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un grain de sable pour secouer la poussière...

Aziz à Nouadhibou : "Veni, Vidi" mais c’est tout!

Mercredi 2 Août 2017 - 18:39

25 ans d’exercice. Médecin de son pays, Dr Abdessamed Greymich, fait la vacation pour subvenir aux besoins de sa famille. Sans courber l’échine. Curieuse trajectoire que celle de ce médecin admis à exercer à l’étranger et dont le pays n’a pas voulu de l’expertise.

Au risque d’écorner la célèbre citation de J. César, « je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu»,  le président Mohamed Ould Abdelaziz ne pourra certainement pas se prévaloir de la dernière maxime. Il a beau rappelé que les investissements ont franchi des seuils jamais égalés ; qu’il a construit et équipé des dizaines d’hôpitaux ou de centres de santé mais la réalité amère restera encore là. Les mauvaises pratiques aussi. Pour combien de temps encore?

Après dix ans de règne, et alors qu’il visite la capitale économique pour appeler les citoyens à voter en faveur des amendements qui, selon lui, vont hisser le développement du pays, là dans cette foule erre incognito, Docteur Abdessamed. Un médecin qui scrute encore l’horizon d’un espoir déjà effiloché. Un mirage dont il ne peut se saisir. Un espoir…peut-être sans lendemain. Les frasques sont partout. Le secteur de la santé n’y déroge pas. Malgré le déficit en professionnel de santé, 691 médecin pour tout le pays, en 2016, le management de la ressource humaine n’en a cure du serment Hippocrate. Ici, c’est à la tête du client. Ou à ses bras longs.

Mardii sous ses pieds, sur cette terre de Nouadhibou que foulait le président, est né un homme fier. Un médecin formé pour apporter son expérience à son pays après en avoir fait profiter les hôpitaux et centres de santé canadien ou belge. Mais c’est un homme un peu hors du moule du mauritanien «normal». Un homme qui préfère vivre avec un peu de pain et un peu de paille pour préserver sa dignité. Fils de notabilité locale, entre les illustres familles Greymich et Ehel Mohamed Saleh, ce médecin aux cheveux aujourd’hui grisonnants, ne s’attarde pas sur ces considérations. Il a même tout accepté, tout enduré avec un enfant malade sur les bras, en revenant dans son pays sauf la résignation ou l’humiliation. Son honneur n’est pas à négocier. Un homme qui a appris à ne pas mâcher ses mots. A dire quel que soit l’interlocuteur, les mots les yeux dans les yeux. Et c’est cette franchise et ce franc-parler qui ont eu raison de lui dans un monde de laudateurs, de béni oui-oui près à se courber au premier claquement de doigts.

Dr Abdsammed ne fait pas de politique. La seule qui vaille pour lui c’est celle de servir ses patients quand on lui donne l’occasion. Indissociable du malaise des médecins, qui plusieurs fois l’année battent le macadam à Nouakchott, la situation de Dr Abdessamed Ould Greimich est un peu particulière. Son exemple est encore plus douloureux parce qu’il a le sentiment d’être rejeté «sans savoir pourquoi». Il n’a jamais compris que c’est au prix du clientélisme tribal et régional que les choses se nouent et se dénouent au ministère de la santé. Comme d’ailleurs dans tous les secteurs de l’activité publique. Un homme, fusse-t-il docteur dans un pays qui en a énormément besoin, se jauge à l’aune de sa soumission, de sa tribu, de sa région ou de son engagement politique. Beaucoup de « valeurs » à l’antipode de l’orthodoxie d’un bon médecin mais c’est comme cela que ça marche à défaut d’avoir suffisamment d’argent pour ouvrir son propre cabinet.  

Dr Abdessamed a beau voir défilé une dizaine de ministre, et côtoyer des élus et hauts fonctionnaires de sa région, il traîne l’énorme défaut d’être lui-même. Sans façon et sans gants. Des principes qui vous recalent à la première interview parce que vous n’êtes pas malléable et corvéable à volonté. Aujourd’hui, Dr Abdessamed pensait encore rencontrer le président pour lui raconter ses déboires. Mais peine perdue. Il n’appartient pas à ce microcosme politique qui se vend à tous les dirigeants pour placer ses enfants et ayant-droits aux meilleurs postes.   

Dr Abdessamed est même conscient du risque pris à raconter son «affaire » à des journalistes critiques. Mais il assume sachant que ce n’est pas la meilleure boîte à lettres pour sensibiliser le président sur son sort. «Je veux juste que le président sache que beaucoup de choses lui sont camouflées» accordant encore le doute de la bonne foi.

Incompris. Insoumis. Dr Greimich qui pense encore, à son âge reprendre "l''aventure" à l'étranger, fait face à des réalités vivaces dans un pays dont le gouvernement avait pourtant lancé en 2010 un «appel à tous les médecins » pour revenir mouiller leurs blouses au pays.

Aujourd’hui, il regarde son avenir –déjà derrière lui- avec philosophie et s’en remet fatalement à la providence Divine car la justice des hommes est limitée dans le temps et dans l’espace.

J.D

 

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