santé de Mauritanie
- Renforcer des capacités institutionnelles et techniques des écoles de santé
- Renforcer les équipements des structures de santé
- Renforcer les compétences des prestataires de santé
- Renforcer le système de référence entre les différentes structures de santé
- Appuyer le forfait obstétrical
- Appuyer le processus de mise en place du système de surveillance et de riposte des décès maternels & néonatals.
Pr Amar Mohamed Lemine
source lecalame.info