Qui a négocié la libération de 4 otages, dont Soumaïla Cissé et Sophie Pétronin, il y a deux semaines au Nord-Mali ? Parmi les noms qui circulent, il y a le Mauritanien Moustapha Chafi, qui a été longtemps le conseiller spécial du Président burkinabè Blaise Compaoré. Dimanche dernier, après 11 ans d'exil, Moustapha Chafi est rentré dans son pays. À cette occasion, il livre quelques confidences sur son travail de négociateur. En ligne de Nouakchott, il répond aux questions de Christophe Boisbouvier.
Rfi : Moustapha Ould Limam Chafi, est-ce que vous êtes content d’être rentré au pays après une si longue absence ?
Moustapha Ould Limam Chafi : Oui, je ne peux que me réjouir de rentrer au pays. Je suis très, très content. J’ai reçu tout le gotha national du pays. J’ai reçu la visite de l’ancien chef d’État Mohamed Khouna Ould Haidalla, de députés, des chefs des communautés tribales, régionales… Et j’envisage, aujourd’hui - s’il plaît à Dieu -, d’aller me recueillir sur les tombes de mes parents, mon père, ma mère.
Moustapha Ould Limam Chafi, vous êtes connu depuis plus de dix ans pour votre rôle dans les libérations d’otages au Sahel. Pourquoi êtes-vous arrivé à obtenir des libérations là où les autres n’y arrivaient pas toujours ?
Peut-être que j’ai utilisé plus de tact que les autres. Vous savez, quand vous accomplissez de telles missions qui ne sont pas du tout faciles, vous prenez beaucoup de risques. Il faut savoir s’adresser aux uns et aux autres, savoir comment poser les problèmes. Peut-être que j’ai trouvé les mots appropriés pour pouvoir convaincre en faveur de la libération de ces otages.
Vous parlez arabe, bien sûr, mais vous parlez aussi tamasheq, vous parlez haoussa - vous parlez beaucoup de langues - djerma… Donc tout cela doit beaucoup aider, non ?
Oui, parce qu’en réalité je suis ouest-africain.
A l’heure de la prière, vous êtes ensemble - les ravisseurs et vous -, et vous priez ensemble, j’imagine, non ?
C’est tout à fait normal. Je suis d’abord un musulman. Je prie à tout moment, à toutes les heures de prière. Vous ne pouvez pas être avec les gens au moment de la prière et ne pas prier pas ensemble.
Pour aider à la libération de Soumaïla Cissé, de Sophie Pétronin et des deux otages italiens, il y a quelques jours, Jeune Afrique a révélé au début de ce mois que vous avez offert vos services au président IBK dès le mois de mars dernier. Quelle a été la bonne formule que vous avez trouvée pour négocier ?
Contrairement à ce qui a été écrit, je n’ai jamais offert mes services. Le Premier ministre malien et moi, nous n’avons jamais parlé. J’ai été contacté par un homme d’affaires qui souhaitait aider à la libération de Soumaïla Cissé. J’ai recommandé des personnes qui étaient bien introduites et qui pouvaient aider à cette libération. Mais je n’ai joué aucun rôle.
Jeune Afrique précise que vous avez conseillé au président et au Premier ministre maliens de passer par les services d’un Arabe de l’ancien groupe Mujao, Chérif Ould Attaher. Est-ce qu’il a été efficace dans ces négociations ?
Je ne peux pas vous dire. Mais dans tous les cas, on se réjouit que les négociations aient abouti et personnellement je n’ai joué aucun rôle.
Je vous demande peut-être un seul nom, à me confirmer ou non, parmi les intermédiaires qui auraient été contactés par vos soins. C’est le Touareg Sedane Ag Hita [commanditaire présumé de l’enlèvement et de l’assassinat des deux reporters de Rfi Ghislaine Dupont et Claude Verlon, le 2 novembre 2013 à Kidal]. Est-ce que vous confirmez ?
Non, je ne confirme pas.
Mais vous ne démentez pas non plus…
Non, non, je n’ai jamais recommandé Sedane, non.
Vous n’avez jamais recommandé Sedane Ag Hita dans la négociation ?
Non, non…
Est-ce que les jihadistes qui ont organisé les attentats terroristes de 2016 à Grand-Bassam et à Ouagadougou ont fait partie des gens qui ont été libérés au début de ce mois ?
Je ne peux pas savoir, je ne sais pas. Je n’ai pas vu la liste de ceux qui ont été libérés, donc je ne peux pas savoir. Ce sont les services maliens, les autorités maliennes, qui peuvent vous confirmer qui a été ou non libéré.
Mais est-ce que quelquefois les contreparties ne sont pas trop élevées ?
Certainement, mais je n’aime pas trop m’étendre sur ce sujet, parce que ce sont des décisions souveraines de certains États, qui sont motivées par des raisons humanitaires. Seuls les États savent pourquoi ils ont accepté ces conditions. Je n’aime pas trop m’étendre sur ces décisions souveraines des États.
Est-ce qu’à force de parler avec les ravisseurs, vous êtes devenu un ami de certains jihadistes ?
Je n’ai jamais été ami d’aucun jihadiste, jamais.
Mais vous avez bien connu Abou Zeïd, par exemple ?
Bien connu, non. Je ne l’ai pas bien connu, mais je l’ai rencontré dans le cadre des discussions, des négociations… C’est tout.
Et quel souvenir vous en gardez ?
Je garde le souvenir d’un homme très dur, très difficile aussi dans les discussions. Très, très difficile…
Et un homme que vous connaissez bien aussi, c’est Iyad Ag Ghali, qui lui, est toujours vivant.
Oui.
Quelle appréciation vous portez sur lui ?
Je n’ai pas d’appréciation particulière sur Iyad Ag Ghali.
Vous pensez que l’on peut négocier avec lui ou pas ?
Je ne sais pas. Je ne sais pas dans quelles prédispositions il est. Je ne peux pas dire.
Est-ce que vous avez été surpris par la mort d’Abdelmalek Droukdel ? C’était en juin dernier, au nord du Mali, à la suite d’une opération franco-américaine…
Je n’ai pas été surpris. On n’est jamais surpris par la mort de ces responsables de groupes, parce que ce sont des gens qui ont fait le choix d’aller vers la mort, donc c’est leur destin. Malheureusement, c’est leur choix et donc ce n’est pas une surprise. On choisit de se sacrifier, d’aller vers la mort, donc on n’est jamais surpris. Au contraire, plus ils survivent, plus on est surpris.
RFI /aviam
Rfi : Moustapha Ould Limam Chafi, est-ce que vous êtes content d’être rentré au pays après une si longue absence ?
Moustapha Ould Limam Chafi : Oui, je ne peux que me réjouir de rentrer au pays. Je suis très, très content. J’ai reçu tout le gotha national du pays. J’ai reçu la visite de l’ancien chef d’État Mohamed Khouna Ould Haidalla, de députés, des chefs des communautés tribales, régionales… Et j’envisage, aujourd’hui - s’il plaît à Dieu -, d’aller me recueillir sur les tombes de mes parents, mon père, ma mère.
Moustapha Ould Limam Chafi, vous êtes connu depuis plus de dix ans pour votre rôle dans les libérations d’otages au Sahel. Pourquoi êtes-vous arrivé à obtenir des libérations là où les autres n’y arrivaient pas toujours ?
Peut-être que j’ai utilisé plus de tact que les autres. Vous savez, quand vous accomplissez de telles missions qui ne sont pas du tout faciles, vous prenez beaucoup de risques. Il faut savoir s’adresser aux uns et aux autres, savoir comment poser les problèmes. Peut-être que j’ai trouvé les mots appropriés pour pouvoir convaincre en faveur de la libération de ces otages.
Vous parlez arabe, bien sûr, mais vous parlez aussi tamasheq, vous parlez haoussa - vous parlez beaucoup de langues - djerma… Donc tout cela doit beaucoup aider, non ?
Oui, parce qu’en réalité je suis ouest-africain.
A l’heure de la prière, vous êtes ensemble - les ravisseurs et vous -, et vous priez ensemble, j’imagine, non ?
C’est tout à fait normal. Je suis d’abord un musulman. Je prie à tout moment, à toutes les heures de prière. Vous ne pouvez pas être avec les gens au moment de la prière et ne pas prier pas ensemble.
Pour aider à la libération de Soumaïla Cissé, de Sophie Pétronin et des deux otages italiens, il y a quelques jours, Jeune Afrique a révélé au début de ce mois que vous avez offert vos services au président IBK dès le mois de mars dernier. Quelle a été la bonne formule que vous avez trouvée pour négocier ?
Contrairement à ce qui a été écrit, je n’ai jamais offert mes services. Le Premier ministre malien et moi, nous n’avons jamais parlé. J’ai été contacté par un homme d’affaires qui souhaitait aider à la libération de Soumaïla Cissé. J’ai recommandé des personnes qui étaient bien introduites et qui pouvaient aider à cette libération. Mais je n’ai joué aucun rôle.
Jeune Afrique précise que vous avez conseillé au président et au Premier ministre maliens de passer par les services d’un Arabe de l’ancien groupe Mujao, Chérif Ould Attaher. Est-ce qu’il a été efficace dans ces négociations ?
Je ne peux pas vous dire. Mais dans tous les cas, on se réjouit que les négociations aient abouti et personnellement je n’ai joué aucun rôle.
Je vous demande peut-être un seul nom, à me confirmer ou non, parmi les intermédiaires qui auraient été contactés par vos soins. C’est le Touareg Sedane Ag Hita [commanditaire présumé de l’enlèvement et de l’assassinat des deux reporters de Rfi Ghislaine Dupont et Claude Verlon, le 2 novembre 2013 à Kidal]. Est-ce que vous confirmez ?
Non, je ne confirme pas.
Mais vous ne démentez pas non plus…
Non, non, je n’ai jamais recommandé Sedane, non.
Vous n’avez jamais recommandé Sedane Ag Hita dans la négociation ?
Non, non…
Est-ce que les jihadistes qui ont organisé les attentats terroristes de 2016 à Grand-Bassam et à Ouagadougou ont fait partie des gens qui ont été libérés au début de ce mois ?
Je ne peux pas savoir, je ne sais pas. Je n’ai pas vu la liste de ceux qui ont été libérés, donc je ne peux pas savoir. Ce sont les services maliens, les autorités maliennes, qui peuvent vous confirmer qui a été ou non libéré.
Mais est-ce que quelquefois les contreparties ne sont pas trop élevées ?
Certainement, mais je n’aime pas trop m’étendre sur ce sujet, parce que ce sont des décisions souveraines de certains États, qui sont motivées par des raisons humanitaires. Seuls les États savent pourquoi ils ont accepté ces conditions. Je n’aime pas trop m’étendre sur ces décisions souveraines des États.
Est-ce qu’à force de parler avec les ravisseurs, vous êtes devenu un ami de certains jihadistes ?
Je n’ai jamais été ami d’aucun jihadiste, jamais.
Mais vous avez bien connu Abou Zeïd, par exemple ?
Bien connu, non. Je ne l’ai pas bien connu, mais je l’ai rencontré dans le cadre des discussions, des négociations… C’est tout.
Et quel souvenir vous en gardez ?
Je garde le souvenir d’un homme très dur, très difficile aussi dans les discussions. Très, très difficile…
Et un homme que vous connaissez bien aussi, c’est Iyad Ag Ghali, qui lui, est toujours vivant.
Oui.
Quelle appréciation vous portez sur lui ?
Je n’ai pas d’appréciation particulière sur Iyad Ag Ghali.
Vous pensez que l’on peut négocier avec lui ou pas ?
Je ne sais pas. Je ne sais pas dans quelles prédispositions il est. Je ne peux pas dire.
Est-ce que vous avez été surpris par la mort d’Abdelmalek Droukdel ? C’était en juin dernier, au nord du Mali, à la suite d’une opération franco-américaine…
Je n’ai pas été surpris. On n’est jamais surpris par la mort de ces responsables de groupes, parce que ce sont des gens qui ont fait le choix d’aller vers la mort, donc c’est leur destin. Malheureusement, c’est leur choix et donc ce n’est pas une surprise. On choisit de se sacrifier, d’aller vers la mort, donc on n’est jamais surpris. Au contraire, plus ils survivent, plus on est surpris.
RFI /aviam