L'hydroxychloroquine, médicament dérivé d'un antipaludique dont l'utilité contre le nouveau coronavirus suscite tant de débats, est revenue en piste mercredi avec une volte-face de l'OMS, au moment où si l'Europe respire, l'Amérique latine, Brésil en tête, est toujours à la peine face à la pandémie qui a fait plus de 380.000 morts dans le monde.
Après analyse, le comité de sécurité de l'OMS a estimé "qu'il n'y a aucune raison de modifier le protocole" des essais cliniques sur ce médicament, a annoncé mercredi l'organisation mondiale de la Santé, qui avait suspendu ces essais après la publication d'une étude par la prestigieuse revue médicale The Lancet.
Celle-ci, qui semblait clore le débat, jugeait inutile voire néfaste le recours à l'hydroxychloroquine contre le coronavirus. La France elle aussi avait annoncé suspendre toute utilisation du médicament.
Mardi soir, The Lancet, dont la publication était attaquée, avait cependant fait machine arrière, en reconnaissant que "d'importantes questions" étaient soulevées à ce sujet, un premier pas selon certains spécialistes vers le reniement de cette publication.
Premier défenseur de l'utilisation de ce médicament, le professeur français Didier Raoult a raillé sur twitter le revirement sur une étude qu'il avait jugée "foireuse".
Utilisé à titre expérimental dans des hôpitaux français, en Afrique, en Amérique latine, c'est jusqu'au président américain Donald Trump qui avait annoncé un temps prendre ce médicament à titre préventif. Le médecin de la Maison blanche a confirmé mercredi que s'il avait arrêté, il n'avait non plus aucun effet secondaire.
Les espoirs, à plus long terme, de mettre au point un vaccin - l'Université d'Oxford a notamment annoncé mercredi s'apprêter à en tester un au Brésil - ont eux justifié une initiative de la France, l'Allemagne, l'Italie et des Pays-Bas qui ont convenu de former une "alliance" visant à en assurer la production en Europe.
Car si l'Europe avance chaque jour un peu plus dans le déconfinement et le retour à la vie habituelle, la crise sanitaire "n'est pas terminée", a averti le président italien Sergio Mattarella, dont le pays, qui avec plus de 33.500 morts est le deuxième plus touché en Europe après le Royaume Uni, rouvrait mercredi ses frontières en espérant le retour, pour l'instant timide, des touristes.
Dans les aéroports comme dans les gares, à Rome, Milan, Naples ou Venise, vols et liaisons internationales ont repris ou se sont accélérés.
- "Savourer ces moments" -
"Je suis bien heureuse d'être là!", souriait Régina, une touriste allemande quinquagénaire, juste débarquée à l'aéroport de Venise, avec son masque sur le nez. "C'est fantastique de ne voir presque personne".
A Rome, au pied de la Fontaine de Trévi, un couple de jeunes mariés profitait ainsi du peu d'affluence pour prendre la pose. "Il faut savourer ces moments", disait le mari: "à Rome, c'est rare!".
Après l'urgence sanitaire, "il faut maintenant faire face à l'urgence économique et sociale", a de son côté souligné le Premier ministre Giuseppe Conte.
Les Italiens peuvent désormais circuler librement entre les régions mais les interdictions de grands rassemblements et l'obligation du port du masque dans les lieux clos et dans les transports publics restent en vigueur.
Après la réouverture mardi des terrasses de café à Paris et la décision italienne, l'Allemagne a annoncé mercredi la levée au 15 juin de ses mises en garde sur les voyages touristiques en Europe. Le gouvernement néerlandais va faire même pour plusieurs pays d'Europe.
En Autriche, le contrôle systématique des frontières terrestres sera levé jeudi, plus tôt que prévu, a annoncé le gouvernement, à l'exception de celles avec l'Italie.
Quant à la la Belgique, elle a annoncé qu'elle rouvrirait à compter du 15 juin ses frontières avec les autres pays de l'Union européenne, le Royaume-Uni et les quatre pays de l'espace Schengen non membres de l'UE.
L'Espagne a pour sa part prolongé mercredi jusqu'au 21 juin l'état d'alerte décrété le 14 mars avec un des confinements les plus stricts en Europe, mais d'autres mesures d'assouplissement sont attendues dans les jours et les semaines à venir, qui illustrent le retour progressif à la vie normale sur le Vieux Continent.
- Couvre-feu à Bahia -
Une perspective encore bien éloignée en Amérique du Sud, où le virus continue de se propager.
Au Brésil, pays qui a enregistré mardi un record journalier de décès, portant à 31.199 le nombre de morts, pour 555.383 malades confirmés, un couvre-feu a été imposé à partir de mercredi dans une vingtaine de localités de l'Etat de Bahia, dans le Nord-est, pour tenter d'y contenir l'expansion galopante de la pandémie.
Les chiffres, que la communauté scientifique juge grossièrement sous-évalués, situent le géant latino-américain à la quatrième place mondiale pour les morts, derrière les Etats-Unis - qui restent de loin le pays le plus durement frappé avec 106.696 morts - le Royaume-Uni (39.728) et l'Italie (33.530). La France a passé mercredi le cap des 29.000 morts
Au total, la pandémie de Covid-19 a tué plus de 382.000 personnes sur la planète depuis son apparition en décembre en Chine, selon un bilan établi mercredi par l'AFP à partir de sources officielles.
Les principaux foyers brésiliens sont l'Etat de Sao Paulo, locomotive économique et culturelle du pays, et celui de Rio de Janeiro, grand pôle touristique.
Le Brésil, dont le président Jair Bolsonaro appelle régulièrement à la levée des restrictions pour préserver l'économie et l'emploi, représente plus de la moitié des cas de contamination et des morts du Covid-19 en Amérique latine.
Le virus continue de s'y propager à grande vitesse : la Colombie, frontalière du Brésil, a dépassé les 1.000 morts moins de trois mois après la détection du premier cas de contagion, le Mexique, qui amorce aussi la reprise de son activité économique, en compte plus de 10.000 et le Pérou en déplore plus de 4.600.
En Bolivie, plus de 10.500 cas de Covid-19 et plus de 300 décès ont été enregistrés, des chiffres en nette croissance. Dans ce pays, les autorités des villes de La Paz et d'El Alto vont marquer avec des écriteaux les maisons des malades qui refusent de se confiner.
Au Chili, où un record quotidien de 87 décès a été enregistré, le confinement est prolongé à Santiago pour une quatrième semaine.
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