Bientôt un mois que le président Mohamed Cheikh Ghazwani a été investi à la magistrature suprême. Beaucoup de chantiers attendent les ministres de son premier gouvernement : de la réforme des systèmes de l’éducation et de la santé à l’assainissement de la chose publique ; de la promotion de la justice sociale à la consolidation des fondements de l’unité nationale ; de la mise en œuvre de stratégies et de programmes capables de contribuer à la restauration et au contrôle durable de la sécurité des citoyens et de leurs biens à toutes les autres grosses tâches auxquelles les nouvelles autorités doivent rapidement s’atteler, en plus de tous les défis économiques et politiques auxquels le pays fait face, depuis plus de quatre décennies.
Mais il y a un chantier dont on ne parle pas assez souvent et dont la déliquescence avancée est, pourtant, à l’origine de quasiment tous les dysfonctionnements de tous les secteurs. Dans les programmes électoraux de plusieurs candidats, l’urgence de réformer et de toiletter la presse fut, certes, très bien exprimée. L’institution n’a cessé d’être clochardisée à dessein, dès les premières années du processus démocratique, en 1990/91. Un quatrième pouvoir qui ne jamais ne le fut, investi de partout par les agents de renseignements, les malades mentaux, les repris de justice, les incultes et les recyclés de tous horizons.
Pressentie institution de contrôle, régulation et suivi de l’action publique, la presse n’est qu’un alambic de rumeurs et de faussetés, voire promoteur d’informations malveillantes qui cristallisent et aiguisent les tensions intercommunautaires. Une toute petite poignée de journalistes est certes restée égale à elle-même, en termes de responsabilité, intégrité et éthique mais la profession est loin d’être entièrement responsables de la triste réalité. Les régimes successifs ont chacun joué sa partition, dans la déconsidération programmée de la presse. Une volonté de discrédit manifestée clairement dans le choix, très subjectif, des responsables chargés de superviser les organes de régulation, comme la Haute Autorité de la Presse et de l’Audiovisuel. Beaucoup n’ont absolument rien à voir, ni de près, ni de loin, avec cette institution. Entamée voici plus de vingt ans, la campagne de sape se poursuit avec l’allocation et le partage, sur plusieurs milliers de sites électroniques, journaux papier et organes audiovisuels, de deux cents millions MRO que l’Etat alloue, chaque année, à la presse.
Les nouvelles autorités doivent inscrire, dans leurs priorités, une ferme volonté de restructuration du quatrième pouvoir, pour lui permettre de jouer pleinement son rôle d’éducation et de sensibilisation des masses, via traitement professionnel, responsable et neutre des informations, au lieu de la focaliser sur des analyses bidon et des centres d’intérêt complètement désuets, puant la mauvaise foi voire la purulence raciste. A titre d’exemple, la gourmandise avec laquelle cette presse de bas étage s’est jetée sur la vidéo d’un ministre du dernier gouvernement, comme s’il était le premier issu d’une famille pauvre ou le seul à cultiver un style qui tranche avec les exigences comportementales et vestimentaires classiques d’un haut responsable. Quasiment tous les Mauritaniens, y compris certains présidents, généraux, hommes d’affaires et ministres, sont issus de milieux pauvres : adwabas, campements ou villages. Les parcours de certains sont même parfois plus exceptionnels et plus atypiques que celui du ministre de la Jeunesse, de l’emploi et des sports. Il est évident que la presse souffre de problèmes structurels : manque de moyens et de formation, anarchie généralisée qui en fait une grosse étable où s’engouffrent les sans-emploi et autres troubadours de tout acabit. Elle doit être assainie. Un chantier qui n’est pas de moindre importance que tous les autres attendus des nouvelles autorités. Et d’ici qu’il s’ouvre enfin, voguent donc fake news, rumeurs désobligeantes, désinformations et manipulations préjudiciables !
Sneiba El Kory
lecalame.info