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un grain de sable pour secouer la poussière...

Calam(ités)

Jeudi 27 Juin 2019 - 07:18

Les Mauritaniens ont élu, sans surprise, le général retraité Mohamed ould Cheikh Mohamed Ahmed Ghazwani, au poste de président de la République, en lieu et place d’un autre général retraité qui aura sévi dix ans. Finalement, le changement que certains attendaient de pied ferme n’a pas eu lieu. La Commission Electorale Nationale Indépendante a proclamé les résultats préliminaires donnant le candidat du pouvoir vainqueur au premier tour. Selon toute probabilité, le Conseil Constitutionnel devrait procéder, incessamment, à leur validation. Comme attendu, les autres candidats, à l’exception d’un seul, ont déclaré ne pas reconnaître cette délibération, estimant que des irrégularités importantes ont émaillé le scrutin.

En principe, dans quelques semaines, la page de la présidentielle sera donc tournée. Le nouveau président entrera en fonction. Les autres, c'est-à-dire on ne sait pas qui, pour le moment, retourneront à leurs vieilles habitudes de contestation à tout va, en attendant de nouvelles perspectives électorales. Politiquement, la présidentielle de 2019 a constitué la fin d’un cycle, avec le départ obligatoire à la retraite de quelques symboles de l’opposition qui combattirent, depuis l’enclenchement du processus démocratique, les pouvoirs militaires successifs transformés en parodie de démocratie.

Entre ceux que la limite d’âge obligent de « retourner » à leur chapelet et ceux que les aléas du temps ont convaincu de tomber dans les travées du système, la marge de manœuvre de ce qui reste des oppositions est très réduite, dans un contexte particulièrement tendu où les partis ou coalitions de partis ayant soutenu tel ou tel candidat se rejettent la responsabilité d’un échec cuisant dont les contours ne sont pas encore très clairs. Le raccommodage des morceaux de formations aux abois sera rude. Le modeste score enregistré par Sidi Mohamed ould Boubacar, principalement soutenu par Tawassoul, le plus important parti de l’opposition, du point de vue de la représentation parlementaire, fait planer des doutes sur le respect de la consigne de vote en faveur de l’ex-Premier ministre. La percée de la CVE (Coalition Vivre Ensemble) fera certainement regretter, à ses promoteurs, l’idée de ne pas y avoir pensé plus tôt, au cours des dernières législatives.

Le cas échéant, elle aurait inévitablement engrangé, au Parlement,  quelques sièges qui lui auraient certainement permis de booster son score à la présidentielle. La très mauvaise et surprenante prestation du candidat Mohamed Ould  Maouloud est un autre indicateur de la descente aux enfers de l’opposition radicale. Il va sans dire que les incompréhensions, au sein de son parti, autour de sa candidature et les frictions internes du Rassemblement des Forces Démocratiques, autour du soutien de celle-ci, sont pour quelque chose dans cette déroute électorale. Le résultat honorable enregistré, par le candidat Birame Dah Abeid, constitue un message on ne peut plus clair que le président élu doit bien décrypter, afin de prendre en charge les problématiques de fond : esclavage et corollaires (pauvreté massive, exclusion, marginalisation, ignorance, maladies), injustice sociale (iniquité dans le partage des ressources nationales et dans l’accès aux hautes fonctions civiles et militaires), règlement du passif humanitaire  autour desquelles l’emblématique militant des droits de l’homme reconverti en homme politique a pu rassembler un peu moins de 20% des plus de neuf cent mille électeurs mauritaniens.

Beaucoup de défis attendent donc  le nouveau Président. Les tensions intercommunautaires n’en sont certainement pas les moindres. Quoi qu’on fasse pour le taire, Ould Ghazwani n’a pas été élu par un parti politique. L’Union Pour la République n’a pas été très visible, durant la campagne électorale, nonobstant l’implication, à haut niveau, de certains de ses leaders cooptés coordinateurs, par la direction nationale, en diverses wilayas. C’est surtout la mobilisation conjoncturelle et intempestive de l’administration (ministres en fonction, conseillers à la Présidence et à la Primature, hauts fonctionnaires), du syndicat des hommes d’affaires, des promoteurs de milliers d’initiatives et de mouvements de soutien de jeunes, de femmes et autres notables, chefs de tribus et corporations professionnelles qui a permis à Ghazwani d’éviter, dans un environnement de soupçon de fraudes massives, un aléatoire deuxième tour que beaucoup d’observateurs, euphorisés par le volume des meetings populaires organisés par des candidats comme Birame Dah Abeid, Sidi Mohamed ould Boubacar et même Hamidou Baba Kane, pensaient inévitable. La présidentielle de 2019 semble aujourd’hui derrière nous.

Le président sortant, Mohamed ould Abdel Aziz, passera, le 1erAoût prochain, le témoin à son successeur, Mohamed ould Cheikh Ahmed ould Ghazwani. Les jours et mois prochains édifieront sur la capacité de celui-ci à prendre personnellement les choses en main et surles rapports qu’il entretiendra avec son ami, désormais ex-président mais résolu, comme il l’a déclaré dans sa dernière sortie médiatique, à« suivre », du dedans et du dehors, les avancements de « ses » chantiers.
 

El Kory Sneiba

lecalame.info

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