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un grain de sable pour secouer la poussière...

L’auto-opposition mauritanienne

Jeudi 11 Juillet 2024 - 23:00

En politique, le commun des mortels définit l’opposition comme étant l’ensemble des organisations de l’autre côté de la frontière du pouvoir. Ces organisations dites d’opposition, n’ont pourtant, ni même programme, ni même stratégie politique, et surtout pas même le même rapport au Pouvoir en place. Dans un pays sous dictature militaire aspirant à la démocratie, le socle qui devrait servir de trait d’union, à défaut d’unité, devrait être, tout simplement, le désir commun de changement démocratique qui seul, peut bousculer les mentalités conservatrices dont la nourrice n’est autre qu’une tradition féodale alimentée par le soutien du pouvoir aux intérêts égoïstes via une corruption institutionnalisée et légitimée par les tenants du système qui se recrutent dans toutes les sphères allant du sommet de l’état, en passant par ceux qu’on peut légitimement appeler “grands electeurs”, jusqu’au bas peuple dont la misère est exploitée et maintenue pour le succès de ce système. 

Je suis d’avis que quand on s’oppose à un tel système dont nul ne maîtrise le labyrinthe des chemins, on peut et on doit avoir différentes solutions, et même des solutions qui s’opposent.  Mais opposer des points de vue, ne doit nullement aboutir à s’opposer entre acteurs du changement souhaité. Laissons nos idées faire leur guerre, mais ne nous entretuons pas entre nous. Malheureusement, en Mauritanie, on s’oppose beaucoup plus à l’opposition qu’au Pouvoir, et c’est dommage. L’autre n’est observé que dans le prisme de son rapport au Pouvoir et au système. Ainsi, on ne combat pas le système, on passe son temps à surveiller ceux qui sont dehors pour qu’ils n’y entrent pas. Et cela fait le jeu des tenants de leurs intérêts égoïstes. Car, dans un système maintenu par l’épée et la glaive, nul besoin de gonfler le nombre de parts du gâteau.

Depuis 2008, année de la création du mouvement IRA, qui n’a pas entendu que Biram est une création des service des renseignements? Qui n’a pas entendu que Biram est infiltré issu des rangs de la jeunesse du PRDS d’alors pour torpiller l’opposition et surtout pour assassiner politiquement Messaoud Ould Boulkheir qui fut un leader incontesté du mouvement haratine ? Et depuis que ce dernier est devenu l”inamovible président du conseil économique et social, il est devenu un parias dans la majorité des officines de l’opposition. 

Qui n’a pas lu ou entendu que l’Ufp a toujours été une arme au service du système militaire, voire même que son leader est un agent de renseignement ?  Quand Ibrahima Mifo Sow à été reçu en 2011 par le président de la République, qui n’a pas entendu que les Flam se sont vendues au Pouvoir ? Quand Ibrahima Sarr refuse toute unité structurelle de l’opposition pour des raisons de principe et de respect des règles de son parti, qui n’a pas dit qu’il travaillait pour le système et qu’il avait un pacte secret avec ce dernier ? Quand la Cve a éclaté après les élections de 2019, qui n’a pas entendu que ceux qui étaient avec Hamidou Baba étaient de la “CVE des hommes d’affaires” qui défendaient leurs intérêts personnels ? Quand l’Ufp et le RFD ont signé le “Pacte républicain” avec le pouvoir, que n’a-t-on pas entendu sur des “intérêts égoïstes” qui sont à la base de cette initiative ? Lorsque Hamedine Mokhtar Kane mobilise ses moyens personnels pour se présenter à l’élection présidentielle, que n’a-t-on pas entendu où lu ? Certains soutenaient que Hamedine est financé par le pouvoir qui chercherait une alternative au leadership négro-africain, et que même Amadou Alpha son principal soutien a reçu des millions, d’autres se basant sur les révélations de leurs cauris affirmaient que c’est Bouamatou qui le finançait.

Et pourtant parmi ceux-ci, ceux qui hier, soutenaient mordicus que Biram Ould Dah est un pion des militaires et qui ont fini par le rejoindre lors de ses dernières élections. Pour quelles raisons? A eux de nous le dire. Lorsque Outouma Soumaré déclara sa candidature et obtint les parrainages requis grâce à l’aide de l’Insaf comme tous les autres candidats ( à l’exception notoire du candidat de Tawassoul), la machine de la calomnie et des ragots se mit en branle.

Outouma ne serait plus un candidat qui cherche le pouvoir, mais candidat contre Biram pour affaiblir ce dernier au sein de l’électorat soninke. Plus, on rapporta en y insistant que son épouse ( même si c’est une ex) est ministre du gouvernement. Et malheureusement pour lui, toutes ces affirmations gratuites sont validées par les officines des ragots depuis ses regrettables félicitations à Ghazouani pour sa victoire aux élections présidentielles.

C’est vrai que Ghazouani a gagné n’en déplaise à une certaine opinion. Mais c’’est aussi vrai qu’on ne félicite pas quelqu’un qui a gagné par la triche, et surtout quelqu’un dont les forces de l’ordre tuent pour légitimer sa victoire. On ne félicite pas au moment où il faut d’abord prier pour les morts innocents et surtout au moment où tout le monde doit rester soudé pour exiger justice. C’est aussi le cas un Biram qui demande un dialogue alors que des innocents sont torturés et massacrés en partie à cause de lui ou de son positionnement par rapport aux élections. Mais de là à transformer toutes ces erreurs en stratégies de collabos, je pense que c’est trop. C’est trop surtout quand on dénature les propos des uns et des autres.

Et pourtant, dans la dépêche publiée suite à l’entretien téléphonique entre Outouma et Ghazouani, Outouma a bien précisé que son éventuelle collaboration devrait s’inscrire dans le cadre de l’opposition, ce que Ghazouani aurait bien compris et confirmé, mais les ragotteurs n’en ont cure. Pour eux, Outouma chercherait tout simplement à conserver son poste de directeur d’un Hôpital de la place à defaut d’obtenir un poste de ministre.

Quand ceux qui aspirent à diriger un jour ce pays tombent dans de telles bassesses, avouons que nous ne sommes pas sortis de l’auberge. Quand dans une démocratie en devenir nul n’a le droit de discuter avec les tenants du pouvoir, reconnaissons que nous ne travaillons pas pour l’avènement d’une Mauritanie démocratique. Feu Hamidou Baba ( Paix à son âme) disait que “ le dialogue doit rester une forme de civilisation”.

Alors que pour une certaine opposition,  le dialogue est encore vécu comme un sacrilège. Et pourtant, parmi les principes fondamentaux de toute démocratie, il y a d’abord le dialogue et le respect des opinions. Dans toutes les démocraties du monde, on discute avec le Pouvoir, on fait et on défait des alliances de partage de ce Pouvoir. Et le débat ne portera que sur les raisons idéologiques,  programmatiques ou stratégiques de ces alliances. Pas sur des invectives, des insultes et des ragots.

Malheureusement que pour l’opposant mauritanien, nul n’a d’opinion en dehors de la sienne, toute autre vision en dehors de la sienne est synonyme de collaboration avec l’ennemi. Alors à quand cette unité de l’opposition tant chantée par les lèvres et les stylos, et qui en réalité ne semble jamais souhaitée par les cœurs et les esprits ? D’ailleurs, qui s’intéresse au programme politique des autres ? Personne. Aucun leader de parti ne soutiendra connaître en detail le programme politique de son partenaire voire même celui du pouvoir en place. Avec une presse en mal d’existence dont les principaux piliers que sont la radio et la télévision sont contrôlés en majorité par l’état ou ses relais, le citoyen restera toujours le dindon de cette farce à la merci des fakenews rapportés par les réseaux sociaux.

S’il vous plaît, debattez et ne vous battez pas. 

Amadou Alpha BA

senalioune.com

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