Eveil Hebdo - Le contentieux opposant l’Union des Forces de Progrès à Mme Kadiata Malick Diallo, députée élue sous les couleurs de l’UFP à deux reprises (2006 et 2018), n’en finit pas de finir. Loin de s’arranger, les relations si froides entre la direction présidée par Mohamed Ould Maouloud et la députée viennent de connaître un nouvel épisode alors que le différend reste entier.
Mme Kadiata Malick Diallo, députée à l’Assemblée Nationale, a annoncé, le18 octobre, dans un communiqué sa démission du groupe parlementaire UFP-RFD. Elle s’en va, dit-elle, « après avoir enduré tant d’injustice, de provocation et de traitement pour le moins sans élégance ».
Mme Diallo estime « de ce fait (qu’) après avoir consenti le sacrifice de me faire exclure pendant plusieurs années, pour sauver la vie du groupe, qu’il s’agissait là d’un mépris de la part de Mohamed Ould Maouloud et son clan à mon égard, attitude que beaucoup de gens pourraient trouver surprenante de sa part, lui qui prétend lutter contre les injustices, les discriminations, les règlements de compte et l’exclusion », se désole-t-elle.
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase
Pour les proches de Mme Diallo, ces agissements font suite à l’échec de la manœuvre visant principalement à dépouiller l’élue de son mandat électif qu’elle avait « arraché de haute lutte », « mandat dont elle dispose pour servir le peuple qui a placé en elle sa confiance ».
« La direction du parti ne s’est pas gênée de demander au ministère de l’intérieur de me retirer mon mandat de député, tout comme elle s’est opposée durant ces quatre années de mandat à ce que je puisse avoir une quelconque responsabilité dans les instances de l’Assemblée nationale. Sans compter d’autres coups bas que la décence m’empêche d’évoquer ici », avait-elle déclaré, dans une interview à un journal de la place.
Dans son communiqué, elle rappelle, les méthodes sans cesse prises par le président du parti pour l’écarter alors qu’au « lendemain de notre élection en 2018, alors même que l’Ufp vivait une situation normale (nous assistions naturellement aux réunions des instances, le Comité Permanent en particulier) l’opposition avait décidé de mettre sur pied une commission de préparation de l’activité parlementaire ».
La première semble manquer pour le moins de tact. « Mohamed MAOULOUD, sans poser le problème au CP et sans m’informer (alors que je suis vice-présidente, chargée des élus et ayant une expérience de 7 ans de vie parlementaire), désigne Khalilou DEDDE, fraîchement élu député, pour y représenter l’UFP. Je ne l’apprendrai que lors de la réunion regroupant tous les députés de l’opposition, dirigée alors par Yahya Ahmed Waghef », fait-elle savoir.
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase aura été la note envoyée par whatsApp à sa « grande surprise », mentionne-t-elle, à l’ouverture de la première session parlementaire 2022-2023, la cinquième année de notre mandat et probablement la dernière session de la législature en cours, « nous informant que « dans le cadre du renouvellement des instances de l’Assemblée Nationale, le groupe UFP-RFD procède ainsi qu’il suit : « Président du groupe Khalilou Deddé ; Rapporteur général du budget : Nana Cheikhna ».
Je demande alors des explications. Sur notre insistance (mes deux collègues Mohamed Lemine Sidi Mowloud et Me El Id) le président du groupe finit par accepter l’idée d’une réunion. Cette fois, j’ai tenu à exprimer, avant et au cours de la réunion, mon refus d’accepter un piétinement systématique de mes droits qui dure depuis quatre ans. Nous avons été obligés de suspendre la réunion et de demander au président du groupe Abderrahmane Mini, de tenter de trouver une solution de compromis. Au bout d’une semaine, le président nous a réunis de nouveau pour nous annoncer qu’il n’a pas pu trouver de solution et que la décision qu’il avait annoncée reste inchangée », indique-t-elle.
Réconfortée par la justice
Considérés comme démissionnaires et suspendus par l’UFP, Mme Diallo et un groupe de cadres et militants avaient obtenu gain de cause auprès de la Cour d’Appel, en avril 2022, suite au recours engagé contre l’organisation illégale du congrès de l’UFP des 28, 39 et 30 août 2020.
L’arrêt de la Chambre Civile et Sociale No. 1 de la Cour d’Appel de Nouakchott Ouest : « La Cour a décidé définitivement et présentement d’accepter l’appel dans la forme et dans le fond, d’annuler le jugement numéro 32/2021 en date du 31/05/2021 de la chambre civile du tribunal de la wilaya de Nouakchott Ouest, de déclarer la nullité des dispositions de la tenue du congrès ordinaire du parti Union des Forces de Progrès, tenue les 28,29 et 30 août 2020 et des résultats qui y émanent ».
La lecture est simple tant le verdict est clair. « Après avoir statué sur la forme et le fond de l’appel interjeté par nous, le tribunal a annulé le jugement prononcé par la chambre civile qui avait siégé en première instance et qui, tout en reconnaissant notre appartenance au parti (annulant de ce fait une des résolutions du congrès), avait par la même occasion rejeté notre demande d’invalidation du congrès du parti. Pour la Cour d’Appel, toutes les mesures prises pour la tenue du congrès sont caduques et tout ce qui en émane est nul. Ça veut dire que la commission de réimplantation, le renouvellement des adhésions qu’elle a effectué, les sections implantées ainsi que les délégués désignés sont donc invalidés. Il en va de même pour la commission préparatoire du congrès et pour toutes les décisions qui s’y rattachent (textes fondamentaux, résolutions et instances élues). Ce qui signifie désormais que tout ce qui émane de ce Congrès est nul et de nul effet ; de sa préparation à son aboutissement. Je m’étonne qu’un des vice-présidents du parti, de surcroît éminent juriste, ramène la décision du juge à notre « retour » au parti et à notre participation (nous qu’il continue d’appeler ex-camarades) aux activités conçues par son clan, affirmant au passage que le juge a ordonné la reprise du congrès. Non, je le répète, le juge a invalidé le congrès, toutes les dispositions antérieures y afférentes ainsi que les décisions s’y rapportant. Il ne s’est nullement prononcé sur ce que l’UFP devrait faire ultérieurement. C’est l’affaire de l’UFP. Une résolution spécifique nous concernant indique en effet que nous sommes démissionnaires du parti », avait-elle commenté.
Elle avait salué par la suite une décision de justice venue annuler des mesures prises à l’occasion d’un congrès dont l’unique objectif était « d’exclure des responsables et cadres du parti, considérés comme éléments récalcitrants, sur instigation du président du parti, Mohamed Ould Maouloud. Un congrès organisé en violation des textes de l’UFP, dans l’illégalité totale. Cet arrêt de la Cour d’Appel confirme une première décision qui été prise par le tribunal de Nouakchott Ouest laissant le litige entier ».
La députée estime, dans un entretien avec nos confrères de 360 que justice a été rendue dans l’intérêt de la promotion de la culture démocratique au sein des partis politiques de l’opposition, dont les dirigeants formulent des exigences vis-à-vis des gouvernants, sans respecter les mêmes principes dans le fonctionnement de leurs différentes formations.
Saydou Nourou T.
depeche.mr