L’ONG Internationale Tostan a organisé le mardi 7 novembre 2017, à l’Hôtel Tfeïla de Nouakchott, un atelier de partage et de capitalisation de ses expériences pendant ses dix années d’activités au Brakna (Mauritanie). Cette rencontre a ciblé les élus (maires et députés), des imams, des responsables d’ONG partenaires ou qui interviennent dans les mêmes domaines, des directeurs centraux des ministères des affaires sociales, des affaires islamiques et de la justice.
Ouvrant les travaux de la session, Mme Elena Bonometti, Directrice Exécutive de Tostan International a d’abord souhaité la bienvenue aux participants avant de se dire « très honorée de succéder à Molly Melching à la tête de cette institution ». Poursuivant, la nouvelle responsable a indiqué que son organisation « est à un tournant historique » précisant que « 7500 communautés dans les 8 pays cibles ont fait des déclarations publiques d’abandon de l’excision et 20.000 femmes ont été élues à des postes de leadership dans leurs communautés ». « Après dix ans d’activités en Mauritanie, nous avons décidé d’observer une pause pour peaufiner un nouveau programme plus efficace », a rappelé Mme Bonometti. Avant de terminer, la Directrice a invité les participants à partager leurs remarques et suggestions tout en se déclarant « convaincue qu’un changement est possible ».
Après l’allocution du Représentant de l’UNICEF et la projection d’un film sur la Déclaration d’abandon de l’excision organisée en 2013 à Aleg, les participants ont suivi d’abord une présentation de l’approche sur le développement mené par la communauté présenté par Elena Bonometti, puis une présentation de la théorie du changement mené par la communauté par M. Medy Cissé, Directeur du département SERA et enfin l’historique et les réalisations majeures de Tostan en Mauritanie (2007-2016) par Mamadou Baba Aw, Coordinateur national.
Mme Bonometti a indiqué que Tostan qui intervient dans 8 pays de la sous-région pilote un programme axé sur l’individu dans la communauté en inculquant les idéaux de paix, de bien-être et de respect de ses semblables. Pour ce faire, des modules dans les langues locales sont dispensés par un facilitateur qui habite dans la communauté durant les 3 années d’exécution du projet. Ils portent sur l’hygiène, la santé, le processus de résolution des conflits (Kobi), l’alphabétisation, le calcul, le micro-crédit (Aawde). La méthodologie est basée sur le chant, la danse, le théâtre autour des thèmes de tradition orale. Enfin, la stratégie est axée sur la diffusion organisée à travers les émissions de radio, les réunions inter-villageoises, les déclarations d’abandon de l’excision, les comités de gestion communautaires avec pour résultats la formation d’AGR, l’élection de femmes à des postes de leaders, la construction d’écoles, l’installation d’unités solaires etc.
Quant à M. Mady Cissé, il a défini la théorie du changement comme « une vision explicitement documentée de la façon dont on pense qu’un changement doit se produire ». Axée sur une approche holistique et une plate-forme pour le développement, elle a pour objectifs ultimes le renforcement du bien-être communautaire et la dignité pour tous.
Enfin, M. AW a dressé un rappel des réalisations accomplies par Tostan au Brakna, en partenariat avec le MASEF : Réunions et rencontres inter-villageoises, sensibilisation, assainissement, adoption de villages, reboisement, ateliers de partages et d’imprégnation, micro-crédits ont été les points saillants des 3 programmes triennaux exécutés en 10 ans. Ainsi, 1899 personnes issues de 30 communautés ont été touchées par le programme.
Après ces communications, la parole a été donnée aux communautés partenaires et bénéficiaires qui ont tour à tour exprimé leurs remerciements et leur gratitude à Tostan et mis l’accent sur l’impact de ses programmes dans l’évolution des mentalités.
Elus, facilitateurs, superviseurs, membres des CGC, acteurs de la société civile, entre autres ont souligné les retombées positives des interventions de Tostan. Parmi celles-ci, ils ont notamment cité la prise de conscience par les femmes de leurs droits et devoirs, leur aspiration à occuper des postes de leaders, l’abandon volontaire des pratiques traditionnelles néfastes telles que l’excision, les mariages précoces et forcés, la maîtrise des techniques de montage et de gestion de micro-crédits, des modes de transmission des maladies, le recours au SRO pour traiter les diarrhées infantiles et à l’espacement des naissances pour la santé de la mère et de l’enfant. A cela s’ajoutent la sensibilisation et l’information sur l’allaitement maternel inclusif, l’enregistrement des naissances à l’état-civil, le lavage des mains, la protection de l’enfance etc.
En outre, les partenaires et bénéficiaires ont unanimement exprimé leur regret à la suite de la décision de délocaliser les bureaux de l’institution à Dakar. « Nous nous sommes sentis sevrés ou orphelins depuis le départ du staff il y a quelques mois !», lancent-ils avec amertume.
Cette rencontre de partage est censée renouer le dialogue entre la direction de Tostan-Mauritanie avec ses partenaires après 6 mois de rupture et redonner confiance aux communautés du Brakna qui tiennent à consolider et à pérenniser les acquis réalisés ces 10 dernières années.
Dia Abdoulaye et Brahim E Salem
source lecalame.info