Tarissement des puits, pénurie d’eau douce, montée de la salinité empoisonnante des terres de culture, chute , cette année, de la production dattière de plus de 60%, cessation du maraichage sous palmiers, perte d’emplois à plus de 30 jeunes (vendeurs d’eau, charretiers, conservateurs de palmeraies) issus de familles pauvres, éclipse de tout couvert végétal, dissipation de toute vie de reptiles, insectes , lapins, hérissons, abeilles etc.
Telles sont, entre autres, les conséquences les plus frappantes de l’extraction et vente du sable de la Batha d’Atar , dont le lit aujourd’hui , ne repose plus que sur les roches et ciment d’argile.
La Batha est cet Oued, creusé par les rares déferlements des eaux de ruissellement, provenant des plateaux surélevés au nord, qui surplombent la ville d’Atar et se déversant en direction du sud plus bas.
La Batha longe, par le nord, la ville , protégée par un barrage. Elle délimite les principaux quartiers qu’elle traverse , depuis Agseissila, passant, sur la rive droite par : M’nassir,Gat3 Elbatha- Iwarwar-Taiba- Edebaye et sur la rive gauche : M’barka Oumara -Tweivinda –Garn El Gasba-Essanga- Toueirsatt-Kanaoil- Tinery- R’Gueiba pour continuer sa course vers N’Touenskess –Tewareit-Hamdoune-Ejalla-Lemreivigh- Ain Ehel Taya et enfin la plaine de Yaghref, 80km plus au sud.
Dans cette rivière saisonnière se sont déposés, au cours des siècles, des couches successives de sable dont la composition, la taille des particules, la couleur, etc., lui poinçonnent une qualité exceptionnelle en tant que matériau de construction.
Ce dépôt de sable a constitué un épais matelas sédimentaire permettant de retenir et conserver les eaux superficielles passant par la Batha, pour en constituer des nappes phréatiques et purificatrices.
C’est ainsi que s’y sont forés des dizaines de puits pour alimenter en eau douce , source de vie indispensable, les populations et les cultures.
Par le passé, la Batha s’était fait ornée de deux colliers de palmeraies aux couleurs vertes, sur les deux rives. Elle portait, en tout temps, sa belle robe de sable éclatante de blancheur.
En temps de pluie, elle valsait ses hanches au gré de ses méandres , mimant danser au rythme des chants scandés par la vibration des feuilles de palmiers et le phonème d’une chaude flute hivernale .
au cours des dernières années, par le fait des hommes auxquels elle a tout offert, elle s’est fait dégarnie de son aisance, sans respect ni pitié, par les vendeurs de sable aux entreprises de constructions (bâtiments, routes, barrage etc).
Et ce fut le comble. Les puits se sont taris, la forte salinité est montée en surface, empoisonner les rigoles et parcelles destinées au maraichage, les palmiers s’alanguissent et tentent de « rester debout sans régimes » ( خاوية على عروشها ).
Les phoéniciculteurs professionnels qui savaient prodiguer les traitements appropriés, en pareilles circonstances ne sont plus de ce monde et les activités , sources de revenus des jeunes qui les ont succédés, vendeurs d’eau et conservateurs de palmeraies, ne sont plus possibles .
En la visitant hier, le constat est alarmant : Cette Batha, notre Batha, semble, comme toute bonne mère , vivre dignement son agonie.
Elle choisit de rester habillée de sa robe de toujours, transformée en haillon ocre, troué de partout par ces voraces chercheurs d’or jaune.
Elle s’affaisse calmement sur son lit désormais, dépouillé de matelas, laissant entrevoir les nombreux puits tatoués sur son corps, élançaient leurs cous vers le ciel pour solliciter une providence divine.
ESK