L'armée israélienne a renforcé mercredi soir sa présence en Cisjordanie et près de Gaza au lendemain de l'annonce du projet américain pour le Moyen-Orient qui a reçu un accueil largement favorable des Israéliens, mais très hostile dans les Territoires palestiniens.
Peu après l'annonce de ce renforcement, l'armée a indiqué qu'une roquette "a été tirée depuis la bande de Gaza" sur Israël, la première depuis que le plan américain a été dévoilé à Washington par le président américain Donald Trump, flanqué du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.
En guise de réponse, l'armée israélienne a annoncé que des "chasseurs (israéliens) ont frappé un certain nombre de cibles terroristes du Hamas dans le sud de la bande de Gaza".
De nouvelles manifestations, qui ont fait quelques blessés, ont eu lieu mercredi dans les territoires palestiniens contre ce plan jugé pro-israélien par le leadership palestinien.
Le président palestinien Mahmoud Abbas, qui a refusé ces derniers mois les offres de dialogue des Etats-Unis, jugeant Trump de parti pris, a affirmé que le plan "ne passera pas" et qu'il est destiné aux "poubelles de l'histoire".
Mahmoud Abbas est attendu d'ici 15 jours devant le Conseil de sécurité de l'ONU pour plaider son rejet du plan, a annoncé mercredi l'ambassadeur palestinien auprès des Nations unies, Riyad Mansour.
Face à ce rejet, le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a demandé aux Palestiniens de lui faire une "contre-offre".
Parmi les nombreux points sensibles du projet figure l'annexion par Israël des colonies juives en Cisjordanie, en particulier dans la vallée du Jourdain, qui doit devenir la frontière orientale d'Israël.
L'armée israélienne avait annoncé mardi, quelques heures avant l'annonce du plan, le déploiement de renforts d'infanterie dans cette vallée stratégique qui compte pour environ 30% de la Cisjordanie occupée.
Drapeau palestinien à la main, Thabit Atiya, 52 ans, a manifesté mercredi à Tubas, dans cette vallée.
"Je suis ici pour dire mon opposition au plan de Trump", a-t-il dit à l'AFP. "Je veux montrer que la Palestine n'est pas vide et que ses habitants originels sont toujours ici".
Or mercredi soir, après ces manifestations, l'armée a annoncé de nouveaux renforts, avec des "troupes de combats supplémentaires", en Cisjordanie mais aussi près de la bande de Gaza, territoire palestinien contrôlé par les islamistes du Hamas et sous blocus israélien.
- "Opportunité unique" -
Le plan assure que Jérusalem restera "la capitale indivisible d'Israël" et propose de créer une capitale de l'Etat palestinien cantonnée dans des faubourgs de Jérusalem-Est.
"Il est impossible pour n'importe quel enfant, arabe ou palestinien, d'accepter de ne pas avoir Jérusalem" comme capitale d'un Etat palestinien, a lancé M. Abbas, une position partagée par le Hamas.
"La soi-disant équipe américaine pour la paix a seulement copié et collé le plan de Netanyahu et des colons", a fustigé Saëb Erakat, secrétaire général de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP).
"Ce plan n'apportera aucune solution et favorisera plus de tensions, et probablement plus de violence et de bain de sang", ont soutenu les Eglises catholiques en Terre Sainte dans un communiqué conjoint.
Côté israélien, les réactions sont tout autres.
"L'Histoire a frappé à nos portes hier soir pour nous donner une opportunité unique d'appliquer la loi israélienne dans les implantations en Judée et Samarie", nom donné à la Cisjordanie par les autorités israéliennes, a déclaré le ministre de la Défense, Naftali Bennett, aussi chef d'une formation de droite radicale.
Mais des éléments de la droite radicale alliée à M. Netanyahu s'opposent à la partie du plan américain proposant la création d'un Etat palestinien démilitarisé.
"Nous ne laisserons pas la sécurité des localités en Judée et Samarie être menacée", a affirmé Yisrael Gantz, un des responsables des colonies dans le secteur de Ramallah.
Dans ce contexte, et à l'approche des élections du 2 mars, le chef du parti "Bleu-Blanc" de Benny Gantz, principal rival de M. Netanyahu, a demandé un vote de la Knesset, le Parlement israélien, "sur l'ensemble" du plan américain.
- "Trahison du siècle" -
Le plan a suscité la circonspection à l'étranger, sauf à Ankara et Téhéran, où il a été vivement rejeté. L'Iran l'a qualifié de "trahison du siècle".
L'ONU a souligné qu'elle s'en tenait aux frontières définies en 1967, comme la Jordanie.
Seul autre pays arabe à avoir signé un traité de paix avec Israël, l'Egypte s'est contentée d'appeler Israéliens et Palestiniens à un examen "approfondi" du plan.
La France a assuré qu'elle "étudiera avec attention le plan de paix" tout en soutenant "la solution des deux Etats, en conformité avec le droit international".
Parmi les alliés des Etats-Unis, Londres était le plus positif, qualifiant le plan de "proposition sérieuse".
L'Arabie saoudite, avec qui Israël a récemment montré des signes de rapprochement, a dit "apprécier" les efforts de Donald Trump, mais a aussi exprimé son soutien "inébranlable" aux Palestiniens.
Les manifestations dans les Territoires palestiniens contre le plan restent pour le moment relativement limitées mais pourraient, si elles prenaient de l'ampleur, raviver un conflit israélo-palestinien resté à l'ombre des Printemps arabes, du conflit en Syrie et de la crise avec l'Iran ces dernières années.
AFP