La précampagne du referendum bat, depuis quelques semaines, le plein côté du pouvoir et ceux qui l’ont accompagné lors du dernier dialogue. L’Union Pour la République (UPR), principal parti de la majorité présidentielle, a formé ses missions de sensibilisation. Elles ne vont pas tarder à investir l’intérieur du pays, pour défendre les amendements constitutionnels du président de la République. Chacune est dirigée par deux ministres, accompagnés de membres du bureau exécutif et du conseil national du parti, auxquels sont adjoints des membres de ses structures de base, des cadres et autres hauts fonctionnaires de l’Etat.
En attendant, les initiatives d’individus, de clans, de tribus et de régions ont poussé, comme des champignons. Tous rivalisent de sorties médiatiques. Personne ne veut rester en marge… Les media publics sont mis fortement à contribution, pour relayer les souteneurs, laudateurs et autres opportunistes. Ces rencontres presque mondaines sont mises à profit, par leurs initiateurs, pour vanter les « réalisations grandioses » du président de la République, Mohamed ould Abdel Aziz. Pour eux, le tombeur du président Sidi ould Cheikh Abdallahi est le « premier bâtisseur de la Mauritanie », il s’est battu, « contre vents et marées », pour sortir le pays de l’ombre. Raison largement suffisante, donc, de leur point de vue, pour soutenir les amendements que le ‘’Sauveur’’ soumet à l’arbitrage du peuple. A bien des égards, ces initiatives paraissent sœurs jumelles des mobilisations du PRDS et les « visitations » de son chef, hier, « ombre », aujourd’hui, d’Ould Abdel Aziz. Qu’en sera-t-il, demain, au démarrage de la campagne ? Que de vacarmes en perspective !
L’opposition dite « radicale », son candidat…
Même si le FNDU s’est donnée comme ambition de faire échouer l’agenda du gouvernement, elle semble, aujourd’hui, plus préoccupée par la quête d’un candidat unique, pour la présidentielle de 2019. Ses sorties récentes, à l’intérieur du pays et dans la presse, demeurent encore timides. Va-t-elle laisser le terrain au pouvoir et à ses sympathisants ou s’engager sur le terrain, pour appeler les citoyens à voter non, afin de décrédibiliser le referendum ? Le boycottera-t-elle, simplement, en demandant, à ces mêmes citoyens, de ne pas se rendre aux urnes ? De l’avis d’un observateur averti, l’opposition doit, en tout cas, éviter de laisser trop de terrain libre au pouvoir. Profiter, plutôt, de la tribune qu’offre la campagne référendaire pour passer son message, aussi bien à la télévision qu’à la radio. C’est une opportunité qu’il faudrait saisir, conseille ledit observateur.
Incapable, depuis 2005, d’imposer un rapport de force au pouvoir qui use et abuse de sa position, l’opposition doit changer de stratégie ; user des armes de la démocratie, plutôt que de miser sur d’autres moyens, pour vaincre Ould Abdel Aziz qui a réussi à utiliser divers partis politiques pour « crédibiliser » son putsch, en 2008, et diaboliser l’opposition, auprès de l’opinion, à chacune de ses sorties médiatiques. Celle de Néma aura été la plus virulente. Ould Abdel Aziz l’a traitée de repaire de croulants, de corrompus et d’incapables. Pire, il lui a jeté, à la figure, de faire son deuil de l’alternance. Le FNDU et le RFD sont donc avertis et doivent se battre en conséquence.
Et voilà que survient la disparition brutale de l’ancien chef de l’Etat, Ely ould Mohamed Vall, un poids lourd proche de l’opposition. Sans disposer d’un quelconque parti politique, l’homme suscitait méfiance, pour ne pas dire peur, au régime en place. Un régime qui n’a, cependant, ménagé aucun effort pour offrir, à son rival, des obsèques dignes de ce nom. Autres incidences aussi subites, l'accident de voiture du plus virulent sénateur opposé au pouvoir en place, Mohamed Ghadda, qui a emporté la vie d'une femme, et l'assassinat, non encore élucidé, de maître Cheikh Hormatalla.
L'affaire du sénateur est en train de revêtir « un cachet politique », selon son avocat, l'ancien bâtonnier, maître Bouhoubeyni. En dépit de la fin de l'instruction judiciaire et en dépit, également, de la consignation, dans un document notarié par les parents du retrait de leur plainte, ce qui devrait entraîner, de facto, la libération du sénateur, celui-ci reste en détention. Les sénateurs ont décidé de s'impliquer fortement pour la libération de leur collègue.
... et la CENI, à former son personnel
Pendant que les camps s’esquivent, la CENI entame les séminaires de formation de son personnel, ce qui signifie qu’elle dispose déjà de moyens en ce sens. La presse laissait entendre que ladite commission avait écrit, au gouvernement, pour l’informer de son impossibilité à organiser, d’ici au 15 Juillet, le referendum. Mais, selon une source interne à la commission, une telle correspondance n’aurait jamais existé. Fortement décriée, lors des dernières municipales et législatives de 2013 puis présidentielle de 2014, par ceux-là mêmes qui auraient contribué à la désignation des sept sages, la CENI reprend du service dans une atmosphère politique tendue. Espérons qu’elle sera à la hauteur de la tâche et qu’elle ne perde pas le peu qui lui reste de crédibilité et de crédit…