Le Calame : La Mauritanie s’apprête à vivre deux années électorales cruciales. Si, pour 2019, les craintes de voir l’actuel président de la République modifier la Constitution, afin de briguer un troisième mandat, semblent estompées, du côté de l’opposition, on se demande encore si le FNDU, voire le G8, participeront aux consultations locales de 2018. Pensez-vous, au RD, qu’elle doit y prendre part, même sans un minimum de consensus avec le pouvoir accusé de gérer, en solo, le processus électoral ?
Moustapha Ould Abeiderrahmane : Malgré les multiples déclarations publiques du chef de l’État sur sa volonté de respecter la Constitution lui interdisant de se présenter à un troisième mandat successif, l’opposition reste largement sceptique, profondément divisée, sans vision commune ni, moins encore, de programme politique commun.
Dans ces conditions, le pouvoir en place ne peut que se croire nanti d’un boulevard pour manœuvrer, avec l’espoir de réussir ses objectifs, avoués ou non. Il me semble qu’en agissant uniquement sur cette base, en continuant à ignorer, voire mépriser l’opposition, il commet, non seulement, une grave erreur pour sa propre survie politique mais, beaucoup plus grave, pour le pays dont on connaît toutes les fragilités internes et les diverses menaces externes qui l’entourent. C’est pourquoi je reste profondément convaincu qu’il n’y a pas d’autre issue, pour sortir, par le haut, de cette situation de blocage, qu’un minimum d’entente, entre le pouvoir et l’opposition, dans toute sa diversité, et envisager ainsi des élections dans un climat apaisé, selon des conditions et procédures transparentes et consensuelles, afin que les résultats puissent être acceptés par tous.
- Lors de la dernière conférence de presse du Forum, son président ne semblait pas exclure la participation. Pour lui, la question ne se pose pas en termes de condition mais de comment gagner ces élections. Est-ce à dire que les lignes commencent à bouger du côté de l’opposition ?
- Je pense que l’opposition doit négocier, rapidement, un programme commun précis, une tactique commune, avec des propositions précises au pouvoir, pour produire les conditions d’apaisement nécessaire à des élections honnêtes qui pourraient sortir le pays de l’ornière, en approfondissant la démocratie, par une alternance pacifique au pouvoir, que ce soit en faveur du pouvoir ou de l’opposition, lors de l’élection présidentielle de 2019. Pour incarner l’espoir et avoir une réelle chance de gagner, l’opposition doit réunir deux conditions impératives. En ce qui concerne les élections générales, elle doit disposer d’un programme commun, apte à souder une vraie coalition électorale, satisfaisante pour tous. En ce qui concerne l’élection présidentielle, il s’agit de s’entendre sur les critères de sélection d’un candidat unique, capable de réunir, ensemble, toutes les forces d’opposition autour d’un programme précis de gouvernement précédemment adopté. C’est seulement comme cela que l’espoir peut se lever dans le pays.
- On vous voit assez rarement dans les manifestations du Forum. Quelle est la position du RD sut tout cela ? Quelque peu dépité ?
- Le Renouveau Démocratique est, plus que jamais, déterminé à se battre, dans la modération, pour aider à approfondir la démocratie, la paix sociale et l’unité nationale, le progrès et la justice pour tous ; plus spécialement, les catégories historiquement opprimées (esclaves, Haratines, femmes, etc.).
Propos recueillis par DL