La Mauritanie est très mélangée. Notamment élections parlant. Régionales. Municipales. Législatives. Présidentielle. Il faut bien qu’on en parle pour ne pas paraître un imbécile. Faire comme tout le monde, quoi. De quoi parlerait-on, sinon ? Des tribus ? Des communautés ? Des régions ? Des ethnies ? Des femmes ? Des jeunes ? Des LGBI ? Lesbiennes, gays, transsexuels et autres ?
Combien de tribus, chez nous ? Confusion totale, démocratie vraiment très atypique. Tout comment les listes de tel ou tel parti. Bon, allons voir quand même. Un Beïdane à la tête de la liste nationale. Un Harratine à la tête de la liste régionale. Un Kowri à la tête de la liste des femmes. C’est comme ça que ça marche, en Mauritanie. C’est ça, son standard. Les alliances de toutes natures. Les alliances contre nature. Les mécontentements. Le nomadisme. La transhumance. Un homme d’affaires qui change son fusil au moins trois fois d’épaule.
Un parti de la majorité qui rabâche, au gré des humeurs partisanes et des rapports de force civils et militaires, plusieurs fois ses candidats. Le futur Parlement aura de tout et sera vraiment très panaché. Très coloré. Très savoureux. Toutes les idéologies. Des nationalismes les plus ataviques aux extrémismes les plus primaires. Et des négationnismes les plus grégaires aux libéralismes les plus permissifs. Bref, un parlement de tout. Une véritable arche de Noé. «Ô mon fils, monte avec nous ! ».
C’est comme qui dirait que toute la Mauritanie est candidate à quelque chose, dans ces élections-là. Un peu comme dans les examens nationaux. Chaque famille a au moins quelqu’un candidat au concours d’entrée en sixième, BEPC ou BAC. Pas une famille qui n’aura pas son représentant au Conseil régional, à la mairie ou au Parlement. Vraiment extraordinaire d’originalité. D’un million de poètes on devient un million trois cents candidats. D’un million de partis politiques. D’un million de sièges. D’un million d’emblèmes. Eh oui, les sigles ! C’est à mourir de rire. Un verre de thé à moitié plein ou à moitié vide, par-ci. Pour dire qu’un parti n’ira pas jusqu’au bout, s’il n’obtient pas le 1% requis pour continuer à exister. Un bâton, par-là, pour rappeler un peu que la torture existe encore en Mauritanie. Torture physique et psychologique. Une vache.
Une chèvre. Un lièvre. Un baobab. Une calebasse. Un fusil. Une tablette. Une corne. Un tam-tam. Une plume. Un oiseau. Une étoile. Un soleil. Un arc-en-ciel. Une lune. Un cure-dents. Une bouteille. Un robinet. Une margelle. Une marmite. Une corne. Un béret. Une cuillère. Un flambeau. Un âne. Un cheval. Une agrafeuse. Une roue. Un chapelet. Un tapis de prière. Une pièce de tissu. Une pièce de monnaie. Un poisson. Un chameau. Une carotte. Une orange. Un épi. Une botte. Une médaille. Un capuchon. Une théière. Une tortue. Une femme. Un homme. Un garçon. Un livre. Tout ce qui passe par la tête peut servir de symbole. Pour ne rien dire. Puisque, réellement, on n’a rien dire à personne. C’est juste qu’il faille passer à la trappe, pour devenir conseiller régional, député ou maire et passer à autre chose. Une tortue, c’est généralement symbole de lenteur. Un lapin, d’intelligence. Un arc en ciel, de diversité. Un fusil, c’est pour tuer ou, à la limite, faire peur. Une théière, pour dire que nous sommes des buveurs de thé. Un tam-tam, ça rappelle les cérémonies où les gens dansent, chantent, applaudissent. Une roue, ça roule. Un âne, ça braie. Un poisson, ça fume quand c’est mis au fourneau.
C’est symbolique que tous les Nous z’autres soyons candidats à quelque chose. C’est clair l’intérêt des Nous z’autres aux choses publiques. Dans la plus totale confusion. Les experts aux choses fortuites. Les badauds aux choses expertes. Les militaires aux choses civiles. Les civils aux choses militaires. Les vieux aux choses des jeunes. Les jeunes aux choses des vieux. Mauritanie dans la confusion. Sens dessus-dessous. Vive la démocratie ! Salut.
Sneiba El Kory
source AMI