La situation politique nationale reste focalisée sur le referendum en gestation, selon la volonté du président de la République. Passant outre le rejet, par le Sénat, des amendements constitutionnels préconisés par l’accord du 20 Octobre 2016, le chef a en effet décidé d’organiser une consultation populaire, en place d’un congrès parlementaire. Et, depuis l’annonce de cette décision, au cours d’une récente prestation télévisée du Président, la scène politique, jusque-là assez calme, bruit. Chaque camp fourbissant ses armes.
Celui du pouvoir a repris du collier, obligé qu’il est par l’ordre du boss, et l’UPR, principal parti de la majorité présidentielle, a sorti ses grands chevaux et autres chameaux. Des réunions de soutien meublent, déjà, les programmes squelettiques de la TVM et de RM. Chaque soir, ces media publics nous abreuvent d’indigestes reportages, fardés de cadres, notables et même ministres, avec, tous, des têtes d’enterrement. Déjà vue et revue, c’est la course pour se mettre devant et capter l’objectif de la caméra balayant le public.
Les « initiatives » poussent comme des champignons. Et d’ici le referendum, les uns et les autres vont rivaliser en ardeur, zèle et exhibitionnisme. Tout va y passer. Le président de la République regarde tout cela avec un dépit certain ; sinon, certain dépit. Tout ce monde qui s’égosille, se pavane en boubous bien amidonnés, ne représente, chacun, que sa tête, ne défend que ses intérêts égoïstes. Ils ne font rien pour défendre leur chef, sans qu’il ne leur ordonne de le faire. Ould Abdel Aziz le leur aurait dit, lors de ses nombreuses rencontres avec les élus de sa majorité : vous n’avez pas su bien vendre mes réalisations auprès des populations, aucun de mes proches et « engraissés n’a su anticiper le vote des sénateurs. Vous passez toujours à côté, laissant de côté l’essentiel: se battre pour mon troisième mandat, lors du dernier dialogue, et éviter la raclée des sénateurs. »
Aujourd’hui, c’est encore ces appuis sur commande – eux, toujours eux et encore eux – qui se bousculent pour étaler leur zèle de circonstance. Mais ils iront vendre le referendum avec d’autant moins de conviction que le Président a décidé de quitter la barque en 2019. Certains commenceraient même à se chercher de nouvelles planques. Ils ne veulent plus lier leur sort à un partant. Un sénateur aurait même dit, au Président : pourquoi organises-tu un referendum, décides de supprimer le Sénat et convoques des élections anticipées, alors que tu ne seras pas là pour le suivi ? Un questionnement qui hante nombre de nos élus et ministres, inquiets, déjà, de la future recomposition de l’arène politique. Mais ils battront campagne. Quand même.
Signes d’ébullition en cours
Du côté de l’opposition dite « radicale », on bouge également. Mais, là, pour bien d’autres raisons : maintenir la cohésion, afin d’éviter l’éclatement, surtout, mais, également, peser sur l’échéance, capitale, de 2019. C’est dans cette optique qu’elle a élu un nouvel directoire, présidé par le président de Tawassoul, Mohamed Jemil Mansour. Objectifs du FNDU et du RFD : en un, faire échec au referendum ; en deux, parvenir à une candidature unique, pour la présidentielle de 2019.
La redoutable tâche de dénicher l’oiseau rare a été confiée à l’ex-Premier ministre, Yahya ould Ahmed El Waghf, président d’ADIL. C’est un gros challenge, car l’ex-PM devra réussir à mettre en évidence une personnalité consensuelle pour tous les pôles de l’opposition. Et concocter, probablement, un programme de gouvernement commun, comme l’a suggéré Moustapha ould Abeïderrahmane, il ya quelques semaines, dans une tribune publiée dans nos colonnes et intitulée : «La Mauritanie à la croisée des chemins ».
La prochaine présidentielle : voilà donc le phare du FNDU, renonçant à courir derrière un dialogue hypothétique, sans aucune garantie de voir ses résolutions mises en œuvre. Parallèlement à ces manifestations d’ordre politique, le pays semble bouillir. Les manifestions de jeunes se multiplient. En certaines régions, des hostilités populaires au referendum sont nettement perceptibles. Que fera le pouvoir, face à cette grogne politique et sociale ? Attendre et voir ?