Ça y est, c’est parti ! La principale coalition de l’opposition démocratique a donné le ton de ce que sera la campagne pour les élections que notre pays s’apprête à vivre, entre 2018 et 2019. Au cours de la marche qu’elle a organisée, le 13 Mai, à Nouakchott, c’est devant des milliers de militants et sympathisants que les leaders du FNDU ont tenu à affirmer leur position sur les prochaines élections locales et la présidentielle de 2019. Trois messages ont été envoyés au pouvoir.
D’abord, le FNDU prendra part aux élections : il n’entend pas laisser le champ libre à l’agenda entamé lors du referendum du 5 Août dernier. Le Front s’opposera, de manière ferme, à la gestion unilatérale du processus électoral et au hold-up ourdi par le pouvoir. Bonjour donc la contestation ! « Attitude défaitiste ! », répond l’UPR, principal parti de la majorité présidentielle, par la voix de son responsable de la jeunesse, Bamba ould Daramane. Ambiance… Les belligérants ne se feront certainement pas de cadeaux. Les militants et sympathisants de l’opposition rassemblée au sein du Forum sont avertis et avertissent : la fraude ne passera pas.
Le deuxième message exige la dissolution de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), récemment installée, de commun accord entre le pouvoir et l’opposition dialoguiste, conformément à l’accord politique du 20 Octobre 2016. Pour le FNDU, cette CENI est illégale. Le Forum épingle les onze sages, pour leurs liens présumés de « proximité » avec certains hauts responsables du pouvoir et de l’opposition dialoguiste. Leur répartition « sent le népotisme », dit l’opposition radicale, ce qui ôte toute indépendance à l’organe censé organiser et contrôler, de manière indépendante, les élections. On se rappelle, par ailleurs, que le Forum avait demandé à y siéger, ainsi que la divulgation récente des négociations secrètes, entre le pouvoir et l’opposition, l’a laissé apparaître.
De l’avis des observateurs, la présence de membres de l’opposition aurait certainement donné une certaine lisibilité, pour ne pas dire crédibilité, à la CENI. Mais le pouvoir et ses dialoguistes n’entendent pas partager ce « gâteau » avec une opposition qui doit, à leurs yeux, payer son « arrogance » et sa témérité d’avoir boycotté et les dialogues et les élections, depuis que le « Père de la Rectification » d’Août 2008 s’est emparé du pouvoir.
Le troisième message du FNDU porte sur la libération du sénateur Ould Ghadda et des militants d’IRA, ainsi que sur l’arrêt des poursuites contre les sénateurs, syndicalistes et journalistes, accusés d’avoir trempé dans le dossier Ghadda. Une affaire qui remonte au referendum d’Août dernier. Le gouvernement avait, rappelons-le, décidé de modifier la Constitution, en vue de supprimer le Sénat, changer les couleurs du drapeau et des paroles de l’hymne national, ce à quoi était opposée une bonne partie de l’opinion mauritanienne. Le sénateur Ould Ghadda, l’un des pourfendeurs les plus acharnés de ce projet et, conséquemment, du pouvoir en place, s’est retrouvé en prison, pour ses accointances avec l’homme d’affaires Ould Bouamatou, autre adversaire d’Ould Abdel Aziz, en exil à l’étranger. Le FNDU ne cesse de réclamer la libération ou le jugement de cet homme et la fin de la mise sous contrôle judiciaire des sénateurs, des syndicalistes, des hommes d’affaires et autres journalistes.
Enfin, le Forum réclame l’ouverture de négociations, entre le gouvernement et les médecins en grève depuis bientôt un mois. Ces derniers demandent une augmentation substantielle de leurs salaires et l’amélioration de leurs conditions de travail. Une grève au demeurant assez impopulaire, en ce qu’elle paralyse les différents établissements publics et pose de sérieux problèmes aux maigres bourses incapables de se rendre dans les cliniques privées.
Ces principales revendications du Forum risquent d’autant plus tomber dans l’oreille d’un sourd. Achevant une campagne de réimplantation qui semble, certes, lui donner des ailes mais, aussi, quelques soucis, le pouvoir n’entend pas scier la branche sur laquelle il est assis. On l’imagine mal se préoccuper d’organiser, au péril de sa propre perte, de vraies élections transparentes où participera une opposition particulièrement vindicative et remontée.