Financial Afrik – Alors que l’unité flottante de production, de stockage et de déchargement (FPSO) du projet GrandTortue Ahmeyim (GTA) de gaz naturel liquéfié (GNL) est sortie depuis fin janvier des chantiers navals de Qidong (Chine) pour un cap vers les côtes Mauritano-Sénégalaises où elle devrait commencer l’extraction du gaz à la fin de l’année, sous la supervision de Golar et de Technip, les deux pays multiplient les manœuvres pour engendrer le maximum de retombées sur le local content.
Si le Sénégal a très vite mis en place un cadre légal et quantifié le marché relatif au contenu local (5 000 milliards de FCFA), coté Mauritanie, le dispositif gagnerait à être clarifié pour prévenir d’éventuels conflits entre l’Etat et les multinationales.
Par exemple, le britannique BP, chef de file de l’exploitation dudit champ, a récemment vu son appel d’offres “land transportation” annulé par les autorités mauritaniennes.
D’habitude discrète sur la question gazière, Nouakchott n’a pas donné d’explications à travers les canaux appropriés. La Société Mauritanienne des Hydrocarbures (SMH) n’a pas non plus commenté ce qui s’apparente à une mise au point.
Dans les milieux d’affaires des deux pays, il se susurre que le local content tel qu’il est instauré favorise plutôt les multinationales. Celles-ci lancent des appels d’offre basés souvent sur l’argument prix -la capacité technique étant minorée-, ce qui, à l’arrivée, oblige les entreprises soumissionnaires à se livrer à une guerre des prix qui pousse les services et la sécurité vers le bas.
L’on se rappelle en mai 2021 de l’accident des camions de Eiffage en charge de la construction d’une installation pour la société pétrolière BP dans le cadre du projet GTA et qui a coûté des vies.
De son côté, la compagnie aurifère Kinross, qui exploite la mine de Tasiast, serait aussi adepte du système “cheap prices basé beaucoup plus sur l’argument du “moins disant” que sur les normes et la sécurité des personnes et des installations. D’ailleurs de nos jours, les sociétés locales ne s’empressent plus pour participer dans les tenders de Kinross.
Certes, en obligeant leurs fournisseurs à “casser” les prix, en squeezant les sociétés locales , les multinationales gagnent selon une logique du court terme mais au final, il s’agit d’un manque à gagner pour l’Etat ( impôt sur les sociétés ) et pour le secteur privé local obligé constamment à ajuster ses prix vers le bas pour faire du bric et broc potentiellement attentatoire à la sécurité et aux normes.
Le nivellement vers le bas ainsi créé, aux antipodes des standards internationaux, ne permet pas le transfert de compétences ni le développement d’un *écosystème privé fort*. Le retard de la livraison du supply base, prévu initialement à la fin janvier 2023, le montre bien, à trop vouloir gagner sur le court terme, l’on perd du temps et de l’argent.
quotidien nouakchott