Jadis, très jadis, les sachems, les manitous, les prêtres, les charlatans, disaient a leurs fidèles, que l’idole demande un sacrifice pour exaucer les vœux.
Bien sûr que la statue ne pouvait parler, sinon la bourse du saint intermédiaire resterait vide.
Le profit de l’offrande revient donc entièrement au prêtre lui-même.
La ruse de créer des idoles ne date pas d’aujourd’hui. Quelque chose comme une sacralité qui fait que les gens de plein gré, meurent pour elles, lui offrent leurs biens et la glorifient sans réserve et sans reflexe.
Lors de la deuxième guerre mondiale, Hitler avait décidé de créer une idole, pour que les allemands l’adorent. Une divinité sur terre à la place de Dieu. C’était la patrie allemande, la « race arienne », la suprématie abusive et arrogante. Pour ces idoles, les citoyens pouvaient donner leurs biens, sacrifier leurs vies et contredire leurs consciences.
Les allemands mourraient et Hitler disposait des trésors de la république, de la décision et de l’influence de la nation allemande.
Il avait ainsi instauré et légalisé le droit de vie et de mort sur ses concitoyens au nom d’un spectre, qui en réalité, et même s’il avait une consistance initiale, s’était dévêtue de son sens primaire, pour servir les intérêts strictement personnels d’une élite, d’un souverain absolu.
A gorge déployé, les ventres souvent vides, les yeux pleins de larmes, les espoirs accrochés à tous les horizons, les peaux vibrantes de fierté insituable, nous avons chanté notre patrie.
Notre patrie était là. Beaucoup d’entre nous sont morts pour elle. Nous avons célébré sa grandeur et sa gloire. A travers des dizaines de 28 novembre, des centaines de 30 septembre, des milliers de 31 « octem-bres », sans jamais pouvoir sentir qu’elle était là, nous l’avons espérée.
Nous chantions une puissance, une structure, une existence, une entité, appartenant à d’autres. D’autres qui sont nos frères, nos sœurs, nos enfants, nos amis, nos voisins.
Entre leurs mains, désormais durcies par les décomptes de capitaux et de ressources, qui appartiennent à la patrie et desquelles la patrie ne profite que chichement ou jamais, ils tiennent notre rêve, qu’ils essorent et asphyxient sans discontinuer.
Nos frères, nos délégués, nos gouvernants, nos notables, nos responsables ont oublié de donner une définition à cette patrie malheureusement.
La patrie, c’est nous… la patrie c’est le peuple.
Nous n’adorons qu’Allah. Les idoles n’ont pas de place dans notre vie.
Vous pouvez vous divertir avec l’histoire ancienne, les villes antiques, les bravoures épiques, c’est une bonne chose, c’est votre droit.
Mais n’oubliez pas que le sort des vivants et des générations nouvelles est plus pressant et plus urgent que les légendes, le tissage de lignées, prétendument supérieures et les chimères.
Si le 28 novembre a été une délivrance de la colonisation française, depuis une soixantaine d’années ; cette délivrance, qui aurait mieux fait d’être restée stérile, n’a fait qu’accoucher de colonisations intimes beaucoup plus douloureuses. Car aucun mal ne fait plus mal que celui infligé par la proche-parenté.
On nous demande d’aimer la patrie. Avons-nous besoin d’une telle requête pour aimer notre logis ?
On nous demande de nous aimer d’aimer nos frères dans la patrie, nos frères de sang, nos coreligionnaires. Ceci devait être inné, logique. Cela va sans dire et sans demande. Le contraire serait irraisonné, absurde, et abominable.
Nous aimons nos frères dans la patrie.
Mais, puisque cela ne vous coutera aucune dépense, enseignez-nous, comment pouvoir aimer sans rancune, celui dont l’occupation principale est de planter la pleine dans nos poitrines ? Celui qui mange notre tranche de bonheur et comptabilise notre part d’oxygène pour nous la faire payer?
Apprenez-nous comment on peut aimer celui qui a tué en nous tout espoir.
Apprenez-nous à pouvoir aimer celui qui a utilisé la force de nos bras contre la pureté de notre conscience. Celui qui nous gifle avec nos mains et nous piétine avec nos enfants.
Celui-là, qui a tué en nous l’amour la miséricorde et l’humanité.
Celui-là, qui a condamné nos enfants à l’errance pour laver la vaisselle et balayer les rues chez le reste du monde.
Comment peut-on aimé l’injuste habillé de la noble tunique de la justice ?
Comment peut-on aimer celui qui a fait le serment d’Hippocrate pour sauver notre vie, et qui nous tue pour un misérable pécule.
Comment peut-on aimer ou même respecter celui, qui chargé de vulgariser le savoir impose l’ignorance ?
Comment pouvons aimer celui qui partage, le partageable, en nous excluant effrontément à chaque fois ?
Allah n’a-t-il pas ordonné la justice et la bienfaisance ?
Etes-vous comme le livre qui commande la propreté sans jamais toucher à l’eau ?
Comment peut-on avoir confiance en celui qui a clamé défendre les biens de l’état, les terres de l’état, l’intégrité de l’état, pour en faire un moyen de ravitailler ses comptes et ceux de ses proches, qui distribue notre territoire en nous reléguant dans les bidonvilles ?
Soyons logiques, chers frères ! Vous avez marché sur ce que nous avions de plus cher et de plus sacré.
N’est-ce pas une astuce subtile pour nous réduire au servage ?
Dites-nous !!!!!!!!
Nous voulons aimer. Nous ne demandons qu’à aimer.
Notre religion nous a appris que notre foi ne sera complète qu’en souhaitant pour notre frère dans la foi ce que nous souhaitons pour nous même.
Notre frère dans la foi !!!!!
Apprenez-nous comment ; vous qui avez le monopole des diplômes de la pédagogie et des sciences !!!!!!!
Vous vous êtes trompé de conception : le sacrifice, les martyrs, l’allégeance sont pour la patrie et non pour vos monarchies et votre domination.
Pouvons-nous jamais ramener à la vie ces cortèges interminables d’âmes pures et pieuses, parties trop tôt, victimes de négligence délibérée, de déséquilibres intentionnels d’injustices flagrantes et de gabegie institutionnalisées ?
Aidez-nous seulement à voir un 28 novembre, où, tous, nous pourront dire que nous avons vécu 59 années de cauchemars chroniques et que c’est fini.
Bien fini. Définitivement fini.
Nous ne vous aimerions, pas seulement en frères, mais en reconnaissance pour des sauveurs qui nous tirent de bien loin.
Il est de notre devoir de remercier un ministre qui a secoué son secteur. Mais il est plus du devoir d’un président, en début de mandat, dans un pays en état de choc d’avancer le pied droit vers la bonne direction et de secouer la crasse qui a étouffé 4 millions de citoyens et qui souille le siège sur lequel il est assis, depuis bien longtemps.
Nous vous pardonnons d’avance. Peut-être que les morts aussi vous pardonneraient, s’ils y trouvent un dédommagement ou une indemnité valables pour la descendance perdue qu’ils avaient laissé entre les mains de Dieu et qui a été dénaturée par vos mains aveuglées par des biens dont aucun ouguiya ne vous suivra dans la tombe.
Vous avez trop mis à l’épreuve la patience divine.
Dieu accorde des délais. Mais une fois qu’Il saisit le pervers, Il ne le lâchera plus.
Revenez.
Repentez-vous, pendant qu’il est temps.
Allah pardonne à celui se repend de bon cœur.
Permettez-nous le prochain 28 novembre d’écrire sur les pages de la planète et pour les yeux des citoyens du monde que :
La Mauritanie est née.
Que vive la Mauritanie et que bravo pour ses fils, qui ont aidé et assisté sa naissance les fronts luisants de dignité, de détermination, d’amour pur, de sentiments patriotiques nobles, et qui ne cachent pas de pièges.
Que Dieu bénisse toute fille et tout fils de cette terre qui y œuvre pour le bien de ces citoyens perdus et de ce pays qui ne mérite pas de mourir de façon si indigne.
Bonne fête de l’indépendance. Et Inchalla, cette fois-ci, que ce soit la bonne.
Mohamed Hanefi. Koweït.