Touche pas à ma nationalité a découvert, avec indignation et effarement, en même temps que tous les Mauritaniens, les propos insultants pour la communauté noire de Mauritanie et, au-delà, pour tout le pays, attribués au premier ministre et relayés par la presse ces derniers jours. Mais si le caractère cru et ignominieux de ces propos peut choquer, surtout s’ils s’avèrent provenir effectivement du premier ministre de la République, en revanche, ils ne sont pas surprenants du point de vue de leur contenu. Mieux, ils ne font que confirmer ce que tout le monde sait déjà : une politique d’apartheid qui ne dit pas son nom. Comment expliquer en effet que l’électrification de villes appartenant à d’autres régions ou que l’alimentation en eau potable de ces mêmes villes se fassent à partir des barrages de la vallée du fleuve alors que les villes et villages de la vallée qui devaient en être les premiers bénéficiaires ne disposent, pour leur plupart, ni d ‘électricité ni d’eau potable contrairement aux villes riveraines du fleuve du côté sénégalais de la frontière ? Comment expliquer que l’exploitation du phosphate de Bofal reste encore dans les tiroirs depuis au moins deux décennies ? Comment expliquer que l’immense potentiel agropastoral de la vallée ne soit pas mis en valeur au profit des populations locales et pour une autosuffisance alimentaire de l’ensemble du pays ? Il va de soi que la politique de l’état vis-à-vis de la vallée a toujours été une politique de deux poids deux mesures.
Pire, le passé récent de notre pays et son présent ont fait de la vallée du fleuve une vallée de larmes et de sang avec la tentative de génocide contre la communauté noire et son lot d’exécutions extrajudiciaires, de déportations et d’expropriations dont la dernière en date est la tentative de déposséder les populations de Boghé et de ses environs de leurs terres. Tragédie entretenue également à travers le génocide biométrique contre ces mêmes ressortissants de la vallée dont beaucoup sont privés d’état-civil et rendues donc apatrides dans leur propre pays.
Touche pas à ma nationalité s’insurge contre ces propos gravissimes attribués au premier ministre mais surtout contre la politique d’exclusion systématique qu’ils sous-tendent. C’est contre cela que l’Etat se doit de sévir au lieu de voter des lois contre la discrimination qui n’ont d’autre objectif que d’intimider les défenseurs des droits de l’homme en vue de les museler. Ce sont de tels propos et les actes qui les accompagnent qui minent l’unité nationale et mettent en péril l’existence de notre pays.
Pour le Bureau Exécutif,
Le Président,
Alassane DIA
source lecalame.info