Le 29 juin 2024, les Mauritaniens ont voté en faveur du Président de la République Monsieur Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, candidat à un second mandat.
Ce n'est pas la première fois ( et ça ne sera pas , probablement, la dernière fois ) qu'une majorité électorale se dégage en faveur du chef du pouvoir exécutif en place.
En tout cas ,il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître que le président en exercice, candidat à sa propre succession, dûment autorisée par la constitution, dispose d'un avantage certain sur ces concurrents dont le
principal n'est pas encore parvenu , malgré sa remarquable percée électorale, à réunir les conditions requises pour la réalisation d'un réel changement du pouvoir par les urnes.
En effet , un tel scénario suppose, techniquement, l'obtention d'un nombre suffisant d'élus pour le parrainage du candidat à la présidence ainsi qu'une couverture de tout le territoire national par les représentants aux bureaux de vote.
A présent, il semble que seuls les islamistes du parti tawassoul ont réussi à réunir ces deux conditions. Néanmoins, au vu des résultats du vote , lls ne sont pas encore en mesure d'incarner l'alternance politique.
Politiquement, l'alternance suppose , une unité de l'opposition derrière un leader rassembleur et un programme commun
pour battre le pôle de stabilité sur lequel repose le pouvoir en place.
Or , une lecture objective des réalités mauritaniennes , ne peut pas, sérieusement, nier l'existence de ce pôle correspondant à ce qu'on appelle , dans les vielles démocraties , les grands électeurs.
Ce pôle composé de tous les acteurs ayant une certaine influence ou une influence certaine à savoir religieuse ( ulemas et autres chefs de confréries).
influence sociale ( tribale et/ ou notable ) économique ( pouvoir de l'argent) ou étatique ( gens du pouvoir connus sous l'appellation de Ahl al makhzen ) constitue une indéniable force de mobilisation.
Il est , également, indéniable qu'une bonne partie de l'électorat pas du tout rassurée par l'alternance au moment oú le pays " traverse " une zone de turbulences , ont voté pour le Président de la République Monsieur Mohamed Ould Cheikh El GHazouani en prenant en considération , entre autres motifs , l'argument de l'indispensable sécurité
C'est, d'ailleurs, cet argument qui a été invoqué par les figures emblématiques de l'opposition historique lesquelles ont vu , en lui ( un atout supplémentaire) , un président consensuel.
Sur ce point, le Président réélu n'a pas manqué de les rassurer, dans sa première déclaration, en affirmant qu'il agira comme Président de tous les Mauritaniens et qu'il tend la main à tout le monde .
Compte tenu de la réalité qui reflète le poids électoral des forces en présence et au vu de la transparence, de plus en plus ,observée dans l'organisation des élections dans notre pays , il n'est pas sérieux de continuer à jouer au mauvais perdant .
En vérité, il est bien permis de dire que l'élection présidentielle du 29 juin 2024 reflète une tendance majoritaire favorable au candidat de " la traversée sécurisée " et par conséquent, il n'y'a aucune raison de crier , après chaque défaite électorale , à l'existence d'une crise politique. Il faut savoir assumer sa défaite dans l'intérêt de la Mauritanie.
Mais ce choix majoritaire tenant à l'indispensable sécurité n'exclut nullement l'impérieuse nécessite de porter un regard lucide sur la carte qui a été dessinée par l'élection présidentielle de Juin 2024 .
Le fait que presque la moitié de l'électorat Mauritanien a voté pour le changement à la tête du pouvoir et qu'au sein de l'autre moitié ,de l'électorat, nombreux sont ceux qui ne cachent pas leur mécontentement et qui aspirent à un changement des pratiques du pouvoir doit inciter à accepter et à accompagner de bon coeur et de bonne foi , l'inéluctable changement qui s'impose.
Cette lecture lucide doit tenir compte de la moitié des électeurs qui n'a pas voté, du nombre inquiétant des votes nuls mais surtout elle doit tenir compte , au plan intérieur , de la forte contestation observée en milieu urbain dont la difficile gestion implique , outre l'intelligence politique, un véritable etat d'urgence social.
Au plan extérieur, cette lecture lucide doit impérativement viser à solutionner les problèmes de la diaspora mauritanienne laquelle a visiblement exprimé un réel mécontentement.
Il était, d'ailleurs, question d'organiser un forum de la diaspora pour répondre , autant que possible, aux attentes des Mauritaniens de l’Extérieur lesquels ont pu , sur instructions du Président Ghazouani, dans le cadre de l'intérêt qu'il porte à leur problématique , bénéficier de la réforme tenant à la double nationalité.
Bien entendu, cette lecture lucide devrait , forcément , conduire , à chercher les compétences qui sont en mesure d'accompagner l'inéluctable changement et de réaliser dans les meilleurs délais et dans la limite du second quinquennat,
, des actions concrètes au profit des populations démunies.
Enfin , et ce n'est pas le moins important, cette lecture lucide de la carte socio-politique dessinée par l'élection présidentielle du 29 juin 2024 , doit partir de la précarité du pôle conservateur , principal soutien du pouvoir ,
lequel pôle se trouve , en dépit de son poids électoral, miné par les contradictions internes , les querelles des chapelles, la lutte des clans , la médiocrité ambiante, la protection éhontée des intérêts égoïstes et qui de ce fait , ne saurait être un gage pour une traversée sécurisée de notre bien-aimée la Mauritanie vers un avenir radieux.
Abdelkader ould Mohamed