En tant que fils de pêcheur, originaire de Ndiago et jouissant de 12 ans d’expérience dans le secteur, nous déplorons les évènements qui ont abouti à l’arrestation de plus d’une trentaine de pêcheurs de Ndiago, ces derniers jours à Nouakchott.
Nous avons appris, avec consternation, la blessure d’un pêcheur lors des évènements. Il est encore regrettable que tout cela se succède suite à un simple contrôle effectué par notre Marine, en conformité aux nouvelles dispositions de loi réservant la Pêche artisanale aux seuls citoyens mauritaniens. Le nouveau Code des Pêches maritimes prévoit, dans son article 84, des sanctions allant de 100 mille à 150 millions d’Ouguiyas pour « exercice de pêche dans les eaux sous juridiction mauritanienne sans être titulaire d'un droit de pêche et de la licence de pêche y afférente ».
L’Etat mauritanien, soucieux de créer de l’emploi, d’absorber le chômage des jeunes et de limiter la concurrence étrangère dans le secteur des Pêches artisanales, a adopté ce code qui - il faut le rappeler - a été sollicité par certains pêcheurs.
Dans un Etat normal, force revient à la loi. L’application de la loi a aussi des exigences. Si les pêcheurs de Ndiago sont des Mauritaniens - nous n’en doutons pas parce que nous en faisons partie - il n’est pas possible de les distinguer de nos frères pêcheurs de Guett Ndar qui viennent d’un pays frère, le Sénégal. Il s’agit, le plus souvent, de familles partagées sur les deux rives. Il est donc tout à fait logique que la Marine procède à des vérifications d’identité des pêcheurs de Ndiago pour s’assurer que parmi les équipages il n’y a pas d’étrangers. C’est la loi. A nos pêcheurs de faire preuve de civisme en facilitant ces contrôles qui ont pour but de préserver nos ressources halieutiques. L’Article 90 de la Loi 2015-017 portant code des Pêches maritimes stipule : « Quiconque empêche intentionnellement les agents de contrôle d'exercer leurs fonctions (…) sera puni d'une amende de deux cent milles (200.000) ouguiya à deux millions (2ooo.ooo) d'ouguiya ».
Cela dit, nous ne nions pas les imperfections décelées lors de l’application de la Loi. Nul n’est parfait. Mais nous devons - quand même- admettre d’avoir légiféré sans tenir compte du manque d’effectifs sur nos pirogues. C’est cela qui, aujourd’hui, pousse des compatriotes à violer la loi en embarquant des étrangers. Et souvent, les amendes infligées sont trop lourdes pour ces braves hommes qui risquent leur vie tous les jours pour nous ravitailler en poisson.
La réalité c’est que beaucoup sont ceux qui gravitent autour du secteur des Pêches et qui - pour des intérêts personnels - poussent le législateur à voter des lois sans concertations préalables de toutes les parties concernées. En premier lieu, nous pensons aux pêcheurs actifs sur le terrain.
Dans cette optique, nous proposons à l’Etat de favoriser un dialogue inclusif sur un possible moratoire permettant à nos pêcheurs d’embarquer les quelques étrangers dont ils ont besoin pour combler le déficit en effectif, en attendant que se concrétise le vœu de l’Etat qui a lancé un programme ambitieux de formation de nos pêcheurs.